88123 - Damblain - Cahier de doléances

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DAMBLAIN - 88123 Cahier de doléances d'un village lorrain rattaché à la France depuis peu.

Cahier des doléances, plaintes à la présentation et remontrances que font très humblement au Roy, notre Sire, selon le bon vouloir, la bienfaisance et les ordres de Sa Majesté pour être portés aux états généraux du Royaume dont la tenue est annoncée, devoir se faire à Versailles le 27 avril de la présente année 1789, les habitants et communautés du Bourg de Damblain, Bailliage de Bourmont.

Article 1er : Le bonheur des peuples consistant principalement dans la conservation des droits, privilèges et constitution de leur province, lesdits habitants supplient très humblement Sa Majesté de conserver et maintenir son Duché de Bar dans son intégrité primitive, sans mélange ni confusion avec aucune autre province, sans cesser d’être toujours du parlement de Nancy, la dicte communauté étant du Barrois non mouvant.

Art. 2e : Supplient de même très humblement sa Majesté les dits habitants, de conserver à ce Duché, ou rétablir ses anciens Etats particuliers, pour par les députés de toutes les paroisses, corps de communauté des habitants qui y seront envoyés dans les temps qui seront précisés, traiter et aviser, à toutes les affaires, soit générales de la province, soit de celles de leur bailliage, arrondissement ou canton, soit à celles particulières des dictes paroisses et communautés, tant pour concessions des subsides, impositions et charges publiques et communales, leur répartition et régalement, et aux moyens d’y subvenir, les payer et acquitter, dans les formes les plus simples, étant trop vexés par les contraintes que le receveur particulier leur envoye journellement.

Art. 3e : de rétablir le Duché de Bar dans toutes ses parties et dépendances, et tous ses établissements civils et religieux, dans l’état au moins où ils étaient lors du traité de Vienne de 1735, de la cession de 1736, ou au moins tel qu’il était, à l’époque du premier juin 1751, époque la plus désastreuse pour cette province par la multitude de juridictions bailliagères qui y ont été érigées, d’où les frais ont été immenses, et les sujets éloignés de leurs juges naturels et locaux.

Art. 4e : d’abolir les droits de traites, de passages, jurées foraines et gabelles, comme un droit désastreux, et qui ruine l’agriculture, le commerce et l’industrie ; en tout cas de les réduire à leur ancien régime, en sommes et taux, selon les anciens concordats, transactions, capitulations, édits, ordonnances et déclarations, attendu qu’ils ont été rendus arbitraires par les menées, manœuvres, crédits et autorités des traitants, qui ont, par ces moyens, rendus les peuples esclaves et tributaires, par le nombre excessif des employés qui bordent les provinces de Champagne, Bourgogne et Comté, dont la dicte communauté est frontière, dont elle demande le reculement des barrières pour la conservation de son finage.

Art. 5e : de rétablir l’ancienne liberté de commerce et de circulation dans toutes les parties du Duché de Bar, même par un partage de territoire sur d’autres provinces, pour toute la durée de production du cru et commerce, avec les simples précautions et formalités déterminées par les concordats, traités, lois et ordonnances de ce Duché, et dans ce dernier cas d’imposer les peines les plus rigoureuses contre ceux qui y contreviendront, soit par création d’un droit plus fort, soit par tout retard ou empêchements.

Art. 6e : de réduire à une mode légitime et un taux fixe, les droits de formules que les traitants ont rendus arbitraires, par des explications forcées, par des jeux de mots et autres moyens frivoles, ce qui réduit la simplicité et la bonne foy des traités, concordats et conventions, où les parties ne peuvent s’engager dans la crainte d’être punie arbitrairement par les gens de la ferme ; et spécialement pour les droits de sceau des contrats qui n’ont jamais été que cinq gros barrois, pour toutes sortes de contrat ; particulièrement dans cette province du Bassigny, ou sur l’assimilation des droits de sceau qui se perçoivent dans le Duché de Lorraine ; ceux du Barrois ont été portés à un droit et un taux excessif et ruineux, et toujours arbitraire entre les mains des gens de la ferme qui prétendent étendre ce droit sur chaque mot, chaque terme, et chaque convention d’un contractant.

Art. 7e : de supprimer les droits de marque des fers et de marque des cuirs, qui ayant été l’occasion d’une augmentation subite et démesurée dans les matières premières, ont contribué à la ruine des cultivateurs réduits à l’impuissance de se procurer les instruments et harnais nécessaires à l’agriculture, et même des souliers dont ils ont besoin pour soutenir les travaux fatigants et excessifs de leur état.

Art. 8e : de détruire et d’abolir le droit de riflerie, droit dégoûtant et qui ne peut salir les droits sacrés et respectables du domaine du Roy, et qui dans son exécution est non seulement ruineux pour les habitants de la campagne ; mais encore les expose à la peste et à la contagion de leurs bestiaux, en les obligeant de tenir, souvent pendant plusieurs jours des animaux morts dans leur écurie. L’excoriation étant d’ailleurs une fonction vile et abjecte, sur laquelle les traitants n’auraient jamais jeté les yeux et songer à en tirer profit, si on les eut obligés d’en faire la fonction eux-mêmes.

Art. 9e : de réduire et restreindre du tout au tout les usines à feu, attendu qu’elles dévorent tous les bois, font augmenter les prix de tous les ouvrages en bois et réduisent les peuples à l’impuissance de s’en procurer pour leur chauffage, et restreindre les maîtres d’usine, aux bois destinés à ces mêmes usines, sans pouvoir en acheter des communautés.

Art. 10e : d’éteindre et abolir le droit de châtrerie par rapport aux torts immenses qui en résultent, pour tous les propriétaires de bestiaux ; en tout cas d’obliger les châtreurs de résider dans chaque endroit, pour y exercer jour par jour et de moment à autres, leur fonction, quand il en est besoin..

Art. 11e : de détruire et abolir dans cette province les lois concernant les clôtures, et défrichements, parce qu’elles ont détruit toutes les communes, et qu’il en résulte que toutes les prairies, les campagnes emplantées de grains et les forêts ont été presque généralement abrouties , par l’impuissance où sont les propriétaires de bestiaux de leur procurer les pâturages qu’ils trouvaient avant l’établissement de ces lois.

Art. 12e : de faire détruire les colombiers de ceux qui n’en ont ni titres ni droits, et ceux-ci de tenir leurs pigeons enfermés et de les nourrir tout le temps des semailles et des récoltes dans leur colombier, étant des fléaux publics aussi nuisibles qu’une armée ennemie qui ravagerait les campagnes au préjudice du cultivateur.

Art. 13e : de détruire et abolir partout les droits de péage, passage et pontonage et autres de cette nature ; de toutes espèces de servitudes et autres prestations corporelles, qui sont l’effet et la suite de la barbarie féodale, qui, du royaume de France, avait fait un empire d’esclavage et de servitude.

Art. 14e : de détruire et abolir la prohibition inhumaine pour les habitants de la campagne, de tenir des chèvres, seule ressource des pauvres mères de famille, surtout à celles dont le lait manque, de nourrir les jeunes et tendres enfants, exposés à périr de faim et de misère. Le prétexte des lois prohibitives à cet égard, ne devant pas être mis en compensation avec les torts qui en peuvent résulter.

Art. 15e : de supprimer les quatre deniers pour livre dont jouissent les jurés priseurs pour la vente des meubles qu’ils font, ce droit étant très ruineux pour le peuple.

Art. 16e : de rétablir les magasins et greniers d’abondance qui avaient été établis dans cette province ; et auxquels il a été substitué des établissements ruineux pour le peuple et qui favorisent ouvertement la dissolution et le libertinage.

Art. 17e : de remettre le sel et le tabac où ils étaient cy devant, en cette province, le sel étant d’une ressource précieuse pour l’agriculture ; et la plantation de tabac d’autant plus précieuse, qu’indépendamment de sa qualité, on emploie quantité de gens, actuellement désœuvrés.

Art. 18e : de réprimer le luxe qui commence à corrompre les campagnes et où il a détruit les bonnes mœurs et presque la religion.

Art. 19e : que le Seigneur soit tenu de contribuer aux frais que la communauté est obligée de faire pour les usines communes, ainsi que de payer sa part du vingtième que la communauté paye pour les bois et pâquis, dont le seigneur jouit d’un tiers de part son droit de troupeau à part, attendu aussi qu’il touche un tiers du prix de la vente de bois.

Art. 20e : qu’il soit défendu au berger de mener les moutons et porcs en aucun temps dans les prés.

Art. 21e : que les ports d’armes soient permis à chaque habitant pour leur défense, et dedans leur maison seulement.

Art. 22e : que le Clergé, la Noblesse et autres privilégiés soient tenus de payer les impositions selon leur force et facultés, pour subvenir au besoin de l’Etat, sans aucune exemption ni franchises, même dans l’ordre du tiers état.

Art. 23e : qu’il soit permis aux habitants de mener vaine pâture leurs bestiaux en troupeau à part, jusqu’après la récolte des bleds. L’abbaye de Morimond ayant enfermé les pâquis et les prés dont elle jouit et sur lesquels la communauté avait le droit de vaine pâture ; cette dernière se trouve sans ressource et réclame le droit qu’elle avait avant l’édit de clôture.

Art. 24e : que les deux tiers de dommages intérêts des amendes prononcées contre les particuliers délinquants au profit de la communauté, soient remises entre les mains de leur syndic, sans passer par les mains des receveurs généraux ; à charge néanmoins pour le syndic de rendre compte, ainsi que les deux tiers des deniers de la vente des bois de toutes espèces.

Art. 25e : enfin de réduire et modérer à un taux juste et naturel toutes les impositions jetées sur le tiers état, et surtout celle des ponts et chaussées, qui, dans cette province, ne devait jamais excéder le sixième de la taille ou subvention, et au moyen de quoi les peuples doivent être déchargés de la corvée personnelle, et de toutes impositions pécuniaires pour les travaux et confections de routes et chaussées et de tous les ponts à construire dans la province.

Art. 26e : demandent encore la suppression des maîtrises des deux experts d’héraut, en outre les dits habitants et communauté aux plaintes, doléances, représentations et remontrances de tous les autres habitants de leur bailliage et du duché de Bar ; et c’est le redressement de tous ces objets qu’ils espèrent obtenir des bienfaits du plus juste et du meilleur des rois.

Délibéré à Damblain en onzième mars mil sept cent quatre vingt neuf.

Suivent quatre-vingt signatures, puis Le présent cahier contenant huit pages de noms, cahiers et paraphes ne varietur. Signé Laherard.

Nous avons ces noms et signatures


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