Musée de la conserverie Alexis LE GALL de Loctudy

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Musée de la conserverie Alexis LE GALL
Contact
Adresse : 8 impasse du nord

29750 LOCTUDY
Téléphone : 02 98 98 83 99
Télécopie :
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Directeur: Johan VERDIER
Informations pratiques
Horaires d'ouverture: Horaires
Tarifs : Consulter les tarifs

Musée de la conserverie Alexis LE GALL

Musée de la conserveriePhoto D. PÉRON
Le séchage du poisson dans la cours de l'usine

L'Usine, située à Loctudy, est construite en 1901 par Jean-Marie VALLIÈRE DES FILLIÈRES négociant en pommes de terre. Elle sera revendue en 1919 à Alexis LE GALL, fils de conserveur douarneniste. Elle fermera ses portes en 1954-1955 après une mauvaise saison de la sardine.
L'usine et ses dépendances furent ensuite rachetées par Jean-Philippe CHAPALAIN, époux de la petite fille d'Alexis Le Gall, qui veilla à sa conservation entre la fin des années 1980 et le début des années 2010.
La municipalité de Loctudy, avec l'aide de partenaires[1], prendra en charge le site en 2016 pour le transformer en musée.
Le Musée a pour objectif de transmettre la mémoire des activités de conserves de poisson de la première moitié du XXe siècle en Bretagne.

L'invention de l'appertisation par Nicolas APPERT (1749-1841)

Nicolas Appert
Nicolas Appert
Nicolas Appert

Depuis fort longtemps, la conservation des aliments connaît de multiples modes. Aucun cependant ne parvient à restituer la fraicheur originelle des denrées alimentaires, jusqu'au jour où Nicolas APPERT invente le principe de conservation qu'il appelle : "l'application du calorique par le bain-marie". Alors que les guerres du directoire stimulent les recherches en tout genre concernant la conservation des aliments, le confiseur parisien, fort seulement d'une connaissance empirique de conservation domestique, réalise ses premières conserves avant la fin du siècle. La qualité et l'avenir de l'appertisation sont officiellement reconnus en 1810 par la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale et par le ministre de l'Intérieur, MONTALIVET. Cette même année, Nicolas APPERT publie "L'art de conserver, pendant plusieurs années, toutes les substances animales et végétales"[2], consacrant ainsi l'entrée de son invention dans le domaine public.

Laissons à l'inventeur le soin de présenter le principe de son procédé :
"Je dois à mon expérience et surtout à une longue persévérance, de m'être convaincu :
  • 1) que la matière du feu à la propriété à elle seule, non seulement de changer la combinaison des parties constituantes des productions végétales et animales, mais encore, sinon de détruire, au moins d'arrêter pour plusieurs années, l'effet de la tendance naturelle de ces productions à la décomposition.
  • 2) que son application d'une manière convenable à toutes ces productions, après les avoir privées le plus rigoureusement possible du contact de l'air, opère la parfaite conservation de ces mêmes productions avec toutes leurs qualités naturelles."

Nicolas APPERT n'utilise encore que des récipients de verre, bien connus dans sa région natale, la Champagne, qu'il a adaptés à la conserve. La paternité du procédé de conservation par la chaleur des produits alimentaires en récipient hermétiquement clos lui revient incontestablement. L'idée d'appliquer son procédé à la boîte en fer blanc naîtra simultanément des deux côtés de la Manche; l'innovation était dans l'air du temps.

Appertisation

  • Définition : Denrée d'origine animale ou végétale, périssable, dont la conservation, dans des conditions normales d'entreposage, à température ambiante, est assuré par l'appertisation, c'est-à-dire par l'emploi combiné, sans que l'ordre en soit défini, des deux techniques suivantes :
Conditionnement dans un emballage étanche aux liquides et micro-organismes et suffisamment imperméable au gaz.
Traitement par la chaleur pour détruire ou inhiber totalement les enzymes, les micro-organismes et leurs éventuelles toxines dont la présence ou la prolifération pourraient altérer la denrée appertisée ou la rendre impropre à la consommation.[3]
  • Barème de stérilisation[4] = (temps + température de stérilisation).

Pour chaque produit (contenant et contenu), il est nécessaire de déterminer son barème de stérilisation. Il est possible de diminuer le temps de stérilisation en augmentant la température de stérilisation.
Augmenter la température de stérilisation permet la destruction plus rapidement des spores thermorésistantes, mais au détriment des qualités organoleptiques du produit.


Les 2 paramètres du barème de stérilisation sont choisis en fonctions de différents critères :

1) La température :

- de 90° à 100° pour les produits acides (pH >4.5), exemple : conserves de fruits, de compotes, … ).
- 115° et plus pour les produits non acides (pH > 4.5), exemple : conserves de légumes, viande, poisson, … ).
Évolution des témpératures lors de la stérilisation

2) Le temps de stérilisation : (montée en température, palier et refroidissement)

Le temps de stérilisation est déterminé en fonction de :
- la température initiale du produit,
- sa texture,
- son volume,
- la forme du contenant,
- du type de contenant,
- du niveau de contamination initial,
- du temps de montée en température.

Les conserveries en Bretagne

Dans la nature, l'abondance de nourriture dépend des saisons. Pour se nourrir pendant l'hiver, il est vital pour les humains de conserver la nourriture à travers le temps. Pour que les aliments restent comestibles, on peut les sécher ou les fumer. On peut aussi les confire au moyen de conservateurs : le sel, le sucre, l'alcool, le vinaigre ou la graisse conservent bien les aliments… mais ils changent leur goût et leur qualité. L'invention de la technique de la conserve par stérilisation (appertisation) est une grande innovation. La stérilisation est rapidement appliquée à toutes sortes d'aliments. L'époque est favorable, c'est la révolution industrielle. D'autres nouveautés participent au développement de la conserve : les machines à vapeur, la boîte en fer blanc, l'extension du chemin de fer…

Les Bretons se tournent vers la mer

Les conserveurs originaires de Nantes vont chercher le poisson toujours plus à l'ouest. Dans le Finistère, ils construisent les premières usines dans les années 1850. Douarnenez et Concarneau sont les ports sardiniers les plus importants. Les créations d'usines se multiplient jusqu'en 1881, année de crise de la pêche. Les ports du Pays bigouden comptent alors 15 conserveries. Pour la moitié, elles existent depuis moins de 3 ans. Les petits hameaux de bord de mer sont devenus de vrais villages ! Les paysans, les marins et les ouvrières viennent se faire embaucher pour la saison de la sardine.

Les conserveurs sont en position de force

Après avoir pêché le poisson, les conserveurs fixent les prix et les salaires. Ils demandent à la mairie et au département des cales et des quais pour faciliter le déchargement du poisson. Ils réclament aussi des liaisons de chemin de fer pour expédier leur production par le train.
Les saisons de pêche s'enchaînent, avec de bonnes et mauvaises campagnes.
Certaines années, la pêche est catastrophique. Sans travail, sans ressource, toute la population des ports plonge dans la misère. Pendant ce temps, les Espagnols et les Portugais peuvent pêcher et s'emparer des marchés français, la concurrence est rude.
Après-guerre, dans les années 1950, la glace et les chambres froides révolutionnent la pêche.
La conserve n'est plus le seul moyen pour conserver. Les usines peuvent acheter du poisson congelé et travailler toute l'année. Les petites conserveries ont du mal à survivre : elles disparaissent, ou se regroupent en de grosses usines. Le rythme de vie sur la côte n'est plus saisonnier : la pêche et la conserverie sont devenues des métiers de toutes les saisons.


Historique

  • Avant 1795 : Le poisson peut être conservé par séchage et salage
  • 1795 : Nicolas APPERT met au point une technique de conservation en stérilisant des bouteilles étanches: la conserve est née.
  • 1824 : Les COLIN, une famille de confiseurs, ouvrent à Nantes le premier atelier de fabrication de conserve de poisson.
  • Années 1840-1850 : Les investisseurs créent des usines toujours plus à l'ouest vers la pointe bretonne. Une innovation est brevetée pour stériliser plus vite les conserves, c'est l'autoclave, une cocotte-minute à l'échelle industrielle.
  • 1880 : La sardine déserte les côtes bretonnes, c'est la crise pour tout le littoral. Certains usiniers Français vont chercher le poisson plus au sud, ils ouvrent des conserveries en Espagne et au Portugal.
  • 1902-1908 : Une nouvelle crise de la sardine plonge la Bretagne côtière dans la misère. Les mauvaises années s'enchaînent. Pendant ce temps, les concurrents espagnols et portugais font de bonnes affaires.
  • 1909 : La sardine est de retour. Les patrons tentent d'imposer de nouvelles machines, pour produire moins cher : les sertisseuses. L'emploi des ouvriers soudeurs est menacé. Les émeutes font rage en Bretagne.
  • 1914-1918 : Les années de bonnes pêches reviennent, mais on manque de tout pendant la guerre : fer-blanc, huile d'olive, charbon.
  • Années 1920 : Les bateaux de pêche commencent à être équipés de moteurs.
  • 1924-1926 : Dans le Pays bigouden, les ouvrières d'usine sont en grève pour réclamer un salaire moins misérable : elles veulent être payées 1.25 F de l'heure, comme les sardinières de Douarnenez ou de Concarneau.
  • Années 1930 : Les boîtes de sardines ne s'exportent plus : pour faire face à la crise économique, le Royaume-Uni a multiplié ses droits de douane. Le port de commerce de Loctudy est ruiné. Certains Bretons se lancent dans la pêche au thon.
  • 1945 : Les conserveries se modernisent : on mécanise la chaîne de production et on investit dans des chambres froides. À Loctudy, la conserverie LE GALL reste à l'écart de ces innovations.
  • 1955 : La pêche est en pleine révolution. Les bateaux sont plus gros et partent plus au large. Ils embarquent de la glace pour conserver le poisson. Les petites conserveries familiales commencent à fermer une à une, la conserverie LE GALL est définitivement fermée.

Évolution de la conserverie LE GALL

C'est la dernière-née des conserveries de la côte bigoudène. C'est aussi l'une des plus petites. Elle est toujours restée une usine familiale, gérée par Alexis LE GALL, son épouse Alice BOUVILLE et leurs enfants, en particulier leur fille Henriette.
Même modeste, la conserverie a joué un rôle important pour Loctudy, qui était d'abord un port de commerce. Elle a donné un emploi saisonnier à de nombreuses femmes de Loctudy et offert un débouché aux pêcheurs. L'usine a compté une cinquantaine d'ouvrières et d'ouvriers dans ses plus belles années. Elle a contribué à faire de Loctudy le port de pêche florissant des années après-guerre.

  • 1901 : Jean-Marie VALLIÈRE des FILIÈRES est négociant en pommes de terre à Pont-l'Abbé. Il construit une conserverie. Le terrain se situe près de la cale de Loctudy, à l'emplacement de son ancien entrepôt de pommes de terre.
  • 1909 : La conserverie vivote. Une grève de quelques jours éclate : les ouvrières obtiennent d'être payées à l'heure et non plus au mille de sardines. L'année suivante, l'usine Vallière manque d'être saisie.
  • 1916 : Jean-Marie VALLIÈRE des FILIÈRES décède. Sa famille met en vente la conserverie. Un acheteur se présente, c'est Alexis LE GALL : il est déjà mareyeur et conserveur à Douarnenez. Mais c'est encore la guerre et la vente est retardée.
  • 1919 : Enfin, Alexis LE GALL et sa famille peuvent reprendre la conserverie. L'enseigne est changée : voici désormais La Conserverie alimentaire Alexis LE GALL. Elle produit les mêmes marques qu'à Douarnenez, l'Hermine, Les Druides et Félix Fort. La famille LE GALL emménage dans la villa.
  • 1925 : Alexis LE GALL modernise l'usine, il construit un bâtiment, achète des entrepôts voisins. Il investit dans des moteurs et des sertisseuses. Il installe aussi l'électricité et le téléphone.
  • 1927 : La conserverie LE GALL est une affaire de famille. Madame LE GALL fait les achats, leur fille Henriette se charge maintenant de la comptabilité de la conserverie. Elle vient d'obtenir son CAP. Alexis LE GALL travaille aussi avec ses cousins mareyeurs. Il est associé avec son beau-frère Louis BOUVILLE, conserveur en région parisienne.
  • 1935 : Pour faire face aux difficultés des conserveries, les LE GALL ouvrent une poissonnerie à Quimper. Ils pensent ainsi à l'avenir de leur fils Alexis. À Loctudy, la conserverie est à l'arrêt pendant 2 ans.
  • 1939-1945 : La conserverie tourne au ralenti, avec très peu d'ouvrières. Alexis LE GALL n'investit plus.
  • 1955 : Alexis LE GALL a 75 ans. De plus, la saison de pêche est mauvaise, l'usine LE GALL n'ouvrira plus. Mais la famille continue son activité de mareyage.
  • 1961 : Alexis et Alice LE GALL arrêtent leur activité de mareyeurs.

La maison de maître

Marie-Prudence de la GRANDIÈRE fait construire la maison vers 1885, bien avant l'usine. Son père est l'amiral qui donnera son nom à la rue. Elle l'appelle "le chalet" ou "la villa". Son architecture rappelle les premières stations balnéaires de la Belle-Époque.

Quand Alexis LE GALL achète l'usine en 1919, la maison de maître est vendue dans le même lot. C'est un atout : les patrons peuvent vivre au plus près de l'usine.

Le bureau

Alexis LE GALL et sa famille vivent au plus près de l'usine. Une ancienne chambre est reconvertie en bureau. L'emplacement est bien pratique : il permet de surveiller la cours de l'usine. L'éclairage est assuré par le circuit de gaz acétylène. En 1925, l'électricité est installée mais l'ancien système est conservé.

Le bureau est longtemps resté dans son état des années 1950-1960, comme si les patrons venaient de quitter le travail… Jusqu'à la transformation de la conserverie en musée !

Alexis LE GALL et sa fille Henriette y ont chacun leur place. Machine à écrire, poêle à bois, éclairage électrique, téléphone, coffre-fort… C'est un bureau moderne.

Mais les conditions de travail sont très différentes de ce que nous connaissons. Il faut parfois la journée entière pour joindre une personne au téléphone à l'autre bout de la France : le temps que chaque opératrice fasse la liaison jusqu'au correspondant final ! Loctudy 8 : c'est le numéro de téléphone de la conserverie LE GALL.



Les soudeurs

  • Initialement, chaque usine fabrique ses propres boîtes de conserve.

Pendant l'hiver, les ouvriers soudeurs préparent la saison de pêche. Ils fabriquent les boîtes de fer-blanc vides. L'été, ils soudent le fond des boîtes au fur et à mesure du remplissage.

  • Les soudeurs sont au sommet du monde ouvrier.

Ils sont bien payés et travaillent toute l'année. Le métier de soudeur demande un apprentissage de 3 ans. Les soudeurs sont payés à la pièce. Ils payent une amende si la boîte fuit. Un bon soudeur ferme 30 à 70 boîtes à l'heure selon le format.

  • Les usines de fer-blanc fabriquent des boîtes déjà soudées à la fin du XIXe siècle.

Il ne reste plus qu'à assembler le fond. Cette innovation révolte les soudeurs, plus besoin de fabriquer les boîtes pendant l'hiver. Leur métier devient saisonnier. Comble de malchance, entre 1902 et 1908, la sardine déserte les côtes bretonnes. Certains soudeurs changent de métier.

  • En 1909, ils sont encore 1 200 ouvriers soudeurs syndiqués en sud-Finistère

Les patrons ont l'intention d'installer des sertisseuses. Ces machines à sertir fonctionnent déjà bien dans les usines de conserve de légumes. Mais la technique est différente, le couvercle et le bord de la boîte sont enroulés serrés par la machine, sans soudure. Les soudeurs répondent que les boîtes serties seront moins étanches que les boîtes soudées.

  • Les premières sertisseuses sont installées, souvent la nuit et sous-garde policière.

Les soudeurs savent que leur métier est voué à disparaitre. Ils sont fous de rage et de désespoir. Les ouvriers saccagent plusieurs usines et jettent les sertisseuses dans les ports…
Le conflit se termine. Les soudeurs et les patrons signent des contrats. Les soudeurs pourront travailler jusqu'à la fin de leur carrière et la disparition du métier.

  • À Loctudy, 4 soudeurs fermaient les boîtes.

Certaines années, il y eut jusqu'à 8 soudeurs. L'année 1906, l'un des soudeurs s'appelle Guillaume LUCAS. Il a 32 ans. Il est né à Plobannalec dans une famille de cultivateurs. Il habite rue de la Cale avec sa femme Catherine TIRILLY et ses deux filles. Le couple aura 7 enfants. Guillaume LUCAS finira sa carrière comme cantonnier. Un autre soudeur de la conserverie vit un peu plus loin dans la même rue. C'est Jean-Marie MARC, 26 ans. Il est issu d'une famille de paysans de Treffiagat. Il s'est installé dans la commune de sa femme, Marie Corentine LE LAY. Elle aussi travaille à l'usine. Ils se sont mariés l'année précédente.

Alexis LE GALL achète une première sertisseuse en 1922

Le combat des ouvriers soudeurs appartient au passé (1909). Les femmes remplacent les hommes devant les machines. Mais elles sont payées un tiers de moins que les hommes. Les cadences des sertisseuses vont de 300 à 600 boîtes à l'heure.

Moteur à vapeur & moteur électrique

  • À l'origine, la conserverie fonctionne avec un moteur à vapeur.

Son énergie est fournie par la chaudière à charbon. Il fait tourner les 2 seules machines de l'usine : la pompe à eau et le séchoir à poisson. La bouillotte de stérilisation et les bacs de friture sont chauffés au bois ou au charbon.

  • En 1925, on installe l'électricité dans l'usine
Moteur électrique




Alexis LE GALL a investi dans de nouvelles machines, comme les sertisseuses. Cela demande plus d'énergie pour les faire tourner. Il achète deux moteurs pour renforcer le système. Mais les puissances restent faibles. Le moteur électrique vient soulager le moteur à vapeur.

Le Laboratoire des sauces

C'est l'atelier secret d'Alexis LE GALL : il est seul à en avoir la clé. Le goût des conserves LE GALL repose sur des recettes jalousement gardées. Le laboratoire est avant tout une cuisine : Alexis LE GALL y découpe les légumes pour les achards, il prépare ses mélanges et assaisonne les marinades.

Les recettes d'Alexis LE GALL

Suivant les recettes, le poisson peut être enrobé d'huile ou bien de marinade. Cette préparation est cuisinée sur place dans le "laboratoire des sauces".

  • Les recettes sont le secret de fabrication de chaque conserveur.

Le goût des conserves LE GALL ne doit pas être imité. À l'époque, la liste des ingrédients n'est pas indiquée sur les boîtes : ce n'est pas obligatoire. La promesse "aux fins aromates" suffit à convaincre le consommateur. Et les contrefaçons sont très nombreuses !

  • Épices, vinaigre, citron, rondelles de légumes, vin blanc… les recettes sont infinies.

Sardines aux achards et citron, rouelles de maquereaux aux aromates, maquereaux au vin blanc et aromates, merluchons sauce marengo, maquereaux à la tomate…

  • Alexis LE GALL a hérité des recettes de son père, lui aussi conserveur.

Il invente de nouvelles marinades, incorpore de nouveaux ingrédients. Il utilise aussi des préparations comme la sauce Rhon's, acheté à un atelier de l'Oise. Est-ce la petite secrète d'Alexis LE GALL.

  • L'huile d'olive est fournie par un négociant de Nice, Paul MUSSO.

C'est l'ingrédient des préparations haut de gamme : pour les meilleures boîtes, même la friture se fait à l'huile d'olive. L'huile d'arachide est importée du Sénégal via Lorient. Elle sert à la cuisson et aux gammes les moins chères.


Le distributeur de sauces

Distributeur de sauces

Il relie le laboratoire à l'usine. Pour remplir les boîtes, les ouvrières venaient se servir en suces à ce robinet très spécial. Les marinades sont préparées dans le laboratoire, qui ne communique pas avec la conserverie. Le secret reste bien gardé !
L'usine ne travaille qu'une seule recette à la fois : tous les robinets fournissent la même marinade. Le "distributeur des sauces" vient apporter le goût spécial des conserves LE GALL. Chaque conserverie garde ses recettes et tours de main. Pourtant, les usines bigoudènes achètent toutes leurs sauces et exhausteurs de goût aux mêmes fournisseurs, dans l'Oise, en Provence et à Orléans.

Produire une boîte de conserve, mode d'emploi

L'achat du poisson.

Se mettre d'accord sur le prix avec les pêcheurs directement sur le quai. Les pêcheurs locaux fournissent la conserverie. Le maquereau est parfois acheté aux mareyeurs de la famille LE GALL au Guilvinec ou à Douarnenez. Dès le XIXe siècle, les pêcheurs rencontrent régulièrement des difficultés, la ressource en poisson n'est pas inépuisable.

L'arrivée du poisson.

Se faire livrer le poisson par charrette dans des caisses en bois.

L'étêtage.

Vider rapidement le poisson, il n'y a pas de frigo.

• Quand le poisson arrive de la cale, toutes les ouvrières sont mobilisées : il faut aller vite.

Les sardines sont versées sur les grandes tables. Les ouvrières les saupoudrent de gros sel. En l'absence de chaîne du froid, le sel retarde la dégradation du poisson. Les ouvrières trient les sardines selon leur taille, que l'on appelle le "moule".

• Les ouvrières coupent ensuite les têtes.

Une fois mises sur table, les sardines sont étêtées et déboyautées une à une à la main à l'aide d'un petit couteau spécial appelé "bec d'oiseau". Les ouvrières étêtent de 10 à 35 sardines à la minute.
Lorsqu'il y a suffisamment de sardines étêtées, elles sont déversées et bien brassées dans les bailles contenant de la saumure concentrée à 24° Baumé. En plus du salage, ce saumurage a pour effet de bien laver le poisson et de le blanchir.

• Les résidus sont appelés le "stonk".

Les ouvrières le jettent dans un baquet à leurs pieds, le "bachot". Le stonk est ensuite vendu aux pêcheurs de crevettes de Larvor comme appât. Il peut aussi servir aux paysans pour fertiliser leurs champs. Les sardines sont stockées en paniers d'osier ovales avant le saumurage, le salage.

Le nettoyage / saumurage.

Plonger les poissons dans un bain de saumure, eau très salée.
Comme toutes les industries, la conserve est grande consommatrice d'eau. 100 000 litres d'eau par jour étaient pompés dans le puits de la cave. Elle est essentielle au nettoyage et au saumurage du poisson, bien sûr, mais aussi au fonctionnement de la chaudière à vapeur. Sans eau, la chaudière peut exploser.

• Le poisson est lavé dans un bain très salé : la saumure.

Les sardines sont "déversées dans les bailles". Il faut les nettoyer de tous les résidus. Le passage dans la saumure a aussi pour but de raffermir les chairs et saler le poisson. En l'absence de chambre froide, on mise sur les vertus antiseptiques du sel.

• La sardine est plus ou moins grasse en fonction des saisons.

Le sel ne se dissout pas dans le gras. La belle sardine dodue du printemps doit donc rester plus longtemps dans la saumure que la jeune sardine de l'été qui est plus maigre. La durée de trempage peut atteindre de 20 minutes à 1h15 environ.

• Lorsque l'eau est toute rouge, il est temps de vider la baille.

Le stock de sel, la "salorge", est à, portée de main pour réaliser une nouvelle saumure concentrée. La sardine est récupérée en panier ovale en osier et apportée sur la table d'engrillage. Les sardines sont placées verticalement dans les grils pour le séchage puis la cuisson. Les ouvrières engrillent de 20 à 70 sardines à la minute.

La mise en grils

Aligner les poissons sur des grils.

Le séchage

Laisser les grils au soleil ou les faire sécher dans le séchoir mécanique.

• Le séchage est essentiel.

Les chairs du poisson doivent perdre un maximum d'eau. Il en va de la qualité de la conserve, car l'eau dégorgera à l'intérieur de la boîte durant la stérilisation ! Au contact de l'huile frémissante, l'eau peut provoquer une explosion, elle se transforme très vite en vapeur et projette violemment l'huile de friture.

• Le séchage a aussi une autre fonction : il blanchit et raffermit la chair du poisson.

Les ouvrières récupèrent les sardines dans le bain de saumure grâce à des paniers d'osier. Elles passent les paniers sous l'eau douce pour arrêter le salage. Chaque sardine est ensuite déposée tête en bas sur le gril. Par beau temps, les grils de poissons sont posés sur des civières dans la cour de l'usine. La durée de séchage dépend du soleil et du vent. S'il se met à pleuvoir; il faut vite rentrer les civières à l'intérieur. Et c'est alors un sacré fouillis dans l'usine.

• Les jours de pluie, les ouvrières utilisent le séchoir mécanique.

Pour accélérer les temps de séchage, Alexis LE GALL investit dans un tunnel de séchage au début des années 1920. On peut y placer des chariots entiers aux étagères pleines de grils à poissons. Le ventilateur souffle sur un radiateur qui chauffe l'air à 45 degrés. Suivant la taille du poisson, l'opération prend entre une à 2 heures.

• Toute l'organisation du travail tourne autour du séchage du poisson.

Il n'y a pas de chaîne du froid. L'urgence est de traiter et cuire le poisson. L'emboîtage, lui, peut attendre le lendemain. S'il n'y a plus de place pour sécher, l'usine n'achète plus de poisson. Le drapeau est hissé au mât de l'usine pour informer les bateaux. Les pêcheurs ne perdent pas de temps d'accostage. Ils continuent leur route vers d'autres conserveries.

La cuisson

Frire le poisson à l'huile d'arachide ou olive. Les sardines sont en grils.

• Une ouvrière plonge le gril de poisson dans l'huile d'arachide frémissante.

Suivant la taille des sardines, les temps de cuisson varient de 3 à 6 minutes. Rarement, pour les meilleures boîtes, la friture est faite à l'huile d'olive. Deux ouvrières sont postées devant les bassines, une troisième s'occupe à les approvisionner en sardines et de faire égoutter les grils déjà cuits. Les résidus qui flottent à la surface sont récupérés avec une écumoire.

• La friture diminue encore la quantité d'eau et caramélise les protéines de la sardine.

La réaction de "Maillard" est le même procédé qui dore le rôti, rend les pommes de terre "Kreienn" et les crêpes "Kraz". La friture donne au poisson un goût incomparable. Une tartine beurrée, des sardines tout juste sorties de la friture et c'est le paradis.

• Du charbon à la vapeur.

Au départ, les bassines sont chauffées par un foyer à bois à chaque extrémité. La fumée chauffe l'huile en passant dans un circuit immergé. Pour sécuriser le travail, des serpentins de cuivre sont installés vers 1921. Les tubes de cuivre sont chauffés directement par la vapeur de la chaudière.

La mise en boîtes.

Après refroidissement et égouttage, mettre les poissons en boîtes avec leurs aromates.

• La maison Carnaud fournit les boîtes vides.

C'est une société implantée à Basse-Indre près de Nantes. Elle a une usine à Douarnenez. Les tôles viennent des Forges d'Hennebont, qui fournit toute la Bretagne en fer-blanc.

• Dès lors qu'il est cuit, le poisson doit attendre une nuit pour égoutter. Il peut être mis en boîte le lendemain.

Chaque ouvrière a devant elle un gril de sardines et des piles de boîtes vides. Les apprenties les apportent au fur et à mesure.

• La boîte vide a déjà son couvercle, c'est le fond de la boîte qui est assemblé pour la fermer.

L'emboîteuse remplit les boîtes "à l'envers". Rondelles de carotte, tomates, poivre, clous de girofle, tranches de citron… L'ouvrière commence par disposer les achards et les épices. Sur certaines boîtes haut de gamme, la présentation doit respecter le dessin prévu.

• L'ouvrière raccourcit la queue du poisson d'un coup de ciseau.

Elle rafraîchit le collet de la sardine pour qu'il soit bien net. En breton, cette partie est appelée les "Krennou". Juste après la Seconde Guerre Mondiale, quelques conserveries ont emboîté et vendu des 'Krennou" à l'huile d'arachide à très bas prix.

• Les poissons sont ensuite rangés têtebêche dans les boîtes, par 4 ou 5.

La présentation est plus esthétique, mais surtout moins gourmande en huile. Suivant sa qualité, la sardine est présentée sur le ventre, "au blanc" ou bien sur le dos, "au bleu".

Le huilage.

Remplir les boîtes d'huile ou de sauce. Les boîtes sont remplies d'huile d'olive ou d'arachide. Ces deux huiles supportent bien la chaleur de l'autoclave. L'arachide n'est utilisée que pour remplir les boîtes bon marché.
L'huilage est une opération délicate, car l'huile est chère. Tout est fait pour ne pas la gaspiller. Dans la boîte, les quelques centilitres d'huile de remplissage coûtent aussi cher que toutes les sardines. On pose les poissons tête-bêche pour laisser moins d'espaces vides. Les trop-pleins renversés sur la table de zinc sont récupérés dans un broc.
Les fûts sont stockés dans un entrepôt de la rue de La Grandière. Pour la production de la journée, on remplit les grands bacs de bois recouverts de métal. L'ouvrière vient remplir son broc. Elle verse l'huile dans chaque boîte. Une autre technique consiste à empiler les boîtes dans un panier métallique. L'ouvrière plonge le panier dans l'huile. Le panier égoutte ensuite sur une table couverte de zinc pour récupérer l'huile perdue.
Plus tard, dans les conserveries plus modernes, cette opération est mécanisée et intégrée directement avant la sertisseuse.

Le sertissage.

Sertir les boîtes une à une pour les fermer hermétiquement.

La stérilisation

Stériliser les boîtes à l'autoclave pendant un certain temps à une température supérieure à 100°C

Le nettoyage / contrôle qualité et l'emballage

Frotter les boîtes dans la sciure pour débarrasser les résidus d'huile. Les tapoter pour vérifier qu'elles sont étanches. Les bonnes boîtes seront empilées dans les caisses de bois marquées du nom de la conserverie.
L'usine fait une grande consommation de caisses d'emballage en bois. Elles sont fabriquées chez Louis le TALLEC, dans le Morbihan

L'expédition.

Expédier les caisses par camionnette jusqu'à la gare de Pont-l'Abbé.

La fermeture des boîtes : le sertissage

Un serti est l'assemblage par agrafage d'un fond sur un corps de boîte. L'agrafage est obtenu par roulage du bord d'un fond avec celui d'un corps. Cette opération de roulage est effectuée par un jeu de molettes de première passe et de deuxième passe agissant sur les deux éléments corps et fond maintenus en bonne position entre le mandrin de sertissage et un dispositif de compression.
  • La molette de première passe forme d'abord un roulé qui agrafe le bord du fond sur celui du corps.
  • La molette de deuxième passe serre fortement les deux éléments ainsi agrafés pour obtenir la forme définitive du serti et assurer son étanchéité.
  • Le joint préalablement appliqué sur le fond se trouve comprimé entre les éléments du serti et contribue à lui donner l'étanchéité recherchée.
Le sertissage
  • Pour bien conserver, il faut impérativement que la boîte soit étanche.

C'est fondamental ! Les femmes qui sertissent les boîtes sont au sommet de la hiérarchie ouvrière. Les ouvrières appellent régulièrement le mécanicien sertisseur pour améliorer le réglage des machines. En cas de mauvais réglage, toute la série de boîtes n'est plus étanche : un vrai gâchis.

  • Le travail est encore très manuel.

On pose les boîtes pleines sur une table couverte de zinc, près de la sertisseuse. Un fond est posé sur chaque boîte. L'ouvrière sertisseuse pince une boîte entre son pouce et son majeur. Son index garde en place le fond à sertir. Elle dépose la boîte sur le plateau de la sertisseuse.

  • Il ne faut jamais relâcher son attention !

Les molettes tournent en continu autour de la boîte et pourraient vite couper un doigt. Les ouvrières travaillent sans protection : le temps des carters de sécurité n'est pas arrivé. L'ouvrière actionne énergiquement la lourde pédale. La molette de première passe enroule le métal du fond et de la boîte. La molette de deuxième passe tourne autour de la boîte en resserrant les deux pièces sur elles-mêmes et assure l'étanchéité.

  • La date de fabrication est embossée manuellement dans le métal par des poinçons frappés sur le fonds.

Les boîtes vides arrivent avec leur couvercle à décollage. Elles sont remplies à l'envers. C'est bien le fond de boîte qui est serti par la machine.

Autoclaves

Autoclave
Descriptif de l'autoclave de l'usine LE GALL

Pour stériliser ses boîtes la conserverie LE GALL utilise un autoclave statique vertical. Les boîtes sont stockées dans un panier qui est introduit par le haut de l'autoclave à l'aide d'un palan.

L'autoclave est une grosse cocotte-minute.

Il est inventé en 1852. Il stérilise les conserves plus vite que la bouillotte.
La vapeur d'eau est mise sous pression à environ 2 bars. On la contrôle grâce au thermomanomètre. Les boîtes doivent être parfaitement étanches. L'autoclave atteint des températures de 115°-120°C

Alexis LE GALL investit dans un autoclave en 1925.

Il a une cuve en acier de haute résistance et un panier métallique pour les boîtes. Le couvercle à vis à manette assure l'étanchéité, pour maintenir la pression.

Les ouvrières posent les boîtes dans des paniers métalliques.

Les boîtes passent environ 1h15 dans l'autoclave. Les paniers, très lourds, sont déplacés grâce à une petite grue : un palan.

L'autoclave demande de la précision.

Il faut respecter le temps et la température pour ne pas trop cuire le poisson. Mais il faut aussi éliminer tous les germes, sinon la conserve… ne se conservera pas.

Une organisation stricte

Alexis LE GALL et son épouse suivent les conseils de leur famille. Ils embauchent en priorité des ouvrières de Loctudy.

  • Les ouvrières habitent les rues voisines de l'usine.

Rue Jeanne d'Arc, rue de la Cale, rue de la Palue… Elles viennent du bourg de Loctudy. 40 saisonnières travaillent à l'heure. La cloche les avertit que le poisson est arrivé. Les femmes du petit port excentré de Larvor doivent trouver du travail ailleurs, à l'Ile Tudy ou à Lesconil. Elles y restent parfois à la semaine.

  • Le travail est strictement organisé.

Il y a d'abord les patrons et la contremaîtresse qui surveille le travail. La contremaîtresse contrôle en permanence les ouvrières : horaires, qualité du travail, rendement... Elle rend des comptes aux patrons, la contremaîtresse est l'intermédiaire entre les ouvrières et les patrons. Depuis son logement dans la maison de l'usine, une petite fenêtre lui permet à tout moment de garder l'usine à l'œil.
Les ouvrières se répartissent selon trois catégories :

• Les postées : pour le salage, la cuisson et le sertissage;
• Les ouvrières ordinaires : pour l'étêtage, l'emboîtage, l'encaissage, le frottage et le nettoyage;
• Les jeunes 13/16 ans : occupées aux services des tables et des femmes postées.

Le travail commence vers 8h et se termine à 19h. Les ouvrières avaient une coupure d'une heure et demie pour la pause déjeuner. Dans le cas contraire, une cloche appelle le personnel 15 minutes avant le commencement du travail. En cas de gros arrivage, le travail se poursuit avec des heures supplémentaires et un café servi par Madame LE GALL.

  • En bas de l'échelle, ce sont les apprenties.

Elles ont entre 13 et 16 ans. Les apprenties sont appelées les "petites filles". Leur salaire est bas pour un travail très difficile, mais certaines feront toute leur carrière à l'usine. Beaucoup ne tiennent que quelques jours.

  • Les hommes sont à part.

Ils ne figurent pas au même registre que les femmes. L'un est mécanicien sertisseur, l'autre manœuvre. Un troisième s'occupe de la chaudière, un autre des expéditions.

  • Le salaire.

En 1932, le taux horaire s'échelonne entre 1,25 franc pour les apprenties, et 1,75 franc pour les postées.
En 1948, selon la hiérarchie, le taux horaire atteint 48,80 francs et 54 francs de l'heure.

En photos

Cartes postales anciennes

Bibliographie

Voir aussi (sur Geneawiki)

Châlons-en-Champagne ville de naissance de Nicolas Appert.

Liens utiles (externes)

Sources


Notes et références

Cet article a été mis en avant pour sa qualité dans la rubrique "Article de la semaine" sur l’encyclopédie Geneawiki.