Croix, Croy et Croix-lès-Matigny, pour le distinguer de Croix près Saint-Quentin, en latin Cruces , est un village d'origine française, situé à 9 kilomètres de Ham, sur une colline couverte autrefois de vignes et environnée de bois. Le mot cruces, il est vrai, pourrait s'entendre des fourches patibulaires , élevées dans cet endroit, pour l'exécution des sentences du haut justicier d'une seigneurie voisine; n1ais d'après la disposition topographique de ce pays, on serait plus fondé à en rechercher l'étymologie dans la piété des premiers habitants, qui en tracèrent les rues en forme de Croix: au centre de cette croix s'élevait encore, vers 1840, un marronnier séculaire qui disparut, lors de l'établissement de la route royale de Ham à Péronne.
Croix existait avec le titre de paroisse dès le 10 éme siècle. En 1015, Hardouin de Croy, évêque de Noyon, et sa sœur Odila , employèrent en bonnes œuvres les biens considérables que leur père Robert de Croy et leur mère Avide possédaient en Vermandois. C'est ainsi que l'évêque Hardouin accorda aux chanoines de Noyon les autels de Croix, Omiecourt et Matigny ect dont les églises déjà leurs appartenaient.
En parlant de l'introduction des vignes dans les Gaules, sous l'empereur Probus, Colliette avance que le chapitre de S.'-Quentin avait des vignobles importans à Croix, près Matigny, et à Béthencourt: qu'Ansèle d'Offemout, ayant voulu les donner aux religieux d'Ours-Camp, il se les fit rendre en 1288.
Vers 1844 l'église de Croix, dédiée à Saint Médard, est l'un des monuments religieux les plus distingués et les mieux conservés de nos pays. La nef surtout, avec sa voûte hardie et élevée, ne le cède point en richesse architecturale à beaucoup d'églises de ville. Plusieurs des hauts piliers de l'intérieur sont ornés de chapiteaux remarquables; et l'on reconnaît dans l'ensemble de cette nef les caractères du style roman confondu avec celui de transition. Ce mélange d'architecture suppose d'anciens désastres éprouvés par les constructions primitives, et explique le peu de solidité de cette belle voûte dont la chute serait irréparable pour ce pays. Le portail est un plein cintre d'une grande simplicité; mais la porte latérale vers le midi est précédée d'un porche vaste et imposant, d'époque gothique.
Le chœur, plus bas que la nef selon l'usage des églises romanes, est écrasé par la tour quadrangulaire du clocher qui en restreint les dimensions d'une manière disgracieuse. Cette tour avait autrefois beaucoup plus d'élévation, et se terminait par une plate-forme bordée d'une balustrade à jour; mais le chapitre de Noyon ayant négligé d'y faire les restaurations convenables, elle s'écroula le 20 novembre 1663, entre dix et onze heures du matin. Les habitants furent obligés de recourir à de longues procédures pour contraindre ce chapitre à une reconstruction, dont il était chargé comme gros décimateur: il le fit enfin, mais avec moins d'élégance et plus de solidité.
La décoration intérieure répondait à la beauté de l'édifice; car la fabrique jouissait autrefois de revenus considérables. On y voit encore aujourd'hui (1844), dans un état parfait de conservation, de riches grilles en fer, des tableaux assez distingués, des boiseries élégantes dans toute l'étendue de l'église : celles du sanctuaire ont été surchargées de peintures, selon l'usage trop ordinaire de nos campagnes.
On y remarque aussi des reliquaires analogues à ceux que l'on voit sur les autels de Pargny et de Morchain : ils sont formés de statues en bois doré qui portent dans leurs mains, ou renferment dans leur sein, les reliques des pontifes ou des martyrs qu'elles représentent. Les reliquaires de Croix contiennent celles de Saint Sulpice et de Saint Dominant. Mais l'objet sur lequel l'œil se porte avec le plus d'avidité et d'intérêt, c'est un magnifique relief en bois, placé au-dessus de l'archivolte du chœur et représentant les diverses scènes de la passion de Jésus-Christ. Les formes légères et gracieuses des figures, l'élégance et la délicatesse des détails, le rendent digne de trouver place parmi les belles sculptures de l'époque gothique.
Dès 1670, la confrérie du saint Rosaire avait été fondée dans l'église de Croix par Jacques Flament, ancien marguillier, et Marie Sambot, sa femme: les biens qu'ils avaient affectés à cette institution ont été perdus dans la révolution de 93. La confrérie de Saint Claude y est aussi en vigueur depuis plusieurs siècles, on y observe encore aujourd'hui tout le cérémonial prescrit, dans les anciens statuts, pour la célébration de la fête du saint, pour les rapports entre les confrères, et enfin pour le départ et le retour des pèlerins.
L'église a été dépouillée de ses riches revenus; mais les biens des pauvres furent conservés : ils sont assez considérables et offrent des ressources avantageuses à la classe indigente de Croix. Vers 1836, M. Grain, originaire de ce village et ancien curé de Matigny, a légué 12 journaux de terre à l'église et aux pauvres de son pays natal, où il mourut.
La dime appartenait, pour différentes portions, à l'abbaye de Saint-Thierry, près Reims, et au chapitre de la cathédrale de Noyon , qui nommait aussi à la cure, dont le revenu pouvait s'élever à plus de 3000 livres.; car on lui attribue l'ancienne propriété de 100 journaux de terres.
En 1842, lors de la construction de la nouvelle route de Péronne à Ham, qui traverse le village de Croix, on y mit à jour, près de l'enceinte du cimetière, une ouverture de quatre mètres de profondeur, qui servait d'entrée à des souterrains ou cryptes, d'une vaste étendue. Ils sont percés dans le stuc avec beaucoup de régularité, et renferment quatorze chambres différentes, distribuées dans l'étendue d'un long corridor dont un puits forme le centre : la voûte supérieure de ce puits est la seule qui soit faite en maçonnerie.
Dans une maison du village, vers le hameau de Y, se trouve encore l'entrée d'un autre souterrain du même genre; mais il ne contient que douze chambres : la plus ancienne inscription qu'on y ait remarquée est de 1462. Cependant plusieurs de ces anciennes cryptes ou wardes, si communes dans nos pays, pourraient dater de l'époque des invasions normandes : toutefois elles servaient de refuge aux habitants, lors des invasions bourguignonnes et espagnoles, non moins désastreuses que celles des barbares du nord.
En effet, à gauche du porche latéral de l'église de Croix, entre les contreforts du pignon, on lit l'inscription suivante gravée sur la pierre: « Le 22 juillet 1636, quinze maisons ont été brûlées dans ce village par les Espagnols. » C'était le même détachement ennemi, commandé par Jean de Wert, qui échoua devant Péronne et Cléry, et vint ravager les villages de Brie et de S.'-Christ.
La seigneurie de Croix appartenait au chapitre de la cathédrale de Noyon et au marquis de Nesle, coseigneurs. Ce domaine relevait encore pour différentes parties : du chapitre de Saint- Fursi de Péronne, de la seigneurie d'Ennemain que possédaient les chanoines de Reims, du chapitre de Saint- Quentin, de la seigneurie de Villecourt, Béthencourt et Falvy appartenant à M. de Saint-Simon, et enfin des seigneuries et mairies de Moligneaux et Y.
Dans le procès-verbal de la coutume de Péronne en 1567, le village dont il est ici question est cité sous ce titre : Croy et Mesnil Saint-Quentin; Moligneaux n'est point mentionné, et Y s'y trouvé placé sous la dépendance de la paroisse de Matigny. A l'article de Quivières, il sera parlé de Mesnil-Saint-Quentin , ancien village ruiné. Vers le lieu, dit Wallengron, se trouvaient deux chemins étroits appelés : l'un la voie â brigands, et l'autre , la voie d lièvres.
MOL1GNEAUX et Molineau, hameau actuel de la dépendance de Croix , doit être un pays fort moderne; puisqu'il n'en est fait aucune mention dans la coutume de Péronne en 1567 : il se sera formé des débris de Mesnil-Saint-Quentin. Alors aussi se constitua le domaine de Moligneaux avec sa maison seigneuriale vers Athies: ou la nomma le château de Montaubent, nom du premier seigneur du lieu. Paraissent en effet dans les anciens titres: MM. De Montaubent et de Mont-Breuil, seigneurs de la terre et de la mairie de Moligneaux. En 1755 ce titre est donné au sieur Claude Tupigny, greffier en chef du bailliage de la ville de Ham.1
Héraldique
De gueules à la croix cramponnée vers dextre d'argent.
Avec son chevet du XIIe siècle - Porche du XVIe siècle. Partiellement reconstruite en 1925 dans le respect de son architecture primitive (Romane - Transition). Porche Sud classé. Le mobilier de l'édifice, en partie inscrit, est d'un grand intérêt : maître-autel, boiseries, vitraux...
Abbé de la Paroisse Sainte Radegonde
Ordonné prêtre en 1972. 1972: Vicaire à Estrées-Deniécourt. 1983: Vicaire à Villers-Bocage. 1993: En disponibilité. 1998: Curé de Athies. 2012: Prêtre modérateur du Secteur Apostolique de la Haute-Somme. 2014: Curé de Ham et responsable du Secteur Apostolique de Haute-Somme. 2019: Prêtre auxiliaire du secteur Amienois Ouest et Aumônier diocésain du M.R.J.C. Né en 1944 à Équennes-Éramecourt (Somme)