Maroc - Rommani (Marchand)

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Rommani
(Marchand)
Blason Khemisset.jpg
Informations
Pays Drapeau du Maroc    Maroc
Région {{{Region}}}
Code postal
Population hab. ()
Densité hab./km²
Nom des habitants
Superficie
Point culminant
Altitude 306
Coordonnées (long/lat) 6° 35' 60W - 33° 31' 60N
Localisation


Histoire.png Histoire de la commune

Autres noms : Rommani, Romani ,Ar Rummān, Marchand, Ar Rumman ; autres noms trouvés dans les sources françaises consultées (voir bibliograpphie) : Camp Marchand, Zebbouya .voir ce site : http://www.natoss-rommani.tk/

La tribu guerrière des Zaer avant le protectorat

Rommani se situe à quelques dizaines de kilomètres au sud de Rabat et de Salé, sur le territoire de la tribu des Zaer, et plus précisément à la limite entre les territoires de ceux que l'Armée, au temps du protectorat, appelait les Zaer du Nord et les Zaer du Sud. Le territoire tribal est constituté d'un plateau, dit "plateau zaer". Il est arrosé par l'oued Bou Regreg et son affluent l'oued Grou ; ces fleuves font, du pays zaer, un territoire plaisant, couvert d'une belle forêt de chènes liège ; ils ne permettent pas pour autant, avant l'époque moderne, une agriculture performante (régime irrégulier, parcours souvent souterrain).

L'économie pastorale impose le mode de vie nomade en raison des importants déplacements necessaires pour nourrir les troupeaux dans ce pays à l'hydrographie capricieuse. Ce mode de vie laisse peu de place à la propriété privée familiale. La terre "appartient" à une tribu en vertu de traditions orales supposées anciennes ; les frontières sont indécises ; pour les déterminer à peu près, la mémoire joue un grand rôle, les armes aussi ; au XIX ème siècle, un fait marquant pour l'arrière pays pastoral est l'expansion de la tribu Zemmour, mais les Zaer réussissent globalement à garder leur plateau.

La tribu guerrière des Zaer était déjà redoutée au XII ème siècle pour sa résistance à l'autorité des sultans. Elle a donné son nom à la porte sud de la ville de Rabat : Bab Zaer ("la porte Zaer"). Pour lui tenir tête, le sultan fit venir d'Arabie un contingent de la tribu des Oudayas, non moins féroce, qui habitait son propre quartier fortifié (Casbah des Oudayas).

En 1911 encore, la capitale du Maroc est Fèz, et le sultan qui y réside ne se rend pas facilement à Rabat ; la traversée des pays Zemmour et Zaër est une aventure qui ne s'entreprend pas sans hésitations quand on ne dispose pas d'une armée moderne.

La conquête du pays Zaer

Avant 1911

La présence française au Maroc s'était longtemps limitée à Casablanca. L'action de la France se renforce en 1907 : un massacre d'ouvriers européens travaillant à l'agrandissement du port entraîne la venue d'un corps expéditionnaire de 3000 hommes et la soumission des tribus Chaouïa (les habitants de la région de Casa). La même année voit la la France intervenir à Oujda, ville proche de l'Algérie alors française et donc relativement accessible pour l'armée.

Pendant ce temps, dans le reste du pays, les Européens présents sont peu nombreux.

La capitale du Maroc est Fèz. Rabat n'est qu'une ancienne capitale qui a perdu de son lustre, d'autant plus que les sultans ne s'y rendent qu'avec difficulté, comme on l'a vu.

Quelques événements militaires sont à noter dès 1910 et au début de 1911 :

  • 18 février 1910 : Le lieutenant MEAUX et un cavalier qui l'accompagnait sont tués sur le territoire des Zaer alors qu'ils poursuivaient un malfaiteur ; les Zaer refusent de livrer les agresseurs à la France
  • Janvier 1911 : l'escorte du capitaine NANCY, venie rêgler des questions de pâturages entre des tribus, est attaquée par des Zaer ; plusieurs tués
  • 14 janvier 1911 : le lieutenant MARCHAND est tué par les Zaer presque au même endroit que le lieutenant MEAUX.

Cependant, le pays Zaer n'étant proche d'aucun territoire sous mainmise française solide (Casa, l'Algérie), il ne pouvait être placé sous influence française qu'au moyen d'une opération militaire d'envergure. L'expédition de Fès, sans au départ être programmée pour cela, en fournira l'occasion.

L'expédition de Fèz

C'est à l'occasion de l'expédition de Fèz, en avril et mai 1911, que la France s'implante véritablement en pays zaer.

Cette expédition est entreprise le 17 avril, à la demande du sultan Moulay Hafid, assiégé dans Fès par les tribus Beni M'Tir.

L'intervention française a pour but officiel de porter secours aux Européens pris au piège dans Fèz ; elle est placée sous le commandement du général Moinier ; partie de Casa après avoir reçu des renforts d'Algérie, la colonne Moinier passe l'oued Bou Regreb (qui sépare Rabat de Salé) le 27 avril et essuie des combats le 1er mai dans la forêt de la Maamora, c'est à dire en pays Zaer ; le 21 mai, la colonne arrive à Fèz où le Général Moinier est remercié par le sultan Moulay Hafid ; en outre, au cours d'un entretien privé, le sultan demande au général Moinier de châtier les tribus Béni M'Tir, instigatrices du siège de la ville et d'ouvrir la communication directe entre Fès et Rabat, à travers les tribus Zemmour et Zaër. Fèz est dégagée dans les jours qui suivent. Puis Moinier se dirige vers Meknès et contraint le sultan insurrectionnel Moulay Zine à l'abdication ; ils ouvre, en combattant, la route Fez-Meknès-Khemisset-Tinet, Sidi Allai el Baraoui-Rabat.

Ce sera la première fois depuis longtemps qu'un sultan pourra aller de Fez à Rabat, sans se heurter aux farouches Zemmours et Zaërs.

Le traité de protectorat est signé en 1912, en forçant la main du sultan Moulay Hafid, dont l'attitude est toujours ambigüe : toujours prêt à demander l'aide de la France contre une tribu rebelle ou un sultan rival, jamais prêt à assumer ces demandes.

Quadrillage du pays zaer

Les guerriers zaer n'ont pas été à l'origine du siège de Fèz, comme on l'a vu, mais ils sont probablement pour quelque chose dans les combats que la France a essuyés le 1er mai dans la région de la Maamora.

En tous cas, quelles qu'en soient les raisons, l'expédition de Fèz se traduit par un véritable quadrillage du territoire de cette tribu.

Tout d'abord, Rabat est choisie comme capitale par Lyautey.

L'arrière-pays est quadrillé avec méthode dès le lendemain de l'expédition de Fèz :

  • 30 juillet 1911 : installation du poste de Camp Marchand à Zebouya, sur la limite qui sépare les Zaer du Nord des Zaer du Sud
  • 11 septembre 1911 : installation d'un poste à N'Kheila, centre du pays des Zaer Est ; N'Kheila est à mi-chemin entre Rabat et Camp Marchand.
  • 1912 : les opérations contre les Zaer continuent ; soulèvements des tribus voisines (Zemmour et Zaian) ; sourd mécontentement des Chaouias à la suite de nouveaux impôts du Sultan (dont l'impopularité retombe sur la France) ; l'année 1912 est également celle durant laquelle est signé le traité de protectorat.

Le protectorat français

Francais.jpg Le Protectorat : 1912 - 1956


Premiers civils français à et autour de Camp Marchand

Camp Marchand (appelée aussi Marchand) est le siège d'un Contrôle Civil, l'équivalent d'une Préfecture. Des cartes postales anciennes nous montrent le batiment du controle civil, ainsi qu'une maison du Caïd et une mosquée le tout dans un contexte de grands espaces vides.

Une population civile française commence à arriver dans les années qui suivent la conquête de la région. On connaît par exemple une lettre datée de N'Kreila et écrite en 1917 par une femme, Florentine BATEMAN, un temps épouse du légionnaire Jules DEXEMPLE.

Florentine BATEMAN, chanteuse et danseuse, s'est produite au Bataclan à Paris, puis, elle est arrivée à Casablanca en 1912 en y suivant sa clientèle de militaires ; elle y ouvre le premier music-hall place de France et fait peut-être fortune, à ce qu'on croit dans la famille ; en tous cas, elle perd vite ces biens dans ce far-west et se réfugie à N'Kheila ; elle élève seule sa fille Léa, dite Marcelle, dont la santé es précaire ; dans sa lettre, elle écrit qu'elle vit du produit d'un lopin de terre, ainsi que d'un petit magasin de produits de première necessité (thé, sucre, tabac) destinés à une clientèle arabe.

Les années 1920 voient l'arrivée d'une population de forestiers employés comme gardes des Eaux et Forêts ; en effet, la France estime que la bonne gestion de la forêt de chênes lièges est un atout pour le bien-être, donc la tranquillité, de la population Zaer.

Probablement y a-t-il aussi d'autres personnes et d'autres professions, mais l'étude complète des premières populations françaises à Camp Marchand reste à réaliser.

Il importe de préciser que ces professions, même civiles, ont toutes quelque lien avec l'armée. Un proverbe de l'époque dit : "Au Maroc, il n'y a ni civils ni militaires, il n'y a que des Marocains" ; nous le vérifions par l'exemple de Florentine BATEMAN, commerçante dont les liens avec l'armée sont multiples, ainsi que par celui des gardes des Eaux et Forêts, des civils recrutés dans le cadre d'un projet voulu par l'armée.

Camp Marchand, que l'on appelle aussi Marchand, sert d'épine dorsale au pays alentour. C'est le bourg auquel on se rend quand on a besoin de services de première necessité, comme de consulter un médecin ou d'envoyer du courrier. Le bourg comporte un bureau de poste, dont dépendent les villages suivants : Christian ; La Jacqueline ; Marchand ; Merzough ; N'Nkreila ; Sidi Bettache.

Outre ces villages, dépend de Camp Marchand toute une population dispersée, par exemples les gardes des Eaux et Forets qui vivent sur le terrain (deux familles par maison forestière), ou plutôt, pour parler comme là-bas, qui vivent "au bled". Le bled, ,c'est la grande cambrousse. Ce n'est pas un village même petit, c'est le vide absolu. D'où le besoin de se raccrocher à cette sorte de cordon ombilical qu'est Camp Marchand. "Marchand par ci ..." ; "Marchand par là ..." : on n'entendait que cela dans les familles du "bled".

Pour savoir comment on vivait dans les maisons forestières du bled, nous prendrons l'exemple de la famille de Baptistin ROUX, qui a épousé en 1926 la jeune Marcelle, fille de Florentine BAETEMAN.

Le jeune couple vit en forêt à deux endroits successifs, Aïn Tolba et Aïn Sfergila, qu'il a été impossible de situer bien que terme de "Aïn" (source) suggère la présence de l'eau. Les maisons forestières étaient occupées chacune par deux familles qui étaient entièrement responsables du terrain. Baptistin veille au bon entretien de la forêt et verbalise les Zaër quand ils coupent du bois sans permission ou font du charbon de bois par grosse chaleur. Malgré cela, il est apprécié. Il est vrai qu'il s'agit d'un très brave homme, respectueux de tous les êtres au point de veiller à ne pas écraser une fourmi. Il serait surprenant qu'il verbalise sans discernement.

Bien que les combats ne datent que de peu d'années en arrière, aucune agression grave n'est à signaler (bien que Baptistin ait un jour reçu des pierres, mais il s'agit d'un problème ponctuel), et les enfants vivent pleinement heureux, en toute liberté, sans savoir ce que c'est que de devoir regarder à droite et à gauche pour traverser une route sans se faire écraser. Pas le moindre problème non plus au chapitre des avances sexuelles indésirables, bien que la famille ait cinq filles.

Une famille arabe (voir "Illustrations, photos anciennes") vit à proximité de la maison forestière, sous la tente. Les relations sont excellentes. Les enfants ROUX se souviendront toute leur vie avec émotion des merveilleux moments passés sous la khémia, la tente traditionnelle de ces bergers, et du gout incomparable de la kesra, le pain aplati en forme de galette par la voisine, et cuit dans un four creusé dans le sol, la bouse de vache servant de combustible. Le généalogiste moderne s'étonne un peu de voir que les ROUX gardent les mêmes voisins au fil des années alors que ceux-ci vivent sous la tente et sont en principe nomades. Mais il faut se replacer dans le contexte de l'époque. La vie nomade n'a rien d'un plaisir et ce n'est pas un but en soi. La maison forestière étant située près d'une source, l'herbe est suffisante pour ne pas imposer de grands déplacements. L'entente avec les voisins français est bonne. Alors pourquoi partir ?

Deux familles forestières plus une famille zaer qui toutes ont de nombreux enfants, cela commence à faire un petit hameau mais il n'est inscrit sur aucune carte.

La famille mange les œufs de ses poules, ainsi que les fruits et légumes de son jardin ; elle n'est pas peu fière de manger des oranges, un luxe qui, à l'époque, n'était pas à la portée de tous même en métropole ; le combustible (charbon de bois) s'achète auprès des voisins zaer ; pour la viande, la famille va au souk, ville commerçante provisoire qui surgit à certains moments et en certains endroits, et disparait ensuite ; acheter la viande, cela veut dire venir avec ses enfants, leur montrer le berger égorgeant le mouton, discuter avec les personnes agglutinées pour savoir qui aura quel morceau et en marchander le prix.

La jeune femme étant malade (elle meurt en 1934), Baptistin doit souvent aller chercher le médecin à Marchand. Il y part à cheval et le ramène en croupe. Les accouchements ont lieu à l'hôpital de Rabat, grâce à la complaisance d'un gendarme qui possède une voiture ; les naissances des enfants de cette famille sont donc enregistrées à Rabat bien que la famille n'y vive pas.

Une naissance prématurée a cependant lieu à la maison forestière. La fillette tient dans la main de son père et a une boîte à chaussures pour berceau. La voyant si fragile, le médecin délivre l'acte de décès. Ce n'est pas légal du tout mais que faire d'autre ? Il est le seul médecin sur un vaste territoire, il se déplace à pied ou à cheval, et il a autre chose à faire que de revenir exprès chez les ROUX pour constater officiellement le décès.

Deux mois après, Baptistin ROUX croise le médecin au souk et en profite pour lui demander quelques conseils pour la petite. Le médecin devient vert :

"La petite ! quoi ! elle est vivante ?"

Le pauvre homme se voit déjà traduit au tribunal pour son "faux" certificat de décès ... heureusement, ce genre de choses n'allait jamais loin au Maroc. Le certificat de décès est resté en possession de "la petite", aujourd'hui grand-mère, qui le montra longtemps fièrement.

"La petite" a survécu grâce au lait d'ânesse fourni par les voisins zaer, de farouches guerriers, parait-il, mais, comme on voit, ils ne combattaient pas les femmes et les enfants.

La scolarisation des enfants est impossible dans la région ; elle impose des séjours en internat à Rabat ; les enfants sont également, à certains moments, envoyés en France dans la famille d'origine ; cette situation finit par devenir intenable ; Baptistin ROUX prend une retraite anticipée en 1942 et la famille part vivre à Rabat.

Dans les années 1950

Goumier monté.jpg

La situation s'améliore avec le temps.


Le protectorat français prend fin en 1956.

Le 9 mai 1956, à N'Kheila, entre Rabat et Camp Marchand, dans le quartier du 1er tabor marocain, les 41 goums, représentés par leurs fanions ornés de la traditionnelle queue de cheval, disaient adieu à leur drapeau.

En exécution des accords de Paris, ils étaient dissous et transférés à l'Armée royale marocaine.

Le colonel Aunis, leur dernier chef, donna lecture de l'ordre de dissolution

Camp Marchand change de nom et devient Rommani. Ce nom était auparavant inconnu des premiers habitants français de Camp Marchand, en tous cas de la famille ROUX.

Repère géographique.png Repères géographiques

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Carte Maroc Rommani.jpg Région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër


Rommani est une petite ville située à environ 80 Km de Rabat et 120 km de Casablanca.

Démographie.png Démographie

Illustrations - Photos anciennes.png En photos

  • Evènements politiques, institutions

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  • Population années 1920/1930

Habitants des maisons forestières de Aïn Tolba et/ou Aïn Sfergila :

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Recherches généalogiques.png À savoir pour vos recherches généalogiques


Nuvola apps bookcase.png Bibliographie

Un fond particulièrement riche sur le Maroc de l'époque du protectorat est disponible à la bibliothèque du Service Historique de l'Armée de Terre, située dans les locaux du Chateau de Vincennes à Paris.

Quelques livres consultés dans cette bibliothèque :

  • Augustin BERNARD ; Le Maroc ; Librairie Félix Alcan ; édité en 1915
  • Mony SABIN ; La paix au Maroc ; Editions Jules Taillandier ; édité en 1933
  • Général CALONI ; La France au Maroc ; Société française d'éditions littéraires et techniques ; édité en 1937
  • Eugène GUERNIER (sous la direction de) ; Encyclopédie coloniale et maritime ; édité en 1947

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