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Que l'on soit à l'extérieur ou à l'intérieur d'une cathédrale, nous sommes séduits par son architecture et sa profusion de décors. Mais une autre dimension nous interpelle : leur construction. Quels hommes ont eu l'audace de lancer de tels défis ? Comment ont-ils réalisé ces prouesses techniques ? La réponse à ce "mystère des cathédrales" n'est-elle pas à chercher dans le génie des bâtisseurs ? Ne serait-ce pas « ce que les penseurs médiévaux ont appelé "l'Éternelle Sagesse"   »<ref>Page 13, in Christian JACQ, ''Le message des constructeurs de cathédrales'', Paris, Éditions J'AI LU, 1986, 215 pages, EAN 9782290343814</ref> ?
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[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Gravure.jpg|thumb|right|500px|Gravure représentant un chantier|link=]]

== Bâtisseurs ou constructeurs ? ==
Ces deux mots ont le même sens, mais "bâtisseur" compte parmi ses synonymes : initiateur, ou conquérant, ce qui n'est pas le cas pour "constructeur".<br>
Cela correspond bien à l'esprit des « bastisseurs »<ref>Terme du XVI{{e}} siècle</ref> du Moyen Âge : tous les corps de métiers, et même les manœuvres qui n'ont rien "construit", ont mutualisé leurs efforts avec le même '''sens du Devoir'''. Et n'oublions pas leur ingéniosité à se doter d'outils ou de moyens pour faciliter leur travail.<br>
Organisés « en confréries, en fraternités ou en compagnonnages »<ref>[http://chemin47.eklablog.net/les-batisseurs-de-cathedrales-a117723592 Les bâtisseurs de cathédrales - Chemin]</ref>, leur œuvre témoigne encore de leur ferveur, et ils sont ancrés dans l'Histoire en tant que "bâtisseurs de cathédrales".<br>

== Le projet ==
* La construction d'une cathédrale ne s'improvise pas. Le projet déjà rêvé et pensé au préalable se concrétise avec l'accord entre le commanditaire (souvent un évêque, un ecclésiastique ou la fabrique) et son maître d'œuvre. Il s'agit là d'un contrat précisant les obligations du maître d'œuvre et son salaire. Les documents historiques nous apprennent que le maître d'œuvre de [[Cathédrale Notre-Dame d'Évreux|Notre-Dame d'Évreux]], Gauthier de Varinfroy, touchait « 50 livres par an »<ref>Page 31, in Olivier MIGNON, ''Architecture des cathédrales gothiques'', Lille-Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2015, 48 pages, ISBN 978-2-7373-6535-5</ref>.
* Alors que le commanditaire (aussi appelé maître d'ouvrage) se charge du choix de la carrière de pierres et de l'approvisionnement du chantier, le maître d'œuvre mettra en œuvre et suivra le déroulement du projet depuis la conception des plans et des fondations, jusqu'à la finalisation de l'édifice.
{{article détaillé|article=Âge d'or des cathédrales|affiche=Pour découvrir l'âge d'or des cathédrales en France... }}

== Maître d'œuvre ou architecte ? ==
[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Plans.png|thumb|left|250px|Maître d'œuvre et commanditaire<br>''Dessin de Viollet-le-Duc''<br>''Dictionnaire raisonné de l'architecture'']]
* Le '''« maitre d'œuvre »''', ainsi appelé au Moyen Âge, est le plus souvent un maître maçon, « homme formé à un art combinant les fonctions d'architecte, d'ingénieur et de maître d'œuvre »<ref>Page 12, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref>.  Pivot de la réalisation du début à la fin, une lourde responsabilité pesait sur ses épaules. Il était respecté et son statut lui conférait des privilèges.
* Après six ans d'apprentissage, le maçon préparait un chef d'œuvre pour être accepté dans la communauté des Compagnons et on lui donnait « son nom secret d'initiation »<ref>Page 120, in Christian JACQ, ''Le message des constructeurs de cathédrales'', Paris, Éditions J'AI LU, 1986, 215 pages, EAN 9782290343814</ref>. Il voyageait de chantier en chantier et engrangeait de l'expérience. Un jour enfin, son talent était reconnu, il pouvait passer l'ultime épreuve et acheter sa maîtrise.
* Dans les diverses représentations, le maître d'œuvre porte un bonnet et une canne. Les attributs l'accompagnant sont le compas et l'équerre, instruments fondamentaux de la géométrie.
* Quant au terme '''architecte''' (issu du latin ''architector'') il n'apparaît qu'au milieu du {{XIIIe siècle}} ou au début de la Renaissance suivant les auteurs. Peu à peu l'architecte va se poser en "homme savant" par rapport au maître d'œuvre qui était "homme d'expérience". Mais les statuts de chacun resteront flous un long moment, et cela ne se passera pas sans heurts, car l'architecte deviendra un dessinateur et « donneur d'ordres »<ref>Page 46, dans l'article de Jean-Louis Biget et Patrick Boucheron intitulé "Le grand chantier médiéval", in Collectif d'auteurs, Revue mensuelle "L'Histoire", ''Les bâtisseurs de cathédrale, <small>les secrets des chefs d'œuvre</small>'', Paris, Société d'éditions scientifiques, 2000, 98 pages</ref> qui se détachera progressivement du chantier et des artisans.
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== La communauté des "pierreux" ==
{| align="right"
|- 
|[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Tailleurs_Pierre.JPEG|thumb|right|180px|Tailleur de pierre, XIV{{e}} siècle<br>''Gallica images'']]
|[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrale_Signe_Lapidaire_Equerre.JPG|thumb|right|225px|Équerre à claveaux : représentation d'un signe lapidaire trouvé à l'abbaye de Fleury (Musée de la glyptographie à Colmar)]]
|}

Cette communauté englobait tailleurs de pierre et maçons, d'ailleurs inclus dans la même corporation au Moyen Âge, ainsi que divers métiers moins connus qui gravitaient autour.

=== Tailleurs de pierre ===
* Sans les tailleurs de pierre, aussi dénommés « entailleurs » ou « espilleurs », le chantier ne pouvait pas démarrer. <br>
: Mais encore en amont, sur le site même de la carrière, travaillaient les '''carriers''' qui extrayaient la pierre et la détaillaient grossièrement sous la supervision du maître carrier.
* Certains tailleurs travaillaient aussi à la carrière, car la pierre fraichement extraite était plus tendre à tailler. D'autres travaillaient sur le chantier pour y affiner le bloc en fonction des attentes de '''l'appareilleur''' ou du maître maçon. <br>
: Par mauvais temps, ou pour une taille plus minutieuse, les tailleurs se rendaient dans '''la loge''', un atelier fermé et plus ou moins chauffé en hiver, où ils côtoyaient les maçons. C'était aussi l'endroit idéal pour ranger leurs outils.
* L'apprentissage des tailleurs durait six ans. Métier difficile car exposé aux intempéries et exigeant beaucoup de force, il était interdit aux moins de 15 ans. L'apprenti devait savoir reconnaître chaque type de pierre et de quelle façon l'aborder. Il devait maîtriser à la perfection la taille de formes spécifiques « destinées aux clés de voûte, voussoirs, moulures ou chapiteaux »<ref>Page 56, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref> s'il souhaitait devenir '''Compagnon'''.<br>
<br>
: '''Les outils des tailleurs de pierre''' : 
: - la fameuse équerre permettant de tailler les claveaux avec la même inclinaison pour tous, comme en témoignent certains signes lapidaires (illustration ci-contre),<br>
: - mais aussi : compas d'appareilleur, massette, ciseaux, broche, smile (pic à deux pointes), taillant (hache à brettelures), boucharde, peigne à grès, chemin de fer, scie crocodile, bordelaise... ''(Source <ref>Pages 53 et 54 in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>)''.
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=== Maçons ===
* C'était un métier courant, souvent exercé de père en fils. Mais aussi un métier ambigu ou polyvalent, certains maçons assumant les tâches de tailleurs de pierre ou d'architecte, même si le terme n'était pas encore en usage. Enfin c'était un métier itinérant pour les maçons devenus Compagnons. D'ailleurs sur un chantier de cathédrale étaient employés de nombreux migrants.
[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrale_Statuts_maçons.JPEG|thumb|left|200px|Statuts de la corporations de maçons, tailleurs de pierre et charpentiers d'Altkirch<br>''Gallica images'']]
* Parmi les maçons talentueux, certains passaient leur maîtrise et pouvaient alors diriger toute une construction. D'autres choisissaient de devenir '''ravaleur''' : cette qualification exigeait le goût du travail soigné car la tâche consistait à ajuster les irrégularités d'un élément architectural pour qu'il présente un aspect fini plus harmonieux. Le métier était d'ailleurs mieux rémunéré que celui de simple maçon.
* Les maçons étaient vêtus d'une blouse de couleur blanche « qui leur valait le surnom "d'hirondelles blanches" »<ref>Page 50, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>. Ils portaient une hotte et une calotte rembourrée afin de transporter leur auge sur la tête quand ils montaient à l'échelle. D'ailleurs, le travail des maçons était indissociable de celui des '''morteliers''' et '''plâtriers''', ainsi que du '''maître gâcheur'''.
<br>
'''Les outils des maçons''' : auge, truelle, sciotte, équerre de maçon, fil à plomb...
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* '''Remarque''' : À l'époque médiévale, le maçon « était appelé "franc" car il travaillait la franche pierre, c'est à dire une pierre qui pouvait se tailler sans risque dans le sens du grain ou à contresens »<ref>Page 46, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>. <br>
Est-ce là l'origine de la franc-maçonnerie ? Aucun historien ne peut l'affirmer avec certitude.
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=== Sculpteurs ===
[[Fichier:Cathédrale_Saint_Etienne_Portail_Occidental.JPG|thumb|right|250px|Grand portail occidental<br>[[Cathédrale Saint-Étienne de Metz]]<br>{{Photo B.ohland}}]]
* Au début du Moyen Âge, le sculpteur se confondait avec le tailleur de pierre. Ce n'est que vers le {{XIVe siècle}} que son statut se précise : le tailleur de pierre s'occupe du '''gros œuvre''', le sculpteur s'oriente vers la '''décoration'''. D'ailleurs certains auteurs rangent les sculpteurs avec les peintres, dans la communauté des "Imagiers".
* Alors que le sculpteur roman se focalisait sur tympan, voussures du portail, modillons sous corniches et chapiteaux de colonnes, l'architecture gothique crée de nouvelles zones propices à la sculpture, notamment les trois portails de la façade harmonique, les gâbles et autres dentelles sur tours, flèches ou pinacles, les gargouilles, et, à l'intérieur, chapiteaux et clés de voûte.
* Les '''thèmes''' à représenter concernaient surtout « un sujet religieux ou moralisateur »<ref>Page 171, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref> : scènes de l'Ancien Testament par exemple, galeries de prophètes ou rois, mais aussi des allégories comme celle représentant les ''Vices et vertus''. Mais l'interprétation du thème était laissée au soin de l'artisan. À cela se rajoutaient des créatures fantastiques, parfois surprenantes, voire grotesques. Enfin se répandaient partout décors végétaux, accompagnés parfois d'éléments du bestiaire de l'époque.<br>
: Quant à la '''statuaire''', elle alliait « l'élément humain à la théologie chrétienne »<ref>Page 178, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref>. <br>
: Les premiers sculpteurs ne signaient pas leurs œuvres. Une part d'entre elles leur était attribuée à posteriori, à partir de documents d'archives.
<br>
: '''Les outils des sculpteurs''' : laie pour épanneler, poinçon, gradine, ciseaux de diverses tailles, lime à polir, abrasif...
<br>
: '''Quelques sculptures''' :
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54 TOUL - Cathédrale St-Etienne - 04 - Copie.jpg|<center>Gâble sculpté<br>Saint-Étienne de Toul<br>''Photo Chantoue''</center>
67482 - Strasbourg - Cathédrale - exterieur detail 01.jpg|<center>Statue d'ange d'un portail,<br>Notre-Dame de [[67482 - Strasbourg|Strasbourg]]<br>{{photo Galichonj}}</center>
Bâtisseurs_Cathédrales_Gargouille.JPG|<center>Gargouille, Saint-Sauveur,<br>[[13001 - Aix-en-Provence|Aix-en-Provence]]<br>''Photo Alainpaul''</center>
27229_-_Evreux_cathédrale_ND_clef_de_voûte.JPG|<center>Clé de voûte<br>Notre-Dame d'Évreux<br>''Christiane Angsthelm</center>
26362 - Valence Chapiteaux L'homme aux serpents.JPG|<center>''L'homme aux serpents''<br>Saint-Apollinaire de Valence<br>{{Photo JPG}}</center>
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== Autres artisans ==
=== Charpentiers et couvreurs ===
[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Charpente.png|thumb|left|200px|Charpente de Notre-Dame de Paris : ferme maîtresse<br>''Dictionnaire raisonné de l'architecture]]
* '''Les charpentiers''' :<br>
: À la différence des métiers ci-dessus qui s'exerçaient librement, les charpentiers devaient se soumettre « à la juridiction d'un "charpentier royal" »<ref>Page 68, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>, qui, au XIII{{e}} siècle, était Foulques du Temple.<br>
: Les charpentiers apportaient leur contribution tout au long du chantier pour confectionner les échafaudages, la roue écureuil ou d'autres moyens de levage, mais aussi les cintres  en bois servant de support aux baies, portes ou voûtes. Puis, quand l'élévation était terminée, ils devenaient les maîtres du chantier pour '''coiffer l'édifice'''.<br>
: Les pièces principales de la charpente étaient les grandes fermes (il avait fallu « douze chênes »<ref>Page 92, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref> pour la [[Basilique cathédrale de Saint-Denis]]). Les charpentiers faisaient un premier assemblage au sol, marquaient ou numérotaient les pièces et les démontaient avant de les hisser à l'endroit final pour constituer « La forêt ».<br> 

Après avoir traversé plus de sept siècles, la '''charpente gothique de Notre-Dame de Paris''', de 110 mètres de long et 13 mètres de large, a entièrement brûlé avec sa flèche lors de l'incendie du 15 avril 2019. Souhaitant la reconstruire à l'identique, l'architecte en chef Rémi FROMONT donne en mars 2021 des consignes précises pour sélectionner 1 200 chênes centenaires, partout en France (Reportage de France 2, dans la forêt d'Oizon dans le Cher, diffusé au journal de 20 heures le 5 mars 2021). Fin janvier 2024, la "forêt" de Notre-Dame est entièrement reconstituée, non seulement à l'identique de la précédente mais aussi en respectant un savoir-faire médiéval, comme l'équarrissage à la hache. Après l'achèvement de la couverture et le retrait des échafaudages, la cathédrale retrouve son allure d'antan et, cinq ans après l'incendie, est prête à accueillir le public le 8 décembre 2024.
<br>
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'''Quelques pièces de bois''' : sole, colombes, poteaux principaux ou corniers, entretoises, sablières, sommiers, arbalétriers, filières, chevrons, gaulettes...
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* '''Les couvreurs''' :<br>
[[Fichier:28085 - Chartres - Cathédrale - toits 02.jpg|thumb|right|300px|Toiture de Notre-Dame de [[28085 - Chartres|Chartres]]<br>{{Photo Galichonj}}]]
: Initialement de la même corporation que les charpentiers, les '''couvreurs''' ont eu le droit de former une communauté spécifique « en 1292 »<ref>Page 69, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>, mais c'est seulement en 1703 que voient le jour les « Compagnons du devoir, en même temps que les Compagnons plâtriers »<ref>Page 56, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 3, ''Métiers de la terre cuite'', Revigny, Martin Média, 2003, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>.<br>
: C'était des ouvriers polyvalents, car ils devaient savoir utiliser différents types de couverture. Pour les cathédrales, il s'agissait le plus souvent d'ardoises, comme à [[51454 - Reims|Reims]] et [[10387 - Troyes|Troyes]], de tuiles en céramique dans le cas de Saint-Étienne de [[89387 - Sens|Sens]], ou de feuilles de plomb pour Chartres (à l'origine), ce qui nécessitait la collaboration des plombiers.<br>
: L'autre mission des couvreurs était de veiller à une bonne '''étanchéité''' et de gérer le drainage des eaux de pluie. Sur ces édifices, divers systèmes de conduites étaient utilisés, et des chéneaux étaient creusés en pente dans la pierre, souvent « dans la volée supérieure des arcs-boutants »<ref>Page 101, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref>, pour arriver jusqu'aux célèbres '''gargouilles''' permettant un jet à distance des murs.
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=== Verriers et plombiers ===
[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Dessin_Grisaille.png|thumb|left|220px|Dessin de grisaille<br>Saint-Étienne d'Auxerre<br>''Viollet-le-Duc'']]
* Les historiens font remonter la technique du vitrail au VI{{e}} siècle, mais elle connaît son apogée au {{XIIe siècle}} et va être élevée au rang d'art majeur pendant quatre siècles. 
* Pour concevoir leur décor, les '''maîtres verriers''' prenaient modèle sur des enluminures ou peintures de l'époque. Si c'était une gravure, cela devenait une grisaille. Son projet finalisé, le maître réalisait « une maquette en couleurs, en général au 1/10{{e}} »<ref name="Page 74">Page 74, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 25, ''Métiers de la lumière'', Revigny, Martin Média, 2007, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref> qu'il présentait à son commanditaire. Si le projet était accepté, il réalisait ensuite un '''carton''' à taille réelle. 
* Les '''peintres verriers''' s'occupaient de préparer le verre et de le colorer par « un mélange d'oxydes métalliques, de verre pilé et d'un liant »<ref name="Page 74"/>, qui était fixé par une cuisson au four, à 500° (le célèbre bleu de Chartres était obtenu à l'aide de cobalt). Les pièces découpées et numérotées étaient ensuite serties de gouttières de plomb coulées en amont par les '''plombiers''' (artisans polyvalents puisque nécessaires aux couvreurs). Puis l'ensemble était mastiqué et fixé aux baies, maintenu par les remplages ou par des barlotières.
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{{Article détaillé|article=Technique des verrières au XIXème siècle|affiche=Pour découvrir les techniques des verrières au XIX{{e}} siècle}}
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60057_-_Beauvais_cathédrale_St_Pierre_Arbre_de_Jessé_1240.JPG|<center>Arbre de Jessé, 1240<br>Saint-Pierre de [[60057 - Beauvais|Beauvais]]<br>''Christiane Angsthelm''</center>
67482 - Strasbourg - Cathédrale - Vitraux.jpg|<center>Grande rosace<br>Notre-Dame de Strasbourg<br>{{Photo JPG}}</center>
37261-Tours-Cathedrale St Gatien_z1695.jpg|<center>Verrière de l'abside<br>Saint-Gatien de Tours<br>''Gthirionet''</center>
69123 - Primatiale Saint-Jean-Baptiste Rosace transept A.jpg|<center>Rosace d'un transept<br>St-Jean-Baptiste de Lyon<br>{{Photo JPG}}</center>
18 - BOURGES - VITRAUX BOULANGER 02.JPG|<center>Vitrail offert par la corporation des boulangers, XIII{{e}}<br>Saint-Étienne de [[18033 - Bourges|Bourges]]<br>''Michel 45''</center>
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=== Peintres ===
[[Fichier:Bâtisseurs_Cathédrales_Portail_Coloré.JPG|thumb|left|220px|Portail ouest et ses couleurs<br>Notre-Dame de Senlis<br>''Christiane Angsthelm'']]
* Comme pour les tailleurs de pierre et les sculpteurs, la limite entre peintre en bâtiment et peintre décorateur n'était pas franchement marquée. Pour certains auteurs les peintres faisaient partie des '''imagiers''' au même titre que les enlumineurs et sculpteurs.
* Les surfaces à peindre étaient nombreuses. <br>
: -D'abord, l'accent était mis sur les portails extérieurs. Si cela s'est effacé avec le temps, sauf quelques touches sur le portail de la cathédrale de [[60612 - Senlis|Senlis]], la vivacité de la polychromie de Notre-Dame d'[[80021 - Amiens|Amiens]]  nous a été révélée récemment par un nettoyage au laser. <br>
:- À l'intérieur, tout était exploitable : les murs de la nef et les piles, pour des couleurs franches ou des fresques, la coupole de l'abside comme à Sainte-Cécile d'[[81004 - Albi|Albi]], les statues, les moulures ou voussures pour des frises décoratives, les clés de voûte.
* Avant le XIV{{e}} siècle, la peinture à l'huile n'existait pas encore. Les peintres mélangeaient des pigments naturels à un liant comme le blanc d'œuf ou l'alcool.
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=== Et tous les autres ===
De nombreux autres artisans participaient à l'œuvre collective :<br>
- '''Carreleurs''', pour les pavements en céramique ou les décors en mosaïque,<br>
- '''Forgerons''' pour préparer et réparer toutes sortes d'outils, pour les « chaînages, tirants et barlotières »<ref>Page 34, in Olivier MIGNON, ''Architecture des cathédrales gothiques'', Lille-Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2015, 48 pages, ISBN 978-2-7373-6535-5</ref>,<br>
- '''Ferroniers''' pour les ornements de portes, mais aussi les lutrins et supports de bougies,<br>
- '''Menuisiers''' pour certaines chaires, les stalles et leur miséricordes,<br>
- '''Drapiers''' et '''Tisserands''', pour les bannières, draperies ou tapis, mêlant l'esthétique de l'époque au confort,<br>
- '''Manœuvres''', appelés « '''œuvriers''' » au Moyen Âge, et tous citadins qui donnaient spontanément un coup de main...<br>
<br>
C'est cette fructueuse collaboration qui fera dire à Victor Hugo (1802-1885), dans son roman ''Notre-Dame de Paris'' (1831) :<br>
<center>« L'homme, l'artiste, l'individu s'effacent sur ces grandes masses sans nom d'auteur ; l'intelligence humaine s'y résume et s'y totalise.<br> Le temps est l'architecte, le peuple est le maçon ».</center> 
 
== Outils et techniques ==
* Les bâtisseurs n'avaient ni électricité ni pétrole, mais ils étaient ingénieux. Outre les traditionnelles échelles en bois, ils confectionnaient des '''platelages'''<ref>Passerelles en osier avec petites marches permettant de transporter sur des pentes douces divers chargements, y compris des civières de matériaux portées à deux</ref>. Différents engins de levage étaient fabriqués suivant les besoins, et mûs soit par un treuil, soit par une roue (comme la barre à roue des navires), soit par la fameuse '''grue médiévale''', couramment appelée "cage d'écureuil", actionnée par un ou deux hommes marchant dedans. Ainsi de lourdes charges pouvaient être hissées à l'aide de '''griffes''' prenant les blocs de pierre (ou autres objets) en tenaille.
* Les maîtres d'œuvre n'étaient pas forcément de grands mathématiciens. Tout était affaire de géométrie et de proportions. Les figures de base étaient le carré avec diagonales et variantes ainsi que le triangle (« la cathédrale de Bourges [...] repose sur la triangulation »<ref>Page 30, in Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7</ref>). À ces figures se rattachaient toutes sortes d'arcs de cercle tracés au '''compas'''.<br>
: Si vraiment secret il y a, il réside , selon Christian Jacq, dans le respect de la Divine Proportion et du Nombre d'Or, ainsi que dans l'art du dessin appelé « le Trait »<ref>Page 66, in Christian JACQ, ''Le message des constructeurs de cathédrales'', Paris, Éditions J'AI LU, 1986, 215 pages, EAN 9782290343814</ref> transmis par les maîtres maçons à leurs Compagnons.

== La signature des bâtisseurs ==
* Les tailleurs de pierre ont laissé des traces concrètes de leur labeur. Elles sont parfois appelées "marques de tâcherons", ce qui est une erreur, car les tâcherons étaient plutôt des aides ou des apprentis effectuant les menues tâches. Ces marques sont propres à chaque tailleur, sa signature en fait, comme le pentagone étoilé correspondant à un tailleur de Rouen, « Colin de Berneval »<ref>Page 60, in Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304</ref>. La "glyptographie" recense et étudie ces signes lapidaires et parvient à attribuer un auteur à certains signes. Il arrive de retrouver le même signe sur d'autres édifices, prouvant les déplacements du tailleur en question.

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<gallery perrow=3 widths=360 heights=180>
Bâtisseurs_Cathédrales_Signes_Lapidaires_Abbaye_Montmajour.JPG|<center>Moulages de signes retrouvés à l'[[Abbaye de Montmajour|abbaye de Montmajour]]. <br>''Musée de la glyptographie à Colmar''</center>
Bâtisseurs_Cathédrales_Signes_Lapidaires_Cathédrale_Strasbourg.JPG|<center>Moulages de signes retrouvés à la cathédrale de Strasbourg. <br>''Musée de la glyptographie à Colmar''</center>
Bâtisseurs_Cathédrales_Signes_Lapidaires_Abbaye_Sénanque.JPG|<center>Moulages de signes retrouvés à l'[[Abbaye de Sénanque|abbaye de Sénanque]]. <br>''Musée de la glyptographie à Colmar''</center>
</gallery>
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* Une grande partie des maîtres d'œuvres du début ne nous est pas connue. Cela faisait partie de leur philosophie, le but de l'œuvre primant sur la gloriole personnelle. Mais petit à petit, certains ont laissé leur empreinte, et plus encore avec la progression du gothique rayonnant et du statut d'architecte. En voici quelques exemples : :
:- une inscription de 1257 sur les murs de [[Paris - Cathédrale Notre-Dame de Paris|Notre-Dame de Paris]], pour Jean de Chelles,<br>
:- trois noms figurant encore dans le labyrinthe de Notre-Dame d'Amiens,<br>
:- des pierres tombales comme celle d'Hugues Libergier (avec une représentation de sa personne) à Notre-Dame de Reims, ou celle de Pierre Perrat à Saint-Étienne de [[57463 - Metz|Metz]],<br>
:- des statues réalisées plus tard, comme celle d'Erwin von Steinbach à Strasbourg...
* Puis d'autres architectes devinrent célèbres, particulièrement '''Viollet-le-Duc''' pour avoir "revu et corrigé" de nombreux édifices, soit en finissant des parties inachevées au Moyen Âge, soit en en restaurant d'autres, avec toujours comme principe « revenir à la logique initiale des bâtisseurs de cathédrales »<ref>Page 57, in Collectif d'auteurs, Revue mensuelle "L'Histoire", ''Les bâtisseurs de cathédrale, <small>les secrets des chefs d'œuvre</small>'', Paris, Société d'éditions scientifiques, 2000, 98 pages</ref>.
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== {{Bibliographie}} ==
* Malcolm HISLOP, ''Comment bâtir une cathédrale, <small>la fascinante histoire des chefs d'œuvre de l'architecture médiévale</small>'', Paris, Guy Trédaniel Éditeur, 2013, 224 pages, ISBN 978-2-8132-0610-7
* Olivier MIGNON, ''Architecture des cathédrales gothiques'', Lille-Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2015, 48 pages, ISBN 978-2-7373-6535-5
* Christian JACQ, ''Le message des constructeurs de cathédrales'', Paris, Éditions J'AI LU, 1986, 215 pages, EAN 9782290343814
* Collectif d'auteurs, Revue mensuelle "L'Histoire", ''Les bâtisseurs de cathédrale, <small>les secrets des chefs d'œuvre</small>'', Paris, Société d'éditions scientifiques, 2000, 98 pages
* Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 22, ''Gens d'église'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304
* Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 21, ''Métiers du bâtiment'', Revigny, Martin Média, 2006, 86 pages, ISSN 1639-7304
* Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 3, ''Métiers de la terre cuite'', Revigny, Martin Média, 2003, 86 pages, ISSN 1639-7304
* Collectif d'auteurs, revue "Nos ancêtres, vie & métiers" n° 25, ''Métiers de la lumière'', Revigny, Martin Média, 2007, 86 pages, ISSN 1639-7304

== {{Voir aussi}} ==
* [[Édifices et bâtiments religieux]]
* [[Quelques termes sur l'architecture et le mobilier d'église]]
* [[Cathédrale Saint-Étienne de Toul]]
* [[26362 - Cathédrale Saint-Apollinaire|Cathédrale Saint-Apolliniare de Valence]]
* [[Cathédrale Saint-Gatien de Tours]]
* [[69123 - Primatiale Saint-Jean-Baptiste|Primatiale Saint-Jean-Baptiste de Lyon]]
* [[17300 - Cathédrale Saint-Louis|Cathédrale Saint-Louis de La Rochelle]]
* [[Cathédrale Saint-Luperc d'Eauze|Cathédrale Saint-Luperc d'Eauze]]
* [[Métiers anciens]]

== {{Liens utiles}} ==
* [http://chemin47.eklablog.net/les-batisseurs-de-cathedrales-a117723592 Les bâtisseurs de cathédrales - chemin]
* [http://www.oeuvre-notre-dame.org/cathedrale-de-strasbourg/histoire-cathedrale/techniques-construction-batisseurs Les techniques de constructions des bâtisseurs]
* [https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle Dictionnaire raisonné de l'architecture]
* [https://www.francetvinfo.fr/culture/patrimoine/incendie-de-notre-dame-de-paris/au-c-ur-de-la-nouvelle-foret-de-la-cathedrale-notre-dame-de-paris_6350788.html Au cœur de la nouvelle "forêt" de Notre-Dame de Paris]

== {{Notes et références}} ==

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{{Références|colonnes=2}}
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