Le territoire est déjà l'objet d'une présence humaine au néolithique, comme le prouvent des traces d'occupation au Bronze final et des traces d'habitat au Hallstatt ancien. Ces présences sont peut-être liées au site rubané et à la nécropole rubanée d'Ensisheim, puisqu'elles sont localisées tout autour comme le montre une carte du secteur[1].
Au XIIe siècle, une église romane est édifiée. En 1250, est cité un château au lieu-dit « Kastelgraben »[2], au nord-ouest du village actuel, château vraisemblablement entouré de fossés comme l'atteste la physionomie actuelle du lieu. Ce château appartenait aux nobles de Réguisheim, famille qui s'est divisée en trois rameaux, le premier mentionné en 1236 et 1239, représenté par le « chevalier Siegfried, membre du Conseil urbain en 1265-1266 »[3]. Des nobles de « Bollwiller »[4] étaient également présents dans la cité.
Entre 1340 et 1347, des épidémies ravagent la région, notamment la peste noire. Cette funeste maladie « raye de la carte Sermensheim »[5], village existant depuis le IXe siècle, entre Munchhouse et Réguisheim, et où vivaient différents nobles dont on trouve des traces dans les archives. L'histoire locale prétend que seules deux ou trois personnes seraient restées en vie, auraient demandé la protection de Munchhouse, malheureusement refusée, mais auraient été généreusement accueilles par Réguisheim. Depuis, l'ancien ban communal de Sermensheim a été intégré à celui de Réguisheim, et une chapelle a été érigée en souvenir. De cette histoire découle aussi la symbolique du blason réguisheimois.
À partir de 1540, une communauté juive s'installe dans le village, d'autant plus importante que celle d'Ensisheim a été dissoute. « Dès 1693 »[6], une synagogue est mentionnée. Mais la communauté n'est pas très bien acceptée par les habitants de Réguisheim ; si bien qu'en février 1840 ont lieu des exactions, essentiellement sous la forme de dégâts matériels. En 1890, cette communauté est encore présente dans le village, puisque les statistiques nous donnent les chiffres suivants : 1505 habitants, dont 1395 catholiques, 7 luthériens, 103 israélites[7]. L'ossature de la synagogue existe toujours mais abrite désormais une grange ; il subsiste des vestiges d'un bain rituel.
En avril 1815, un détachement de trois régiments d'infanterie, s'arrête « pour la nuit »[8] dans le village, avant de rejoindre Mulhouse.
« En 1881 »[9], une filature de coton s'implante au bord du canal Vauban, créée par le manufacturier Jean Henry FREY (1813-1884), déjà directeur des établissements Frey & Witz à Guebwiller. Sont également construits dans le village des abattoirs et « plusieurs forges artisanales »[10].
En 1921, la commune se voit attribuer la Croix de guerre 1914-1918 « (J.O. du 6 novembre 1921) »[11]. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Réguisheim est libérée le 5 février par la 5e compagnie du 2/21e Régiment d'Infanterie Coloniale.
Héraldique
Gravé sur une ancienne borne
En décoration à l'entrée du village
D'argent à trois cœurs de gueules aboutés en pal, de tailles croissantes vers la pointe, chacun empiétant sur celui du dessous. [12]
Ou aussi : D'argent aux trois cœurs de gueules, rangés en pal, de taille décroissante du chef vers la pointe, celui du dessus empiétant sur celui du dessous.
À l'origine, ce sont les armoiries « d'argent à un léopard rampant de sable »[13] qui avaient été attribuées arbitrairement par l'armorial.
Mais la commune a choisi d'adopter pour son blason, en 1978, un emblème qui existait depuis longtemps en rapport avec les armoiries des Bollwiller (d'azur au pal d'argent chargé de trois chevrons renversés de gueules). Pour Réguishiem, ce sera non pas des chevrons, mais des cœurs, symbolisant son hospitalité envers les trois survivants du village de Sermensheim, ravagé par la peste puis disparu.
Toponymie
Quand le village de Réguisheim est mentionné au XIIe siècle, c'est sous la forme Regenesheim.
La tour est élevée à la fin du XIe siècle et au début du XIIe pour servir de clocher. Dans la mouvance ottonienne du premier art roman, elle est bâtie en grès des Vosges sur la base d'une section carrée. Avec ses quatre niveaux, dont le dernier ouvert de fenêtres géminées à colonnettes, elle s'élève à 50 mètres. Un escalier « dans l'épaisseur des murs »[14] permet d'accéder aux différents niveaux
Suite à un incendie en 1300, la façade occidentale est remaniée en briques en 1313, ainsi que son porche d'accès à la salle basse qui deviendra plus tard la sacristie de l'église.
Viennent en effet s'appuyer à la tour, en 1778, le chœur et la nef d'une église, laquelle est agrandie en 1837.
Suite à ces travaux, la tour romane est fragilisée. Il est alors décidé d'en descendre les cloches pour les installer dans un premier temps sur un beffroi provisoire, en attendant la construction d'un clocher propre à l'église.
En décembre 1898, la tour romane est classée aux Monuments historiques[15]. Des réparations suivront dans les années 1950, puis une restauration par les Monuments historiques en 1999.
Église
Façade à l'est Photo C.Angsthelm
La nef et le chœur de l'église sont élevées en 1778 en venant se raccorder à la façade orientale de la tour romane, sans que l'on en connaisse le maître d'œuvre. La nef est agrandie en 1837.
Un clocher baroque avec flèche est rajouté en 1888 afin d'y loger les cloches qui ont été descendues de la tour. À la même date, le porche d'entrée est retravaillé et surmonté d'un fronton triangulaire avec la date de 1888 et l'inscription latine se traduisant par : « À Dieu seul la gloire ».
Pendant la Première Guerre mondiale, deux cloches sont réquisitionnées. En 1944, la façade est détériorée et la toiture éventrée par des bombardements. Les réparations s'étalent sur la deuxième moitié du siècle, comprenant également les peintures intérieures, notamment la représentation de la Vierge sur le plafond de la nef, par le peintre Claude BERNATH.
Au début du XXIe siècle, la sacristie est rénovée. Et le curé de l'époque décide de mettre en valeur certains objets du passé tels que les canons d'autel[16] en latin, et le mécanisme de l'horloge (fabriquée en 1889 par la société UNGERER).
Mobilier :
C'est en 1750 que Réguisheim acquiert son premier orgue Nicolas Boulay qui fonctionna jusqu'au milieu du XIXe siècle. En 1853 elle demande à Claude Ignace Callinet la construction d'un bel instrument de trois claviers et 31 jeux, installé dans un buffet en chêne, capable de rivaliser avec celui d'Oberhergheim. L'instrument est réparé vers 1890 par J.A. BERGER, pneumatisé en 1931 et transformé en 1982 par Alfred KERN[17].
La chaire à prêcher (seconde moitié du XIXe) est travaillée dans un style néo-Renaissance. La cuve octogonale au revers évidé présente les Évangélistes et leurs attributs, ainsi qu'une inscription. Son auteur n'est pas connu.
Les vitraux, dont certains sont non figuratifs, sont l'œuvre du peintre verrier Albert GERRER.
Clocher baroque
Arc triomphal et chœur
Chaire à prêcher, en chêne
Vitrail et son reflet
Orgue Callinet
Anciens canons d'autel
Ancien mécanisme de l'horloge (1889)
Croix de chemin et oratoire des champs
À l'intersection du chemin des champs et de la D47Sur le chemin des champs
Cette croix a été taillée et sculptée dans du grès, en 1863, par le sculpteur Barta.
Le socle rehaussé d'un Golgotha sert de piédestal à une croix avec médaillon ovale et grand Christ traité en ronde-bosse.
Une inscription en allemand sur le piédestal nous apprend que ce petit édifice a été commandité par Georges HASSENFORDER et Catherine FLEITH.
dans le médaillon du fût, figure une inscription d'indulgence.
Le petit oratoire se trouve au lieu-dit "Eselaecker".
Une pierre au-dessus de l'entrée porte la date de 1869, un œil de Jehovah, et les initiales HD, MA, TH.
Chapelle oratoire en souvenir de Sermensheim
À proximité du giratoire sur les D2b / D47
Cette chapelle a été construite en 1871, en souvenir du village de Sermensheim ravagé par la peste en 1604 ; l'emplacement exact du village étant marqué par une grande croix, en plein champ, en direction de Munchhouse.
La chapelle, détériorée pendant la Seconde Guerre mondiale, a été rénovée en 1959.
En 2004, elle est déplacée lors des travaux de confection du giratoire, puis inaugurée en 2005.
Autre patrimoine
La maison du maréchal-ferrant, rue d'Hirtzfelden, porte les dates de 1746 et 1877.
La maison aux dîmes, mentionnée en tant que cour colongère au Moyen Âge, est située aux n° 42 et 44 de la Grand-Rue. Composée de deux parcelles et deux logis, ainsi que d'une cour avec grange, elle porte la date de 1832 sur le puits et de 1833 sur un pilier.
L'ancien corps de garde, rue du Sellier, datant de la seconde période du XIXe siècle, est devenu le local des pompiers.
Le presbytère, de la même période, comporte un rez-de-chaussée surélevé, un étage carré et un toit à longs pans avec croupe.
La filature de coton, rue de Munchhouse, avait été établie le long du canal Vauban, en 1866, par l'ingénieur Jung. Les bâtiments avec ateliers et l'usine ont été démolis en 1939 et 1950. Les logements du contremaître et des ouvriers ont été remaniés au fil du temps par leurs nouveaux propriétaires.
Maison aux dîmes
Presbytère
Logements remaniés de l'ancienne filature
Repères géographiques
Réguisheim est situé dans la plaine alluviale du Rhin, dans la partie septentrionale de la forêt de la Hardt, au nord de Mulhouse et au sud de Colmar.
Le village ancien s'est établi sur la rive orientale de la rivière l'Ill, puis il s'est agrandi par la suite sur l'autre rive.
Le ban communal comprend une grande partie de terres agricoles et une petite zone de forêt à l'est et à l'ouest. En plus de l'Ill, il est irrigué par le canal Vauban et la Vieille-Thur.
Démographie
Année
1793
1800
1806
1821
1831
1836
1841
1846
1851
1856
Population
1 166
1 261
1 354
1 485
1 878
2 090
2 089
2 209
2 132
2 088
Année
1861
1866
1872
1876
1881
1886
1891
1896
1901
1906
Population
2 145
2 048
1 975
1 740
1 631
1 643
1 676
1 621
1 582
1 505
Année
1911
1921
1926
1931
1936
1946
1954
1962
1968
1975
Population
1 477
1 465
1 486
1 472
1 356
1 266
1 279
1 273
1 239
1 304
Année
1982
1990
1999
2006
2011
2016
2021
-
-
-
Population
1 612
1 536
1 660
1 741
1 802
1 847
-
-
-
-
Sources : Cassini/EHESS : de 1962 à 1999, population sans doubles comptes, Insee : depuis 2006, population municipale référencée tous les 5 ans.
Collectif d'auteurs, Ensisheim, un voyage dans le temps, collection "mémoires de vie", Strasbourg, Éditions Carré Blanc, 2016, 248 pages, ISBN 2-84488-183-1
Daniel DELATTRE, Le Haut-Rhin, les 377 communes, Grandvilliers, Éditions Delattre, 2015, 240 pages, ISBN 978-2-36464-078-8
Gilbert POINSOT, Alain HAUSS, Olivia LIND, Michèle SCHNEIDER-BARDOUT, Canton d'Ensisheim, Haut Rhin, images du patrimoine, collection "L'Inventaire", Illkirch, Le Verger éditeur, 1990, 72 pages, ISBN 2-908367-19-X
KAUFFMANN Marie-Madeleine et ALBARRACIN Christiane, Munchhouse, une petite histoire dans la grande, Mulhouse, Journal des ménagères, 2003, 240 pages, ISSN 0908 K 83551
Collectif d'auteurs, Annuaire de la Société d'Histoire de la Hardt et du Ried, n° 13, La Petite Imprimerie, Riquewihr, 2000, 124 pages, ISSN 0990-6894
↑Page 19, in Collectif d'auteurs, Ensisheim, un voyage dans le temps, collection "mémoires de vie", Strasbourg, Éditions Carré Blanc, 2016, 248 pages, ISBN 2-84488-183-1
↑Gilbert POINSOT, Alain HAUSS, Olivia LIND, Michèle SCHNEIDER-BARDOUT, Canton d'Ensisheim, Haut Rhin, images du patrimoine, collection "L'Inventaire", Illkirch, Le Verger éditeur, 1990, 72 pages, ISBN 2-908367-19-X
↑Daniel DELATTRE, Le Haut-Rhin, les 377 communes, Grandvilliers, Éditions Delattre, 2015, 240 pages, ISBN 978-2-36464-078-8
↑KAUFFMANN Marie-Madeleine et ALBARRACIN Christiane, Munchhouse, une petite histoire dans la grande, Mulhouse, Journal des ménagères, 2003, 240 pages, ISSN 0908 K 83551
↑Collectif d'auteurs, Annuaire de la Société d'Histoire de la Hardt et du Ried, n° 13, La Petite Imprimerie, Riquewihr, 2000, 124 pages, ISSN 0990-6894
↑Tableau donné par Günter BOLL et Denis INGOLD, dans leur article intitulé "Une pierre dans un berceau vide", in Collectif d'auteurs, Annuaire de la Société d'Histoire de la Hardt et du Ried, n° 13, La Petite Imprimerie, Riquewihr, 2000, 124 pages, ISSN 0990-6894
↑Objets liturgiques du culte catholique, les canons d'autel sont des recueils de texte en latin, rédigés sur des panneaux décoratifs, que les prêtres pouvaient installer entre l'autel et le tabernacle, afin que le célébrant puisse s'y référer en cas de trou de mémoire.