Tisserand
Tisser, fabriquer du tissu : une technique basique
- Le tissage relève d'un procédé tout simple, puisqu'il suffit d'entrecroiser perpendiculairement des fibres ou des fils.
On obtient alors une texture cohérente, une étoffe, qui sera plus ou moins aérée, plus ou moins solide.
- Pour fabriquer du tissu, il faut donc :
1) des matières premières : des fibres, soit à l'état brut, soit "filées".
- - fibres végétales : lin, coton, laine et soie, et plus tard : jute, sisal, kapok ou chanvre...
- - fibres animales : de mouton, chèvre, chameau, alpaga, vigogne ou lama...
- - fibres synthétiques : viscose, soie artificielle appelée ensuite rayonne, puis le célèbre nylon...
2) un cadre, pour tendre les fils de chaîne : au départ celui-ci a pu être aussi rudimentaire que quatre branches d'arbre, puis a évolué en métier à tisser.
3) des outils, pour croiser les fils (= la trame) : à l'origine sans doute les doigts, puis des aiguilles et des navettes.
Présentation historique
Les origines du tissu :
- Sous la préhistoire les hommes utilisaient des plantes (chanvre ou orties par exemple), des poils d'animaux et des graines pour fabriquer des tissus.
- En 2600 avant J.C la soie fait son apparition en Chine, elle est transformée en fil par torsion. Le filament issu du cocon du bombyx est tellement fin qu'il faut en tordre plusieurs ensemble pour obtenir le fil appelé "soie grège".
- « Une empreinte de tissu a été observée sur la Vénus de Dolni Vestonica en République Tchèque, statuette d'argile cuite vieille de 2800 ans »[1].
L'évolution des outils et métiers :
- Sous l'Antiquité, l'outil de base était le métier à tisser manuel. Les fibres naturelles, devaient être étirées, alignées par peignage (à l'aide d'une sorte de brosse métallique appelée séran), puis transformées en fil continu par le filage (à l'aide d'une quenouille dès l'antiquité, d'un fuseau, puis, à partir du XIVe siècle, d'un rouet). Les ouvriers utilisaient des plantes pour colorer les tissus. Par exemple la garance pour obtenir la couleur rouge.
- Au XIIIe siècle la pédale fut introduite au métier à tisser, ce qui permettait de faire fonctionner plusieurs lisses. (la lisse est un cadre avec dents de peigne qui permet de séparer les fils pairs des fils impairs, afin de laisser passer la navette).
- Au XVIIe Siècle, les tissus en fil synthétique font leur apparition, c'est à la fin de ce siècle que furent créées les premières machines à filer qui permettaient de faire fonctionner plusieurs fuseaux. Le métier mécanisé entraîne le développement d'une industrie florissante en Europe.
- En 1733, l'anglais John Kay crée la navette volante qui permet de lancer la navette sur toute la largeur du métier. Edmund Cartwright invente la machine à vapeur et il crée en 1788 avec James Watt la 1ère usine fondée sur ce principe en Angleterre.
L'essor industriel :
- En 1746 : « Quatre mousquetaires, J. J. Scchmaltzer, S. Koechlin, J. H. Dolfus et J. J. Feer, en fondant la première manufacture d'indiennes, donnent à Mulhouse cette formidable impulsion économique et industrielle qui gagnera la confiance commerciale mondiale au XIXe siècle »[2].
- En 1785, les anglais créèrent le rouleau à impression, rouleau en cuivre gravé, permettant d'imprimer des motifs sur le tissu.
- En 1801 le français Joseph Marie Jacquard créa la carte perforée, qui permettait de créer des motifs automatiquement.
- Et en 1802, en France, la première machine à rouleau de cuivre, inspirée des anglais, vit le jour à Jouy-en-Josas.
- Au XIXe siècle, la découverte des colorants dérivés des goudrons de houille permit de teindre plus facilement les tissus avec la création de la sérigraphie (impression sur planche), puis vint l'impression au rouleau qui fut améliorée pour pouvoir colorer en 6 couleurs différentes.
Évolution de la rentabilité
Pour produire 100 mètres de tissu, il fallait :
- en 1787, 200 heures, avec un métier à bras
- en 1837, 100 heures, avec un métier mécanique
- en 1887, 50 heures, avec un métier amélioré
- en 1937, 10 heures, avec le métier "Northrop"
- en 1987, 0,8 heure, avec une machine à jet d'air[3].
Métiers
Métiers | Définition | Métiers | Définition |
---|---|---|---|
Bas Licier | Ouvrier qui fabrique de la tapisserie sur un métier dont la chaîne est horizontale |
Cardeur | Celui qui carde la laine, du drap ou du coton |
Catisseur | Celui qui donne le cati (Apprêt qui rend les étoffes plus fermes & plus lustrées) aux étoffes |
Décatisseur | Ouvrier qui enlève le cati aux étoffes |
Dentellière | Celle qui fabrique de la dentelle | Dévideur(se) | Ouvrier, ouvrière qui dévide des fils, des laines, des soies, ou en pelotons, ou en écheveaux |
Fouleur | Ouvrier (ère) qui prépare et qui façonne un tissu | Foulonnier | Ouvrier(ère) qui apprête les draps pour passer à la foule |
Futainier | Ouvrier qui fabrique et vend la futaine | Houppier | Ouvrier qui peigne la laine ; en Picardie c'est un fileur de chanvre et de lin |
Indienneur | celui qui travaille dans une manufacture d'indiennes | Laineur | ouvrier qui travaille les draps et toutes sortes de lainage |
Lustreur | ouvrier qui travaille au lustrage d'une étoffe | Mousselinier | ouvrier (ère) qui fabrique de la mousseline |
Mulquinier | Celui qui fabrique des toiles fines | Musquinier | ouvrier de Picardie qui fabrique de la Batiste, du linon |
Ourdisseur | celui qui confectionne la chaîne du métier à tisser à l'aide d'un ourdissoir. | ||
Pareur | ouvrier qui aplanit la surface d'un drap et dirige les brins sur le même sens | Presseur | celui qui presse les toiles |
Teissor-Tissot | Tisserand, celui qui fabrique du tissu, celui qui travaille à la navette | Tiretier | Fabricant et marchand d'étoffes de soie |
Tireur(se)' | Ouvrier, ouvrière, chargés de tirer les ficelles des semples dans une manufacture d'étoffes | - |
Dictionnaire des tissus
- Voir le Dictionnaire des tissus
Matériaux
- Doublot : fil de laine double servant à faire les lisières des droguets
- Fleuret : fil fait avec de la bourre de soie
- Flocon : petite touffe de laine, soie...
- Glacis : dans les fabriques de soie, partie des fils de la chaîne qui tient la trame lorsque la traînée se trouve trop longue
- Lacs : cordes disposées pour supporter des fils forts qui remplacent les lisses dans les métiers à tisser
Matériel
- Beylier : Métier donnant une première filature à la laine
- Caissetin : Petite armoire ou l'ouvrier range ses soies et ses dorures
- Calissoire : Poêle remplie de feu qui sert à lustrer les draps, les étoffes
- Canette - Espolin : Petit tube de roseau sur lequel on dévide la laine, le coton ou la soie, pour la trame des étoffes.
- Cassin : Chassis du métier de tisserand où sont attachés des poulies sur lesquelles roulent les ficelles nécessaires à la fabrication des étoffes
- Casse-fil : Instrument qui permet d'analyser la ténacité des fils écrus
- Cazette : Bobine sur laquelle on fait rouler le fil d'or au fur et à mesure qu'on le tire, et qui est mobile sur le métier
- Compte-fils: Loupe pour compter les fils de la chaîne ou de la trame d'une étoffe
- Composteur :
- Petite baguette de bois pour plier une étoffe de soie.
- Dévidoir :
- Instrument dont on se sert pour dévider.
- Fogue : ouverture de la chaîne pour faire passer la navette
- Forces : outils de coupe dotés de deux lames qui se chevauchent et travaillent en cisaillement.
- Fouloir : outil qui sert à fouler
- Guindre : Petit métier qui sert pour doubler les soies filées
- Jacquard : mécanisme créé par Jacquard de Lyon qui s'adapte aux métiers à tisser
- Jenny-Mull : métier à filer le coton par aiguillées
- Navette : instrument de tissage qui sert à passer le fil de trame dans le pas ouvert de la chaîne d'un tissu
- Mulquinerie : Métier à fabriquer de la dentelle ou le tulle
- Ourdissoir : Machine servant à fabriquer le fil de chaîne pour un métier à tisser.
- Pilette : instrument servant à piler la laine
- Rebroussette : peigne avec lequel on relève les poils d'un drap
- Soufroir : étuve où l'on expose les draps à la vapeur du soufre pour les blanchir
- Tamplon : ros ou peigne dont se sert le tisserand lorsqu'il veut augmenter la largeur du tissu qu'il fabrique
- Voutoir : peigne dont se servent les ouvriers en haute lisse, pour diriger le fil dans le métier
Manufactures en France et à l'Étranger
Quelles étaient les conditions d'implantation des manufactures textiles ?
La présence d'eau était nécessaire, notamment pour les usines d'ennoblissement (l'impression sur étoffes), et il fallait de la main d'oeuvre, de préférence bon marché. Ces deux conditions se retrouvaient souvent dans les vallées de montagne, comme dans le Haut-Rhin ou dans les Vosges.
Remarque :
La qualité de l'eau avait son importance : l'eau pure était particulièrement adaptée au lessivage et au blanchiment, l'eau calcaire convenait mieux à la teinture.
- Ardennes (08)
- Ille-et-Vilaine (35)
- J.M Choleau : Tissage de laine, chanvre, lin, flanelle ; 46 rue Poterie à Vitré
- Nord (59)
- Haut-Rhin (68)
- Manufacture Stehelin et Cie - Cernay - 68063
- Mulhouse mérite aussi une mention particulière : c'est tout un ensemble textile qui s'est développé suite à la manufacture d'impression sur étoffes, avec des usines de tissage, mais aussi des filatures, dont la célèbre DMC, puis l'industrie des colorants. Au point que Mulhouse a été surnommée "la ville aux cent cheminées", puis sous la restauration, "Manchester français".
- Vosges (88).
Termes
- Bouiller : mettre la marque que devait porter chaque étoffe déclarée au bureau des fermes du Roi
- Coucher : peindre de la couleur sur du tissu
- Croiser : une étoffe. Faire passer des fils de la trame d'une étoffe dans une double trame
- Détisser : défaire un tissu qu'on avait commencé
- Doite : grosseur d'un écheveau
- Jeu de fuseaux : dans les fabriques de dentelles, on appelle jeu de fuseaux les divers mouvements par lesquels l'ouvrière fait passer et repasser les fils qui forment la dentelle
- Lice ou Lisse : Assemblage de plusieurs longs fils de soie ou de laine étendus sur les métiers de tapisserie de haute lisse ou de basse lisse.
- Lienne : Se dit, parmi les tisserands, des fils de la chaîne dans lesquels la trame n'a pas passé.
- Lustrage : Action de lustrer une étoffe
- Nopage : Action de dénouer des draps au sortir du métier
- Ourdir : Confectionner le fil de chaîne pour le métier à tisser.
- Parfilure : séparation brin par brin de la soie qui recouvre l'or et l'argent d'un galon
- Parou : apprêt que l'on donne aux toiles après leur fabrication avant de les livrer au commerce.
- Plusage : action d'éplucher et d'étirer de la laine
- Pochure : creux dans une étoffe
- Poudrer : se dit des étoffes teintes en noir d'où il s'élève une poudre fine lorsqu'elles n'ont pas été assez élevées
- Pué : disposition des fils de diverses matières dans la chaîne des étoffes
- Rechinser : laver la laine dans l'eau claire.
- Remonder : nettoyer la chaîne d'une étoffe, en ôtant les bourres et inégalités qu'elle peut contenir.
- Retirons : laine qui reste dans le peigne après le premier peignage
- Saboter : fouler les draps avec des sabots
- Sentène : endroit par où l'on commence à dévider un écheveau. Ce sont les deux bouts de fil liés ensemble et tortillés sur l'écheveau
- Tors : réunion de filaments de poils amalgamés en fil par une simple torsion
Sources
Bibliographie
- Dictionnaire général des arts et des métiers - François Raymond - Ed. Thiériot, Paris 1836.
- Dictionnaire de la langue française - Emile Littré (1872-77)
- PARKER Steve, Les textiles, collection "Les matériaux", Paris, éditions Gamma Jeunesse, 2002, 32 pages, ISBN 2-7130-1959-1
- Bulletin de la Société Industrielle de Mulhouse, L'industrie textile en Alsace, n° 1/1990, Mulhouse, 172 pages
- RIFFENACH Carmen et ALLEMANN Fabienne, Musées industriels et techniques de Mulhouse, collection kaléidoscope d'Alsace, Molsheim (67), éditions des dernières nouvelles d'Alsace, 1988, 38 pages, ISBN 2-7165-0115-7
Voir aussi (sur Geneawiki)
- Les canuts
- Le tissage à Belmont-de-la-Loire
- Histoire de la couverture à Cours-la-ville
- Barthélémy THIMONNIER, inventeur de la machine à coudre.
Liens utiles (externes)
Notes et références
- ↑ PUYBARET Marie Pierre et MÉDARD Fabienne, "Quand le textile rencontre l'argile", p 44-45, in "L'archéologie" n° 55, août-septembre 2001
- ↑ RIFFENACH Carmen et ALLEMANN Fabienne, "Histoire de Mulhouse", l'industrialisation, page 14, in Musées industriels et techniques de Mulhouse, collection kaléidoscope d'Alsace, Molsheim (67), éditions des dernières nouvelles d'Alsace, 1988, 38 pages, ISBN 2-7165-0115-7
- ↑ SCHUTZ Richard A. "Aspects technico-économiques de la chose textile", page 125, in Bulletin de la Société Industrielle de Mulhouse, L'industrie textile en Alsace, n° 1/1990, Mulhouse, 172 pages
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