Les insurgés de 1851
Texte de Nicole Pedley extrait du journal "Au fil du Roubion" périodique rédigé par un groupe de bénévoles de Saint-Gervais sur Roubion.
L'insurrection de 1851 dans la Drôme
Le jour où les Drômois emmanchèrent les faux à l’envers
Ces insurgés furent arrêtés, interrogés, puis emprisonnés ou exilés en Algérie, pour avoir participé à l’insurrection de 1851 en Drôme-Ardèche après le Coup-d’État de Louis Napoléon Bonaparte.
Dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851, le Président de la République, Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon 1er fait arrêter les députés royalistes, légitimistes ou orléanistes, faisant croire qu’il sauve ainsi la République. Des affiches annoncent la dissolution de l’Assemblée Nationale et le rétablissement du suffrage universel. En fait, ce que veut Louis-Napoléon Bonaparte, élu pour 4 ans, c’est prolonger ses pouvoirs de président pour 10 ans. Mais le peuple est berné et Paris réagira peu : quelques barricades, 1 500 à 2 000 hommes entraînés par des députés républicains. En face, il y avait 20 000 soldats ! Mais dans le Midi, notamment dans l’Ardèche et la Drôme, de véritables armées populaires vont se lever, à Die, Dieulefit, Bourdeaux, Privas, Montélimar et ailleurs, au nom des libertés bafouées, d’une révolte contre la misère et d’une exigence de dignité.
A l’annonce du Coup d’Etat, le 3 décembre, CREST s’agite. Dès le 4, deux colonnes venant de Die, et de Loriol convergent vers CREST. Maires en tête, la première s’accroît au fur et à mesure qu’elle traverse Les villages. Vers Aouste, la garnison de Crest l’arrête. Après avoir échangé quelques coups de feu avec l’armée, les insurgés se réfugient dans la montagne. Le lendemain, ils essayent de prendre la ville de Crest par les hauteurs mais doivent reculer. Au même moment, arrive une colonne venant de Grâne. De Valence, les autorités inquiètes, envoient des renforts à l’armée et les républicains doivent se réfugier dans les collines.
Mais tout n’est pas fini. Dès le 4 décembre au soir, l’effervescence s’empare de Dieulefit. La population paysanne se mêle aux 300 ouvriers de la draperie Morin. Le 5 se passe dans l’attente d’un ordre. Le 6, cette troupe menée par Darier, pharmacien,prend la route de Bourdeaux où elle arrive quelques heures plus tard. Vers 4 h du matin, ils étaient environ 1 500 ou 1 600, bourgeois, cultivateurs, catholiques ou protestants. Les gendarmes de Bourdeaux se laissent désarmer. Cette troupe se présente devant Crest le 7 au matin. Depuis Dieulefit, elle a fait 40 km à pied. Elle s’est grossie d’éléments en passant à Saoû et d’autres venant de Puy St Martin, Manas, Pont de Barret, Charols, Saint Gervais. Cette armée populaire de 5 à 6 000 hommes marche sans discipline, brandissant des fusils et des faux. Devant Crest, elle se heurte à l’armée qui, malgré les efforts de Darier pour organiser ses troupes, disperse tout le monde. 5 ou 6 hommes sont tués, quelques-uns blessés grièvement. Les fuyards regagnent leurs villages et leurs foyers comme ils le peuvent. Certains rescapés de la bataille rejoignent d’autres républicains à Cliousclat, Saulce et Mirmande, et marchent sur Loriol où ils rencontrent des artilleurs.
« Des feux flambaient dans la montagne, au-dessus de Marsanne, de Roynac, et le tocsin sonnait partout. au fond de la Valdaine, la cloche de Charols se mit aussi en branle entre 9 h et 10 h du soir, pendant une quinzaine de minutes ; une vingtaine d’hommes partirent pour se joindre à ceux de Saint-Gervais. Dans cette commune, le tocsin de Marsanne, vers 7 h, avait été le signal du soulèvement. Les frères Marcel crièrent : « Aux armes ! » ; Joseph, le benjamin, un apprenti maçon de seize ans, apportait à ses trois aînés de gros cailloux, avec lesquels ils enfoncèrent la porte de l’église ; ils se mirent à sonner la cloche. D’autres insurgés, pour répondre aux feux qu’on voyait sur le serre de Paruel, au-dessus de Marsanne, allumèrent un grand brasier à l’extrémité du jardin de l’ancien château. Partout, les gens s’agitaient, allant de la place publique à la place de l’hôpital, emplissant la salle du café. Les femmes firent plusieurs fois le tour du village en criant « Houe ! houe ! » et la jeune Virginie Brozille, 21 ans, mariée au garde qui l’avait amenée du Var six mois auparavant, tenait des propos menaçants contre les Blancs.
« Tout le monde, selon l’adjoint, semblait être dans le délire ; on eût dit aller à une fête de village. »
Joseph Borel, granger de M. Turin, s’était emparé du fusil de son maître et, avec d’autres, tirait en l’air, en criant : On va à Montélimar ! Les femmes mêlaient leur chant à ceux des hommes. A l’exception des vieillards et de cinq à six personnes, nul ne manquait à l’appel, pas même ceux que l’on appelait « les Mômiens », des protestants dissidents relativement peu nombreux dans ce village catholique. Les réunions dominicales qui les rassemblaient chez le boulanger où ils étudiaient ensemble l’Évangile, où ils partageaient le pain et le vin, avaient été interdites au mois d’août ; le paisible paysan Jean-Antoine Dumas, traité par le maire « d’imbécile » (« il est protestant et ne s’occupe que de la Bible et de l’Ancien Testament ») arriva avec son fusil de chasse chargé de petit plomb.
Quand vers 8 h sonna le tocsin, hommes, femmes et enfants se rassemblèrent sur la place dont les issues étaient gardées par des sentinelles.
Le maire étant« indisposé » ; le commandement fut proposé à l’adjoint Gougne, cultivateur. Il refusa en alléguant « qu’il avait peu de connaissance de l’art militaire » et l’on nomma « président » le cordonnier Prosper Chavanet, un ancien soldat âgé de 29 ans. L’un des frères Marcel, André, fut désigné comme « vice-président » ; il avait servi de mai 1848 à avril 1850 à Lyon, dans le bataillon d’ouvriers de l’administration, et il en avait ramené des idées socialistes, qui l’avaient fait révoquer de sa place de garde champêtre Chavanet harangua la foule, déclara que « le premier qui ferait quelque chose d’inconvenant serait sévèrement puni », que les soldats ne tireraient point, ou tireraient en l’air. « Tireraient-ils qu’il ne faudrait pas tirer sur eux. »
Les hommes de Charols, et d’autres de Bonlieu, où le tocsin n’avait pas sonné, participaient au rassemblement. Deux cents hommes armés de fusils, de sabres, de fourches, de râteaux en fer se formèrent en colonne et le plus jeune des Marcel, un bâton à la main, y prit place, « avec d’autres enfants de son âge ». Le notaire Arsac, usurier et mouchard, dont on avait beaucoup à se plaindre, avait été pris en otage ; on le força à suivre, avec sa fille Adeline, qui ne voulut pas le quitter. En chantant La Marseillaise et en tirant des coups de fusil, la troupe se mit en marche vers Larra. Arsac, qui était âgé de 61 ans, se plaignant de ne pouvoir suivre ; on le hissa dans le tombereau d’un granger de Bonlieu et il fut ainsi conduit jusqu’à Sauzet, où il parvint à s’échapper. »
Ce même jour, 8 décembre, à Marsanne, 4 à 600 insurgés marchent sur Montélimar. A Saint-Marcel, ils rencontrent une colonne de deux compagnies de Montélimar. Mais les deux sergents n’osent pas commander le tir à leurs hommes et les soldats se replient sur Montélimar. Mais dès le lendemain, les troupes s’emparent de Sauzet et Saint-Marcel. La victoire a été de courte durée !
Ce fut la dernière tentative d’insurrection. Les familles compromises se demandent maintenant comment va réagir l’autorité.
Le 20 décembre, le plébiscite en faveur de Louis-Napoléon sera voté sans incident. On peut penser qu’une bonne partie de ceux qui auraient dit « non » n’avaient pas le droit de vote !
Pourquoi et comment ce soulèvement rural put-il avoir lieu ?
La raison est d’abord politique : il fallait mettre un terme aux ambitions de Louis-Napoléon Bonaparte et installer une République « sociale ». Reportons-nous 3 ans en arrière : à la chambre des Députés en 1848, sur 800 élus, il y a eu 300 républicains véritables seulement. Les élus étaient des notables, assez riches pour pouvoir financer leur campagne d’affiches, et qui avaient disposé de beaucoup de temps pour parcourir la région.
Cependant, dans la Drôme avaient été élus 6 républicains authentiques, seulement 2 étaient de droite. Puis les tenants du parti de l’Ordre s’étaient entendus pour faire élire un Président de la République de leur choix, Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon 1er et héritier de la couronne impériale. Bien que les paysans soient plutôt bonapartistes (à leurs yeux Bonaparte est le continuateur de la Révolution de 89) la victoire de Louis-Napoléon fut moins nette dans la Drôme et dans l’Ardèche que dans d’autres départements. Il faut dire que les Comités Républicains avaient fait une intense contre-propagande. Les élus républicains de 1848 seront tous réélus en 1849. Pourquoi est-on moins bonapartiste dans la Drôme ? Le contexte religieux l’explique partiellement. L’implantation des protestants y est importante : 331 familles à Cliousclat, 161 à Grâne, 1 200 à Bourdeaux, 30 à Poët-Célard, 50 aux Tonils (archives de 1807). En 1854 à Loriol il y avait 1 193 protestants et 2 416 catholiques... 25 à 60 % de protestants dans cette région affectée par l’insurrection. Les protestants sont l’élément moteur de l’anti-bonapartisme. L’Ancien Testament apprend que le pouvoir absolu n’est pas agréable à Dieu, d’où leur inclination à la démocratie et donc leur rejet de l’Empire. Ils ont également un problème d’enseignement : si les catholiques peuvent avoir leur école, il n’en est pas de même pour eux, pas assez nombreux dans les villages pour la financer. Enfin les protestants sont contestataires de tradition et d’éducation.
Mais ceci n’est pas encore suffisant pour s’opposer à Louis-Napoléon Bonaparte. Il faut d’ailleurs noter que le chef des insurgés de Dieulefit était catholique. Cherchons donc une autre explication !
Partout, dans les vallées du Jabron et du Roubion, il y a surtout de tout petits propriétaires (moins de 5 hectares) et la vie y est rude. En 1850-51, le cours du blé est le plus bas du siècle : 13 à 17 F l’hl, alors qu’il est monté jusqu’à 80 F. Le bétail est peu nombreux. Les paysans s’entraident. On fait du troc. Alors, pour avoir quelques sous, le paysan devient ouvrier saisonnier, lui, sa femme et ses enfants aussi : 12 h en usine, 4 h dans les champs. Dans les vallées il y a de nombreuses petites usines, magnaneries, filatures, tissages de la soie. Les enfants au moulinage sont astreints à travailler de nuit. Dans certaines usines, il faut payer pour être apprenti. Le travail se fait debout toujours. Lyon devient le pôle d’attraction. C’est une ouverture sur le monde extérieur, le monde ouvrier des villes. Des idées avancées pénètrent ainsi jusque dans les campagnes qui comptent ici moins d’illettrés qu’ailleurs.
Des insurrections ont déjà éclaté en 1849 à Lyon où des Drômois étaient impliqués.
Tous les départements de la Région militaire sont depuis en état de siège : journaux censurés, livres interdits, cafés surveillés ou fermés, fonctionnaires révoqués, réunions interdites… L’étouffement des libertés s’aggrave en 1850 : la loi Falloux ne reconnaît le droit de vote qu’à l’électeur séjournant depuis au moins 3 ans dans le canton. Conséquence : le droit de vote est retiré à 1/3 des électeurs, ouvriers, journaliers, domestiques qui, en quête de travail, changent souvent de résidence.
Dans la région, les populations manifestent leur mécontentement à l’occasion des fêtes traditionnelles :
Le traditionnel Carmentran, mannequin de paille qu’on promène le jour du Carnaval avant de le juger et de le brûler prend maintenant des allures particulières : à Ancône, en février 1850, il ressemble vraiment beaucoup à Louis Napoléon et les jeunes l’ont coiffé d’un bonnet rouge. Bien entendu, ils déclareront tous n’avoir pas remarqué cette ressemblance ! (...)
Le carnaval de Saint Gervais sur Roubion revêt un autre aspect car le contexte est douloureux. Le clerc de notaire Arsac a dénoncé le maire Gourjon, chez qui se fabriquerait de la poudre et l’instituteur Urdy qui se livrerait à la propagande socialiste jusque dans sa classe. Même si le sous-préfet pense qu’il s’agit d’une vengeance, des visites sont effectuées sans résultat, au domicile des deux hommes : effrayée par cette perquisition, madame Urdy, l’épouse de l’instituteur, mère de cinq enfants, meurt peu après. Le Carmentran qu’on promène les 10 et 12 février ressemble sans équivoque à Arsac : comme lui, il n’a qu’un bras. Sur sa poitrine, un écriteau porte sa condamnation à mort. Il est brûlé sur la place, dans l’allégresse générale. Le préfet est bien embarrassé, il se contente « d’inviter » le maire et son adjoint à démissionner.
En 1850, le préfet de la Drôme, Ferlay, renforce l’état de siège : l’inquisition militaire et policière se déchaîne de manière odieuse.
Exemple d’excès de zèle des forces militaires
Le 11 août 1850, les gendarmes sont envoyés à St Gervais pour y disperser un attroupement : ce sont des hommes, mais surtout des femmes et des enfants, des Mômiens, au nombre de 150 environ, venus là comme tous les dimanches chanter des cantiques et entendre la prédication de l’officiant Jacques Barbe. Quatre hommes sont arrêtés et passeront 2 jours en prison pour interrogatoire. Mais Ferlay était content : « Il suffit de montrer les dents à ces gredins pour les rendre souples comme des gants » écrit-il en septembre.
C’est donc dans une région misérable qu’a éclaté l’insurrection, spontanément, sans préparation aucune, et c’est d’ailleurs pour cela qu’elle a échoué totalement.
La répression
Dès le 9 décembre 1851 commence une dure répression. Les rescapés des fusillades vont se retrouver en prison à Montélimar, Valence ou Crest, dans la tour, facilement arrêtés car souvent connus de la police en tant que membres des sociétés secrètes, nées des clubs dissous par Louis-Napoléon Bonaparte (30 000 Membres pour 300 000 habitants).
- 1 600 personnes sont arrêtées dans la Drôme dont 1 100 graciées après le 20 décembre
- 400 personnes sont déportées au bagne de Cayenne ou en Algérie, dont un de nos Saint Gervaisiens.
- Une seule fut condamnée à mort et exécutée.
- Beaucoup se réfugièrent en Belgique ou en Suisse.
La répression à Roynac
Suite aux évènements du coup d'état du 2 décembre 1851. Les personnes ayant participé furent condamnés à la transportation, l'expulsion du territoire, à l'internement ou à la mise sous surveillance par la haute police.
Ces personnes déposèrent en masse auprès du ministre de la Justice un dossier de recours en grâce.
- Thomas AUMET, Cultivateur à ROYNAC, Transporté, (973 GP Drôme), Grâce du mariage le 02/02/1853
- Sébastien BASTIEN.
- Joseph BEAUME (°1814), Maréchal ferrant à ROYNAC, Transporté, (978 GP Drôme), Grâce du mariage le 02/02/1853;
- Jacques BEAUTHEAC.
- Casimir BRUGIER (°1820), Cultivateur à ROYNAC, Soumis à la surveillance, Grâce du 05/01/1853.
- Aimé CHAIX (°1822), Cultivateur à ROYNAC, Soumis à la surveillance, Grâce du 05/01/1853 .
- Aimé DAILLANS.
- Jean Antoine JEUNE (°1815), Maçon à ROYNAC, Transporté en Algérie, (768 GP Drôme), Grâce du 25/08/1852.
- Urbain NOYER;
- Jean MAURIN, Aubergiste à ROYNAC, Transporté, (978 GP Drôme), Grâce du 05/01/1853.
La répression à Saint Gervais sur Roubion
A Saint Gervais, 28 habitants, dont une femme, furent arrêtés, interrogés, sur dépositions, témoignages, accusations « outrageusement travestis, grossièrement déformés : dénonciations ou aveux faits sous la contrainte, la peur, la jalousie, l’esprit de vengeance, interrogatoires préfabriqués, absences de preuves… » Ils attendent en prison l‘étude de leur dossier et leur jugement par la Commission mixte créée en Février.
- Les frères BEC, cultivateurs : Auguste, 30 ans et François 33 ans, accusés d’être allés à Sauzet dans la nuit du 6 au 7 décembre avec un fusil chargé. Libérés mais soumis à la surveillance de la police générale jusqu’en juin 1853. Le maire a déclaré qu’ils étaient « de bonne vie et mœurs, et leur conduite a toujours été irréprochable ».
- Chavanet Prosper, 30 ans, cordonnier, déclaré de bonne conduite dans une famille honorable et laborieuse. Il est tout de même passé en conseil de guerre et condamné à 10 ans de détention le 13 mai 1852 pour « incitation à la guerre civile, port d’arme dans un mouvement d’insurrection et affiliation aux sociétés secrètes » Il est détenu à, Belle-Ile-en mer. A la suite d’une demande de grâce au Préfet et une lettre signée du maire Fert, du curé Sauvebois et de l’instituteur Friot qui demandent qu’on l’excuse : « il a été perverti, mais il est travailleur, dépourvu de fortune », « c’est un égarement momentané », sa grâce est accordée le 15 mai 1856 (à l’occasion du baptême du prince impérial ?) Il reste sous la surveillance de la haute police. Il va habiter à Montélimar.
- Freydier Antoine, 53 ans, maréchal-ferrant. Il a déjà été condamné à St-Gervais pour injures faites au maire et au notaire Arsac. Il passe pour être « haineux et vindicatif » mais s’occupe peu de politique. D’après un témoignage, il aurait crié « Coquins de Blancs, on va vous couper la tête ! » Il est déporté en Algérie pour 5 ans, puis gracié le 2 février 1853. Il s’est engagé « à ne jamais faire partie d’une société secrète, à respecter la loi et être fidèle au gouvernement que le Pays s’est donné. » Il choisit Montélimar comme lieu de son internement...
- D’autres : 4 cultivateurs, 1 boucher, 1 cordonnier, 1 propriétaire, 1 apprenti maçon, 1 cafetier, 1 charron furent soumis à la surveillance de la police générale.
Parmi les « mouchards » zélés, le notaire Arsac Joseph, secondé par sa fille, a déposé contre la plupart des personnes arrêtées comme de « mauvais sujets » faisant partie des sociétés secrètes.
Le curé, le maire, sollicités comme témoins, eurent une attitude plutôt neutre et généralement bienveillante. Pour preuve un extrait d’une lettre du maire Fert au Préfet en faveur des insurgés libérés, datée du 22 mars 1852. Après avoir loué « la générosité du prince », il continue ainsi : « Nous commencerons par vous exprimer notre reconnaissance pour l’indulgence dont vous avez usé, sauvant le plus grand nombre de nos détenus. Ils ont profité de la leçon que leur ont donnée les événements ; ils réparent leur faute par une conduite (...) à l’abri de tout reproche depuis leur élargissement. Des moyens de séduction avaient été employés pour les entraîner ; leur défaut d’instruction les rendant incapables d’entrevoir les projets criminels que révélaient les promesses fallacieuses du parti démagogique : vous avez fait preuve à la fois de discernement et d’intelligence en les considérant comme plus égarés que coupables et en ordonnant leur mise en liberté, de concert avec les honorables membres de la commission départementale chargée de se prononcer sur leur sort. Nous vous en remercions très sincèrement... »
En 1910, la municipalité de Crest érigea le monument sur la place de la liberté à l’emplacement de la bataille du 7 décembre 1851. « L’insurgé » jeune paysan, son fusil à la main, brave du regard la tour-prison.
En 1942, les autorités déboulonnent la statue (on comprend pourquoi). Un nouvel « insurgé a été mis en place en 1991.
Les détenus du département quittent peu à peu leur geôle, libérés par des grâces qu’accorde l’Empereur à l’occasion de son passage à Valence le 23 septembre 1852, de son mariage, de sa fête, de la naissance du prince impérial. La condition : faire acte de soumission. Les derniers insoumis ne seront relâchés qu’en 1859, sans condition, lors de l’amnistie générale.
Sources
- « L’espoir au cœur » - G.J. Arché – Ed Curandera.
- L’encyclopédie de la Drôme - Ed La Fontaine de Siloé.
- L’histoire de Montélimar - Ed Privat.
- Ah ! Quand viendra la Belle... - R. Pierre - Ed. Notre Temps.
- 1851, 10 000 Drômois se révoltent - R. Serre - Ed. Peuple libre Éditions.
- D. Orand, archiviste pour la liste des personnes arrêtées et pour ses conseils.
- L’état civil de St-Gervais.
- Les archives départementales pour les dossiers d’insurgés.
- Le titre de l'article est emprunté à La Drôme Encyclopédie - Ed La Fontaine de Siloé.
Récapitulation des événements de cette période
- 1830-1848 : Monarchie de Juillet-Régime conservateur, le roi Philippe d’Orléans refusant toute réforme.
- 24 février 1848 : Paris se soulève. Louis Philippe abdique. La république est proclamée.
- 1848 : Seconde république. Agitation socialiste et échec sanglant des journées de juin.
- 10 décembre 1848 : Louis Napoléon Bonaparte est élu à la présidence.
- Mardi 2 décembre 1851 : Coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte.
- Mercredi 3 décembre 1851 : Agitation à Crest. Début de l’insurrection.
Bibliographie
Voir aussi (sur Geneawiki)
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Notes et références