Généalogie Anabaptiste

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Définir l'anabaptisme : une tâche impossible

Un anabaptiste, du grec anabaptizein, est, d'après l'étymologie, un "rebaptiseur", c'est à dire quelqu'un qui rebaptise un adulte, considérant comme sans valeur le baptême reçu à la naissance.

Cette étymologie n'est pas gratuite. Elle nous dépeint, non pas quelqu'un qui refuse de baptiser les enfants, mais quelqu'un qui rebaptise les adultes. En effet, à l'époque de la Réforme, refuser de baptiser un enfant est (à peu près) inimaginable, et la contestation du baptême infantile se traduit, de façon moins extrême, de deux manières :

  • les plus modérés, comme Ulrich SWINGLI, en font une contestation théorique et doctrinale, purement intellectuelle, sans aucun passage à l'acte
  • les plus extrémistes rebaptisent les adultes, d'où le nom d'anabaptistes ; ils sont rares.

En toute rigueur, on ne devrait appeler anabaptistes que les personnes qui s'appliquent ce terme à elles-mêmes  ; on notera qu'un édit de 1535 de Charles Quint, applicable en Flandre, condamne "ceux qui s'appellent eux-mêmes anabaptistes" ; c'est donc qu'ils existent, quoique en petit nombre ; on connait les disciples de ZWINGLI qui ont pratiqué ouvertement le premier baptême d'adulte le 21 janvier 1525 à Zurich (voir plus loin). C'est l'évènement fondateur de l'anabaptisme. On connait aussi la malheureuse affaire de Munster. Menno SIMMONS (voir plus loin) était également rebaptisé. Probablement y a-t-il quelques autres cas, mais peu nombreux. La démarche était suicidaire, le rebaptême était suivi du bûcher à brève échéance, et très peu, parmi ces vrais anabaptistes (les seuls) sont susceptibles de s'inscrire dans un exercice intitulé "Généalogie anabaptiste", faute d'avoir des descendants.

Dès lors que l'on sort de ce petit cercle, l'usage du terme anabaptiste devient rebelle à tout essai de rigueur scientifique. Sa géométrie est variable. Plus les autorités veulent punir, plus elles l'utilisent de façon large. Plus un groupe craint la répression, plus il rejette l'usage de ce terme appliqué à lui même. Et, quand la répression diminue, on voit augmenter le nombre de ceux qui revendiquent l'héritage anabaptiste.

L'anabaptisme est à ce point lié à la Réforme Radicale et à la guerre des Paysans de 1525, qu'il en est pratiquement devenu synonyme. Mais au fait, où passe exactement la frontière entre la Réforme radicale et la Réforme "classique", c'est à dire acceptée par les autorités de l'Empire ? aucune réponse de portée générale ayant valeur juridique ne nous est apportée avant le 25 septembre 1555, date à laquelle est signée la Paix d'Augsbourg et son annexe, la Confession d'Augsbourg ; avant cette date, on sait que, parmi les doctrines et comportements des dissidents, il y en avait qui choquaient Charles Quint plus que d'autres, et qui étaient plus sévèrement réprimés (voir édit précité de 1535) ; à partir de la Paix d'Augsbourg, le protestantisme de la Confession d'Augsbourg, et celui-là seulement, peut être légalement adopté par les seigneurs qui le souhaitent ; cette situation juridique n'est dailleurs pas définitive ; les Calvinistes, oubliés de la Confession d'Augsbourg, réussiront à se faire légaliser à la fin de la guerre de Trente Ans (1618-1648) ; quant aux circonstances dans lesquelles l'église de Zwingli a été légalisée à un niveau supérieur au canton, si toutefois elle l'a été, personne ne parait s'y interesser mais, après la guerre de Trente Ans, le problème ne se pose plus car la Suisse est devenue indépendante.

Sous la plume des adversaires de la Réforme Radicale, le terme "anabaptiste" se généralise, et le lien avec la contestation du baptême infantile se distend jusqu'à presque disparaître.

Un exemple frappant est celui du révolutionnaire Thomas MUNTZER, toujours qualifié d'anabaptiste on ne sait pourquoi ; en réalité, il n'a jamais rebaptisé d'adulte, et il contestait si peu le baptême infantile qu'il en a réécrit la liturgie

Un autre exemple, dans le petit peuple cette fois : à Barr (67), le 23 juin 1583, Daniel BECKER, se voit traiter, dans les pages du registre paroissial, d'"anabaptiste" et de "gottlosen Mammaluk" ("Mamelouk sans Dieu) ; ces mentions sont inscrites à l'occasion du baptême de son fils Hans. Voici donc un curieux "anabaptiste" qui fait baptiser un enfant. Admettons (en réalité nous n'en savons rien) que Daniel y soit contraint. En revanche, il n'est jamais obligatoire d'être parrain, et il n'y a aucune raison de penser que Daniel n'ait pas été consentant pour participer, en tant que parrain, le 5 décembre 1569, au baptême de Jeneve WERNER.

Un autre exemple encore est constitué par l' édit du 9 août 1659, sur la base duquel est organisée la répression dans le Canton de Berne. On ne trouvera dans ce texte aucune discussion théologique, mais des reproches d'incivisme, de désobéissance, d'usurpation d'autorité : est qualifié d'anabaptiste celui qui refuse de porter les armes (peu importe à cet égard que les motifs de son refus soient ou non idéalistes), de payer l'impôt (là encore, peu importe le motif du refus), de prêter serment d'allégeance, d'obéir à l'autorité, en particulier à l'autorité religieuse officielle instituée par l'autorité politique, celui qui prêche sans être pasteur ; le baptême n'est pas totalement absent de l'édit : est condamné aussi celui qui baptise de sa propre autorité, sans avoir été nommé pasteur de façon officielle ; mais l'édit ne précise pas (et il semble que, pour ses auteurs, ce ne soit pas la question), s'il s'agit de baptêmes d'enfants ou d'adultes, de baptêmes "primaires" ou de "rebaptêmes" ; la question théologique de la validité du baptême infantile ne semble pas avoir intéressé les rédacteurs de l'édit ; la notion d'"anabaptisme" se confond ici totalement avec celle de désobéissance civile.

Ces imprécisions terminologiques, il faudra bien faire avec. Le généalogiste doit cependant les connaître pour éviter de se laisser pousser dans des impasses comme par exemple :

  • ne même pas rechercher les actes de baptêmes dans ses branches anabaptistes en croyant que par construction ces actes ne peuvent exister
  • croire que l'anabaptisme commence en Alsace avec la migration suisse
  • confondre tout l'anabaptisme avec son sous-ensemble Amish (le plus visible)

Le baptême à la veille de la Réforme

La situation du baptême à la veille de la réforme est un scandale.

D'après l'Église catholique, les enfants morts sans baptême ne peuvent aller au paradis. Ils se voient refuser un enterrement en terre consacrée. Cette doctrine est prise au pied de la lettre, les parents d'un enfant mort sans baptême sont au désespoir, persuadés de la damnation de leur enfant, mis à l'écart de la communauté pour y avoir introduit un mauvais esprit, voire accusés de sorcellerie. La macabre pratique du répit est généralisée.

En même temps, le baptême s'attend longtemps et ne s'obtient pas toujours. On connaît la pratique médiévale de l'interdit : en cas de conflit avec un seigneur, l'Eglise peut faire la grève des sacrements, prenant en otage le salut éternel des enfants de la région, à supposer que celui-ci soit lié au baptême ; même dans des circonstances moins dramatiques, le baptême n'est pas immédiat ; des raisons pratiques peuvent entraîner des attentes ; il est extrêmement contraignant pour les religieux de pratiquer autant de baptêmes qu'il naît d'enfants ; souvent, ils les regroupent, parfois pour des raisons locales ; on lira avec intérêt le livre de l'abbé NARTZ intitulé Val de Villé (Strasbourg, Bauer, 1887 ; référence M 15.075 au catalogue de la BNU); ce religieux souligne longuement les effets du manque de vrais prêtres séculiers dans la région lorraine des grandes abbayes, le rôle de curé étant tenu par des moines que l'encadrement spirituel des laïcs, d'après lui, n'intéressait guère et qui l'assumaient a minima.

Il faut attendre le Concile de Trente, commencé en 1545 et terminé 18 ans plus tard, pour que l'Eglise fixe à trois jours maximum après la naissance le délai du baptême.

Le refus du baptême des enfants, au moment où naît l'anabaptisme, est un interdit absolu. On pourra probablement en trouver un exemple ou deux durant la folle année 1525, mais à titre vraiment exceptionnel. Si, à cette époque, les anabaptistes avaient refusé de baptiser les enfants, ils auraient eu le peuple contre eux en plus des autorités, et l'on aurait assisté à une vague de pogroms anti-anabaptistes. C'est peut-être ce que l'autorité cherchait à provoquer, car on note plusieurs cas d'accusations douteuses de refus de baptême (voir plus loin). L'autorité ne parait en tous cas pas avoir remarqué de grave problème qui toucherait à de vrais refus de baptême. En effet, dans son édit de 1535, Charles Quint condamne en tant qu'anabaptistes ceux qui rebaptisent les adultes, ainsi que ceux qui se prétendent prophètes, apôtres ou évêques, et ceux qui les écoutent ou les protègent. Pas de mention au décret de refus de baptêmes infantiles. Nous pouvons en déduire qu'à l'époque de l'édit, il n'y en avait pas, que donc : même les "anabaptistes" n'osaient pas aller jusque là ; sinon, l'autorité aurait réagi.

Les abstentions réelles de baptême infantile pourront s'observer en petit nombre à des époques postérieures. Leur nombre ne croîtra de façon significative qu'avec la modernisation des mentalités et la diminution de la peur. En France, de telles abstentions concerneront principalement les familles Amish d'Alsace et des régions voisines, et à cet égard il importe de noter que Jacob AMMAN, fondateur de cette dissidence, prêche vers 1690, donc, à quelques années près, au siècle des Lumières et non à l'époque de la Réforme.

A l'époque de la Réforme, les cas de prétendus refus de baptême que l'on peut rencontrer sont souvent suspects.

Par exemple :

Le 20 mai 1525, dans les Vosges, une bataille, dite "massacre de Scherviller", voit l'écrasement des "Rustauds" et le massacre de plusieurs milliers d'entre eux. Un témoin oculaire des faits, Nicolas VOLCYR, qui accompagne l'armée catholique, mentionne que des femmes viennent se plaindre aux catholiques vainqueurs que leur curé refuse de baptiser les enfants. Une telle dénonciation dans un tel contexte était de nature à faire massacrer le curé. Elle est des plus suspecte. Nous sommes dans cette région du Val-de-Villé dont le clergé, nous indique l'abbé NARTZ (ouvrage précité), met peut d'énergie dans l'encadrement spirituel des laïcs. Il est donc probable que le curé incriminé aura fait attendre les baptêmes trop longtemps au gré des familles.

Un autre exemple concerne Thomas MUNTZER lui même qui, révolutionnaire en politique, est relativement modéré, en tant que prêtre, dans ses innovations purement religieuses. La GAMEO décrit comme suit son ministère :

"From Easter of 1523 until August 1524 Müntzer was a priest or preacher (things were still fluid in these years) in Allstedt, a small town in the Harz area, in the neighborhood of rich ore mines which produced a restless class of miners (Bergknappen), always eager to promote social changes. His sermons were attended allegedly by 2,000 hearers even though Allstedt had hardly more than a few hundred population. In Allstedt he now wrote a number of liturgical tracts concerning (infant) baptism and the German Mass. These liturgical writings are a clear indication that his reforms were a deviation from Catholicism in degree only, not in substance. He did not propose the establishment of a completely new church. He distributed the sacraments in both elements (instead of the one of the Catholic practice) and read the Mass in German interspersed by German hymns instead of using the Latin—that is all. As for baptism the records are contradictory; some say that every two months he baptized all the infants, others that he postponed baptism until the children were six or seven years of age. He never in his life baptized adults."

Nous voyons donc que, loin de refuser le baptême des enfants, il en a réécrit la liturgie.

Il est quand même souligné que, d'après certains, il baptise les enfants tous les deux mois et, d'après d'autres, il attend qu'ils aient six ou sept ans. On aimerait une certitude sur ce point. Organiser des baptêmes tous les deux mois, ce n'est pas particulièrement lent avant le Concile de Trente. Attendre que l'enfant ait six ou sept ans, ce serait plus problématique si c'était vrai. En tout état de cause, on s'étonne que les délais de baptême reprochés à MUNTZER soient à ce point variables : c'est l'indice d'une accusation sans dossier car, pour les contemporains, le délai réel d'attente du baptême était aisément vérifiable.

Thomas MUNTZER

Dans tous les pays de culture germanique, Alsace comprise, l'année 1525 voit apparaître un mouvement dit Réforme radicale lié à une guerre des paysans appelée aussi Révolte des Rustauds. Le mouvement touche l'Allemagne, la Suisse, ainsi que l'Alsace et la Lorraine. Certains des tenants du mouvement rejettent le baptême des enfants et rebaptisent les adultes, d'où le nom d'anabaptistes ("rebaptiseurs").Désavoué par LUTHER, le mouvement est durement réprimé.

Thomas MUNTZER, à l'origine disciple de LUTHER,s'en sépare en prenant parti pour la lutte des paysans ; c'est un révolutionnaire dont l'héritage spirituel est expressément revendiqué par MARX et ENGELS ; il a participé à la rédaction, des Douze Articles.

Les "Douze articles de Memmingen" sont, beaucoup plus que la contestation du baptême, l'étendard de la Guerre des Paysans et de la Réforme Radicale; c'est un véritable manifeste politique et social, largement diffusé grâce à l'imprimerie ; c'est le texte qui exprime le mieux les revendications du petit peuple ; en matière de religion, les Douze articles demandent pour les paroissiens le droit de nommer et de destituer le pasteur, ainsi que la limitation de la dîme et, quand c'est possible l'affectation d'une partie de son produit au soulagement des pauvres ; le texte ne contient pas de prises de positions théologiques particulières sur le baptême ou sur tout autre sujet, mais demande fermement, pour le paroissien de base, moins de charges et plus de respect.

Au point de vue religieux, MUNTZER est un millénariste (c'est à dire qu'il s'attend à ce que le Christ revienne sur terre de façon concrète et imminente pour procéder au jugement dernier).

MUNTZER est tué 5 mai 1525 à la bataille de Frankenhausen.

Ulrich ZWINGLI, père malgré lui de l'anabaptisme

ZWINGLI introduit la Réforme à Zurich dès 1523, puis à Berne en 1528, avec l'accord de l'autorité politique et de la façon la plus solennelle. Une assemblée nombreuse fut convoquée dans cette ville ; ZWINGLI y assista, d'après l'invitation de HALLER, qui avait composé dix thèses sur les points essentiels de la nouvelle doctrine. Elles furent discutées dans dix-huit séances et signées à la fin par la majorité du clergé bernois, comme fondées sur l'Ecriture, et autorisées par délibération des magistrats. L'éloquence véhémente de ZWINGLI brilla dans cette occasion du plus vif éclat et lui acquit l'ascendant le plus marqué. Après ce triomphe, tous ses collègues le regardèrent comme leur chef et leur soutien.

Erudit, lecteur attentif de la Bible, versé dans les langues anciennes, il élimine beaucoup de pratiques religieuses traditionnelles qu'il estime infondées selon l'Ecriture. En particulier, il ne voit dans la Cène qu'une simple commémoration, sans présence réelle du Christ dans le pain et le vin ; et il estime que le baptême des enfants n'est pas nécessaire à leur salut.

« ZWINGLI, dit son biographe HESS, n'attribuait pas au baptême le pouvoir de laver le chrétien de la tache du péché originel ; il ne croyait pas non plus qu'un enfant mort avant le baptême ne pût pas être sauvé. Quant au péché originel, il le regardait comme une disposition à faire le mal, et non comme un péché véritable ; et il ne pensait pas qu'il pût attirer à l'homme la damnation éternelle. Il comparait la nature humaine, après la chute d'Adam, à un cep de vigne frappé par là grêle, qui a perdu une grande partie de sa vigueur naturelle ; ou à une plante transportée des climats du Midi dans ceux du Nord, où elle n'a plus la même force de végétation. »

Cette doctrine du baptême est le fondement intellectuel de l'anabaptisme, dont Ulrich ZWINGLI, qu'il le veuille ou non, est le père. Celui que cela intéresse pourra lire de près les dates : il ne trouvera pas d'évènement anabaptiste antérieur à la prédication de SWINGLI. En particulier, l'affaire de Munster est postérieure ; la conversion à l'anabaptisme de Menno SIMMONS également.

Pour autant, ZWINGLI ne propose pas de cesser de baptiser les enfants ; ce serait incompatible avec son projet de prendre la tête de l'Eglise officielle avec l'accord des autorités politiques, et d'assurer paisiblement la direction spirituelle de l'ensemble de la population ; dans la mentalité du temps, un enfant mort sans baptême, c'est un mauvais esprit ; aucun dirigeant responsable ne peut proposer de les multiplier volontairement ; il importe donc de critiquer le baptême infantile, mais avec modération et sans passer à l'acte.

L'année 1525 voit SWINGLI s'opposer à un groupe de ses disciples ; ceux-ci rejettent le baptême des enfants, et veulent en outre se séparer de l'église "de la multitude". D'après le "Dictionnaire historique de la Suisse" :

'Le premier baptême d'adulte pratiqué le 21 janvier 1525 à Zurich parmi d'anciens élèves et amis de ZWINGLI constitue un évènement fondateur pour l'anabaptisme suisse. Partie de Zurich, rassemblée autour de Conrad GREBEL, Felix MANZ, Jörg BLAUROCK, Johannes BROTLI, Simon STUMPF et Wilhelm REUBLIN, cette branche de l'anabaptisme se répand rapidement dans l'est de la Suisse et le sud de l'Allemagne, au Tyrol du Sud en passant par les Grisons, vers Bâle et l'Alsace, et vers Berne. En bien des endroits, ce courant s'inspire d'autres mouvements radicaux."

ZWINGLI combat les anabaptistes (appliqué au petit groupe des disciples rebelles, ce terme est pour une fois utilisé à bon escient puisqu'il s'agit vraiment de personnes qui se sont rebaptisées mutuellement en assumant leur geste), mais avec beaucoup d'ambiguïtés. Sur la question du baptême des enfants, étant donné qu'il partage en réalité leurs vues, il leur oppose une argumentation peu convaincante, très artificielle, assimilant par exemple le baptême infantile à la circoncision de l'Ancien Testament pour pouvoir soutenir que la Bible l'a quand même prévu d'une certaine façon.

Avec Ulrich SWINGLI, l'Eglise officielle du canton de Berne a donc à sa tête un à la fois un adversaire résolu de la conception magique du baptême infantile, et un homme d'ordre, respectueux de l'autorité politique, le contraire d'un révolutionnaire, un homme soucieux de l'unité du pays, prêt à combattre tout projet de développement séparé, ou même tout projet qui pourrait être incompris du paroissien ordinaire. Un anabaptiste de droite, pourrait-on dire.

La notion d'anabaptisme devient alors particulièrement ambiguë et insaisissable. On voudrait choisir entre une définition théologique et une définition politique, mais c'est impossible.

Choisirons nous une définition purement théologique de l'anabaptisme ? Dans ce cas, il n'y a pas de différence à faire entre celui qui critique en doctrine le baptême infantile, celui qui le refuse à ses enfants ou à ses paroissiens, et celui qui rebaptise les adultes. Ce sont là trois aspects de la même doctrine. D'ailleurs, c'est bien ainsi que le juge raisonne en Allemagne, au procès de Michael SATTLER en 1527 ; l'acte d'accusation, point trois, lui reproche d'avoir "enseigné et cru que le baptême des enfants ne conduit pas au salut" ; "enseigné et cru ...", rien de plus, cette constatation suffit à condamner ; si l'on suit cette jurisprudence, et que l'on considère comme anabaptiste tous ceux qui ont "enseigné et cru que le baptème des enfants ne conduit pas au salut", on y englobera en premier lieu Ulrich ZWINGLI, puis de proche en proche tous les chrétiens d'aujourd'hui, car aucun ne soutient plus que le baptème soit un préalable au salut ; même en se limitant aux églises et sectes qui ne baptisent qu'à l'âge adulte, on engloberait encore la moitié des Américains ; finalement, les seuls auquels on refuserait la dénomination d'anabaptistes, ce sont les paysans de l'époque qui, même enclins à la désobéissance civile, ne refusaient pas volontiers le baptème lorsqu'il s'agissait de leur propre enfant ; paysans dont beaucoup ont été poursuivis sous la qualification d'anabaptistes (au sens donné à le mot par les autorités pousuivantes) ; ce serait vraiment absurde

Choisirons nous donc une définition politique de l'anabaptisme, suivant en cela les autorités bernoises ? Ce choix aurait l'avantage de coller à la réalité juridique des édits répressifs, et aux circonstances historiques qui ont fait que nos ancêtres ont été expulsés de Suisse et ont franchi la frontière alsacienne pour venir se poser sur les branches hautes de nos arbres généalogiques. L'autorité bernoise est d'ailleurs consciente de définir l'anabaptisme en termes politiques. Régulièrement, ces autorités de Berne sont interpelées par des instances hollandaises, qui leur demandent plus de liberté religieuse en faveur des anabaptistes. Et tout aussi régulièrement, Berne répond en substance : "La liberté religieuse nous est précieuse. Nous ne punissons que l'incivisme." ; cependant, à trop choisir une définition purement politique, on arrive parfois aussi à l'absurde, par exemple à qualifier d'anabaptistes des familles qui baptisent leurs enfants normalement. Ce serait aussi oublier que, si Ulrich SWINGLI a persécuté l'anabaptisme, il a aussi, paradoxalement, contribué à son succès en délivrant de la peur de l'enfer celui qui envisagerait volontiers de différer le baptême de son enfant mais qui n'est pas sûr de pouvoir le faire sans risques ; c'est SWINGLI et nul autre qui donne une vraie crédibilité à l'idée que baptême infantile n'est pas nécessaire au salut. Pour un couple de paysans bernois peu amateurs d'innovations, pas trop surs de leur propre lecture de la Bible, et nullement désireux de priver leur bébé de son salut éternel s'il vient à mourir en bas âge, une chose est d'entendre cette doctrine dans la bouche d'un "prédicateur de taverne", une autre est de l'entendre du haut de la chaire, exprimée par le théologien le plus autorisé de toute la Suisse alémanique.

Un autre point commun entre ZWINGLI et ses fils rebelles tient à la volonté de contrôler fortement l'individu. Les anabaptistes adeptes de la Confession de Schleitheim, préconisent la pratique de la réprimande et de l'exclusion ("Meidung") ; pour sa part l'Eglise zwinglienne devenue officielle fait fonctionner les Chörgericht, tribunaux paroissiaux qui distribuent des amendes pour avoir joué aux cartes, fréquenté la taverne, séché le culte, etc ...

Décidément, à part les idées politiques, SWINGLI et ses fils rebelles avaient tout pour s'entendre !

La Confession de Scheiltheim et le projet d'une contre-société

Dès 1527, une Confession, dite de Schleitheim, formalise des règles qui resteront vivaces et qui constituent un véritable appel à la désobéissance civile ; la GAMEO indique qu'elle a été probablement rédigée par Michael SATTLER et adoptée par un groupe de frères suisses ; elle comporte sept points, à savoir :

1 refus du baptême des enfants, "la pire des abominations du Pape"

2 mise à l'écart du frère ou de la sœur tombé dans l'erreur

3 unité de coeur de ceux qui partagent la Sainte Cène (ce qui implique que les exclusions aient été prononcées au préalable)

4 séparation d'avec le Mal, représenté en particulier par les institutions politiques et par les églises catholique et protestante ; c'est à ce point quatre que l'on trouve une interdiction de faire la guerre : " De cette manière, se détacheront aussi de nous, par la puissance de la parole de Christ (qui dit) "vous ne devez pas résister au méchant", les armes diaboliques de la violence, telles qu'épée, armure et autres choses semblables, avec toutes leurs utilisations, en faveur de nos amis ou contre nos ennemis (cf. Mt 5:39)."

5 institution de pasteurs habilités à prononcer les admonestations et exclusions

6 interdiction d'user de l'épée ; ce paragraphe développe longuement l'interdiction de condamner à mort et plus généralement de faire office de magistrat et même de faire appel aux tribunaux ;

7 interdiction du serment

Appliquées jusqu'au bout, ces règles créeraient une société parallèle complète, un "peuple-église". Le lecteur moderne doit se replacer dans la mentalité du temps pour sentir à quel point ces articles étaient clivants. Nous sommes là, malgré la non-violence affichée, devant un projet politique extrême, bien caractéristique de la Réforme radicale.

La confession de Scheiltheim a du succès, et l'"anabaptisme" se répand comme une traînée de poudre. D'une façon générale, les idées touchant à la citoyenneté donne lieu à des oppositions portées au rouge. Michaël SATTLER, lors de son procès, préconisera de refuser de prendre les armes en toutes circonstances, même en cas d'invasion turque. A ce degré, l'on ne sait plus s'il faut analyser cela de la non-violence ou comme l'envie de détruire son pays par Turcs interposés. En sens inverse, certaines villes et certains seigneurs suisses font un véritable commerce de chair à canon et vendent leur jeunesse au plus offrant sous le nom de mercenariat. L'idée d'un usage défensif et modéré de la force militaire parait étrangère à tous.

La question du service militaire est la plus clivantes, mais les autres points le sont aussi. Le refus de participer au fonctionnement des tribunaux à quelque titre que ce soit (juge, témoin, plaignant) revient à refuser le pouvoir d'Etat, dont les tribunaux étaient une des expressions principales ; le refus du serment va dans le même sens, empêchant tout serment de loyauté à la collectivité, et gênant même tout acte civil ou juridique, car, même pour un simple acte notarié, il fallait des témoins prêtant serment.

Il s'agit de rendre impossible toute participation à la vie sociale ordinaire, et de créer une église parallèle qui devient une véritable contre-société ayant même sa hiérarchie et son pouvoir de contrainte.

Le projet de désobéissance civile aura fait écho à la tendance ancestrale du paysan de l'Oberland bernois à survivre sur sa ferme en n'attendant rien de l'autorité politique et en souhaitant qu'elle ne lui demande rien.

Le pays connait une grave crise de la citoyenneté, parfois aggravée par des facteurs locaux, comme dans le district de Schwarzenburg, haut lieu de l'anabaptiste, dont les principaux villages sont Guggisberg et Wahlern. Ce district dépend à la fois des cantons de Berne et de Fribourg. Aucun des deux cantons ne veut renoncer à ses droits, car il importe de gêner l'autre. Mais aucun non plus ne veut investir dans le district de Scwharzenburg, qui reste un des plus pauvres de la Suisse. Cette situation héritée du Moyen Age va durer jusqu'en 1798. Dans un tel contexte, on comprend que la population ne se sente pas représentée par le pouvoir politique, et qu'elle ne souhaite payer ni l'impôt en argent ni l'impôt du sang.

La question se pose cependant de savoir comment le contestataire de base percevait l'idée de saboter l'ensemble du fonctionnement social, non pour se libérer mais pour se soumettre à une hiérarchie parallèle. Il n'est pas certain qu'elle aurait enthousiasmé les villageois du canton de Berne. Discuter des idées contenues dans la confession de Schleitheim, c'est une chose ; vivre sous leur législation, c'en est une autre. Mais n'oublions pas que les rédacteurs de la confession de Scheiltheim ne détiennent pas le pouvoir, que les autorités politiques bernoises contrôlent sévèrement la situation, et que le projet de créer un peuple-église séparé est probablement, en Suisse, tout virtuel.

En revanche, au siècle suivant, Jacob AMMAN réussira à implanter une vraie contre-société dans les censes alsaciennes, mais il devra affronter une opposition sans faiblesse de la part des prédicateurs suisses. A notre avis, le réseau des censes alsaciennes Amish est le premier exemple d'une telle contre-société qui fonctionne réellement.

Le millénarisme et l'équipée de Munster

Le millénarisme consiste à penser que le Royaume de Dieu va descendre sur terre de façon concrète et imminente. Cette doctrine est surprenante pour le lecteur moderne, mais il ne faut pas la sous-estimer. Elle séduit les malheureux en leur apportant l'espoir d'une amélioration immédiate de leur sort, d'un renouvellement du monde indiscutable et brutal. Cette doctrine a des racines dans certains passages de l'Ancien Testament (Isaïe, Ezechiel, Daniel), mais surtout, elle devient centrale à l'époque du Christ, comme on s'en apercevra en lisant la Bible dans son édition de la Pléiade, édition complétée par de nombreux textes apocryphes et intertestamentaires. C'était probablement l'attente des tout premiers chrétiens. Une lecture millénariste constitue une compréhension possible de certains passages du Nouveau Testament, l'Apocalypse au moins, et peut-être même certaines des paroles prêtées au Christ. Ces racines anciennes poussent des rameaux jusqu'à l'époque moderne, et il transparait quelque chose du milléranisme dans les idées de "grand soir", de "monde nouveau", ou dans des expressions comme "Du passé faisons table rase". Le besoin de renouvellement peut aussi se traduire en rupture géographique, et les migrations vers l'Amérique, au début mal connue dans sa matérialité et très fantasmée, lui doivent quelque chose.

La composante millénariste de la Réforme radicale ne doit pas être mise sous le boisseau. Elle bénéficie d'un fort soutien populaire. Le millénariste MUNTZER sait convaincre le peuple, nous l'avons vu ; il en va de même pour HOFFMANN à Strasbourg et pour Jean de LEYDE à Munster. Pensons y quand nous essayons d'imaginer ce que pensaient nos ancêtres. Le millénarisme est une doctrine qui a ses quartiers de noblesse populaire, et qui peut, comme nous l'avons vu, présenter des ancêtres jusqu'à Isaïe et des descendants jusqu'à Lénine. De quel droit aurions nous honte de ce que pensaient nos malheureux ancêtres, nous qui vivons dans du coton ? Même s'il est clair que le millénarisme a produit un certain nombre de grands allumés et en produit encore de temps à autre.

En 1533, Melchior HOFFMANN prêche ces doctrines à Strasbourg, et gagne de nombreux partisans dans le petit peuple ; Strasbourg, promise au rang de nouvelle Jérusalem, devient un haut lieu de l'anabaptisme millénariste ; HOFFMANN se lie d'amitié avec Martin BUCER et peut procéder au rebaptême de ses amis ; mais il finit par être emprisonné car les autorités de la ville, d'abord tolérantes, s'alarment du trop grand succès populaire de HOFFMANN et craignent des troubles révolutionnaires ; chez HOFFMANN, rebaptême, millénarisme et contestation sociale sont indissolublement liés : il faut être rebaptisé en préparation de l'avènement terrestre du Royaume de Dieu, et ce Royaume sera aussi celui de la justice sociale ; HOFFMANN meurt en prison après dix ans de captivité, persuadé jusqu'au bout que le Christ allait descendre bientôt, briser les chaînes de son serviteur et établir son Royaume

Après la déception à Strasbourg, Munster (Westphalie) parait une meilleure candidate au titre de Nouvelle Jérusalem ; le 9 février 1534, cinq cents anabaptistes armés s'emparent du pouvoir ; ils bénéficient d'un important soutien populaire et tiendront deux ans, galvanisés par Jean de LEYDE, disciple de HOFFMANN ; on est en plein délire ; on préconise de brûler tous les livres sauf la Bible ; de LEYDE prend plusieurs femmes à l'exemple du roi David ; l'affaire se termine dans un bain de sang.

La malheureuse équipée de Munster est unique, mais elle servira beaucoup à justifier la répression.

Le millénarisme séduira longtemps encore, y compris des intellectuels comme Johann Jacob ZIMMERMANN, un temps pasteur luthérien, astronome et mathématicien de haut niveau, disciple de Jacob BOEHME, se considérant comme rosicrucien ; il a un disciple nommé KELPIUS, qui conduit en Amérique le petit groupe des disciples de ZIMMERMANN (décédé au moment d'embarquer) et y fonde la secte Woman in the Wilderness dans la vallée du Wissahickon. Le groupe fascine, il inspirera plus tard le Ephrata Cloister. C'est loin de l'Alsace ? Peut-être, mais c'est quand même le Ephrata Cloister qu'allaient rejoindre les leaders du voyage de la Princess Augusta, qui ont entraîné avec eux tant d'Alsaciens (voir plus loin).

Esotérisme

Certains penseurs, comme Kaspar SCHWENKELD VON OSSIG (1489-1551) ou Jacob BOEHME ou Johan Valentin ANDREAE (1586-1654) sont à la charnière du christianisme et le l'ésotérisme, ils ne prennent pas la Bible au pied de la lettre, et même parfois ils ne s'y intéressent pas spécialement (Jacob BOEHME : « Je n'ai lu que dans un seul livre, dans mon propre livre, dans moi-même ».)

Le lecteur aurait tort de penser que de tels penseurs sont par trop exotiques.

D'abord, Jacob BOEHME eut parmi ses disciples ZIMMERMANN et KELPIUS, qui sont au départ d'une longue chaîne au bout de laquelle des Alsaciens du Ban de la Roche se retrouvent en Pennsylvanie : KELPIUS a inspiré BEISSEL que viennent rejoindre THOMMEN et YUCHLI, qui entraînent toute un groupe de Suisses et l'Alsaciens sur la Princess Augusta.

Mais c'est sur SCHWENKFELD (1489-1561) qu'il convient de s'arrêter car, malgré son refus de créer une Eglise à lui, il a malgré tout plusieurs centaines de disciples, et pas tous en Europe de l'Est. Né dans une famille noble de Silésie, il meurt en fugitif. Sa proximité avec le Duc Frédéric II de Liegnitz lui permet d'introduire la Réforme en Silésie et d'apporter un temps une certaine protection aux anabaptistes. Mais, de crainte que son action ne compromette son Duc, il part en exil volontaire en 1529. Il passe plusieurs années à Strasbourg, alors une sorte de point de passage obligé pour les dissidents qui souhaitaient confronter leurs idées.

SHWENKDELD avait eu une expérience mystique en 1518 ou 1519 ; il se distingue des autres acteurs de la Réforme par son insistance sur l'expérience intérieure ; personnalité attachante, respectueuse d'autrui, il conçoit la liberté religieuse comme un droit de l'individu et il est peu enclin à réprimer ou condamner. Au coeur géographique des débats à Strasbourg, il connait tous les acteurs de la période et participe parfois à des discussions sur l'anabaptisme (qu'il trouve trop bibliste et trop légaliste) mais en réalité, les discussions doctrinaires ne l'interessent pas. La transformation intérieure est la seule chose qui compte à ses yeux, il pense que le Christ s'est divinisé progressivement et que celui qui fait les efforts spirituels necessaires fera grandir le Christ en lui. Ces idées en font un grand ancêtres du piétisme, dont le fondateur, SPENER, venait d'ailleurs d'un milieu où l'on connaissait bien SCHWENKFELD.

La GAMEO (notice sur Sainte Marie aux Mines) a trouvé plusieurs documents donnant à penser que les disciples de SCHWENKELD étaient assez solidement implantés dans la Sainte Marie aux Mines d'avant la guerre de Trente Ans :

"Sainte-Marie-aux-Mines (German, Markirch), an Alsatian town in the Leber Valley (Department. Haut-Rhin), near the junction of three departments, Haut-Rhin, Bas-Rhin, and Vosges. There were Anabaptists in the Markirch Valley in the early years of the movement, as is indicated in a complaint made by the mining association to Count Egenolph III on 29 May 1561. It is directed against the "Anabaptists, Schwenckfelders, and divisions of these: Bilgerer (from Pilgram Marpeck?), Gabrielites, Sattlerites, and the like." This would indicate that the first Anabaptists here came from Strasbourg. They were quite numerous and lived on remote farms as well as near the town. They were possessed of a strong missionary zeal; the document mentioned above complains that "they creep into the houses everywhere, teach and preach without a calling, surround the common people with their subtleties." It points out the danger to which they expose the country by opposing military service.

But the count was not to be moved to expel them, not even when the chancellery at Ensisheim on 5 July 1562 ordered him in rather rude terms finally to take serious steps to get rid of Anabaptists, Sattlerites, and the like. This period of calm lasted until the Thirty Years' War. In the terror of 1635-1636, the population was nearly wiped out by hostile attacks, hunger, and plagues. The survivors moved to quieter regions, so that the country lay desolate. Traces of these refugees are found in the Münster Valley and in Strasbourg. The records of the church convention of 9 December 1640 mention a Jakob Mangold, an "Anabaptist Schwenckfelder, who has recently come from Markirch, where this sect has long had its synagogue." Does this mean that the Anabaptists in Markirch had built a church? Other records state that they met in a forest between Markirch and Schlettstadt. Tradition confirms this; the spot is still known."

Le petit groupe des disciples de SCWKENKFELD, durement persécutés, survit quand même assez longtemps pour pouvoir migrer en Amérique.

Mennonisme

Par réaction contre les "excès" du Munsterisme, Menno SIMMONS fonde l'anabaptisme non-violent, ou Mennonisme

Hutterites et Moraves

On note aussi le cas des Hutterites, ou Frères Moraves, qui vivent en Moravie, aux environs de l'actuelle République Tchèque, et qui exploitent de grandes fermes dont la propriété est collective ; le généalogiste alsacien aurait tort de penser que c'est loin ; les Frères Moraves sont recueillis à Herrnhut et leur mouvement est revivifié par le Comte Nicolas de ZINZENDORF ; celui-ci organise des voyages vers l'Amérique ; et là, toutes les origines, géographiques ou confessionnelles, se mélangent ; on retrouve par exemple, dans les colonies Moraves du Nouveau Monde, dont les archives sont remarquablement tenues, l'Alsacien Jacob CHRISTMANN, de Rothau, 67, et le Suisse un temps établi en Alsace Pierre BINGELLI/PINCKELE/BINCKLEY ; les doctrines de ZINZENDORF séduisent les milieux aristocratiques et intellectuels, dont le célèbre pasteur OBERLIN.

Anabaptistes en Alsace avant la migration suisse

La migration suisse n'a pas créé l'anabaptisme alsacien. Il a existé en Alsace des anabaptistes autochtones mais, comme le reste de la population, ils ont été emportés par la tourmente de la guerre de Trente Ans (1618-1648)

Au temps de la Réforme Radicale, Strasbourg était un point de passage obligé que nombre de théologiens dissidents ont fréquenté. Le petit peuple était partie prenante, et c'est même en raison du succès des prédications d'HOFFMANN que les autorités strasbourgeoises changèrent d'attitude, passant de la tolérance à la répression, comme nous l'avons vu plus haut. Nous avons vu également comment une première vague d'anabaptisme a surgi à Sainte Marie aux Mines.

Ailleurs en Alsace, l'anabaptisme se répand également. Sans prétention à l'exhaustivité, voici quelques événements relevés par la GAMEO à la notice Alsace :

  • réunions dans les forêts à Eckbolsheim, Lingolsheim, St Oswald, et dans la région de Schlackenloch
  • présence d'anabaptistes à Ruprechtsau, Schiltigheim, Benfeld, Sélestat, et près de Strasbourg (Murrhof et Gansau).
  • noms connus : Sébastien de Dingelen, Ott Helfenstein, Jacob Ernst.
  • en 1533, les citoyens de Sélestat se voient interdire d'admettre parmi eux des anabaptistes sous peine d'expulsion.
  • en 1538, le pasteur de Rosheim écrit à un citoyen de Strasbourg que 25 anabaptistes ont été capturés dans les bois à Epfig, et que 300 anabaptistes se sont récemment réunis dans les bois
  • à Ensissheim, près de Mulhouse, exécution de 600 anabaptistes ; mandats en date des 24 mai 1529 et 10 décembre 1544 alertant les autorités des risques de refus de baptême et d'arrivée de réfugiés ; interdiction d'aider, de loger ou de nourrir des anabaptistes.
  • 2 juillet 1572 : une notice rédigée à Ingersheim près de Colmar estime à 30 environ, sur 100, le nombre d'habitants d'Ingersheim "infectés" par l'anabaptisme, le plus riche étant Valentin MANGOLD ; les anabaptistes se réunissaient en trois endroits : le dimanche dans la forêt au dessus de Reichenweier, dans une caverne à Ingersheim et dans un vignoble près de Winzenheim ; trois autres personnes les écoutaient ; un homme et un enfant furent enterrés dans un vignoble.

L'anabaptisme dans le canton de Berne

Des racines vaudoises ?

Les disciples de Pierre VALDO, encore appelés Vaudois ou Pauvres de Lyon, ont été nombreux en Suisse au Moyen Age ; la question de leur influence directe ou non sur l'anabaptisme suisse est controversée par les Mennonites eux-mêmes ; le Martyrs Mirror soutient cette thèse en plus d'un endroit ; la GAMEO dans la notice intitulée "Waldenses", est très réticente, mais avec des arguments dont certains laisseront de marbre le généalogiste laïc ; cette excellente encyclopédie souligne par exemple qu'il n'y a pas eu de transmission apostolique officielle entre hiérarques vaudois et hiérarques anabaptistes.

Malgré cette circonspection, la GAMEO réserve au moins le cas d'une possible transmission assez directe en Bohème :

"A different situation obtained in Bohemia and Moravia. It is known that the Waldenses had great success in this area in the 14th-15th centuries; over 300 congregations are reported to have been in existence at one time. A. H. Newman held that Waldensian views were communicated to the Bohemian Brethren, and that from both groups members joined the Moravian Anabaptists in the 16th century.

This still does not prove a Waldensian or Bohemian Brethren origin for the Moravian Anabaptists, since it is known that Hubmaier, Reublin, and refugees from Tyrol introduced Anabaptism at Nikolsburg in 1526 ff. However, the similarity of teachings of the strict group of the Bohemian Brethren and those of the Anabaptists is sufficient ground for more careful study of the relation of the two groups, and with them of the Waldenses in this area. It is well known that a bishop of the Waldenses ordained the first bishop of the Bohemian Brethren ca. 1460."

Le dossier mérite de rester ouvert ; une influence vaudoise, même indirecte, aurait peut-être un pouvoir explicatif sur certains phénomènes.

On sait que les Vaudois ont, tant qu'ils ont pu, essayé de transmettre leur foi dans des lignées familiales ; or, l'anabaptisme suisse est beaucoup affaire de clans familiaux, et l'on observe la permanence de certains noms et de certains villages de façon étonnante, parfois depuis le Martyrs's Mirror jusqu'à l'époque moderne.

On est frappé aussi par une compétence politique particulière chez les anabaptistes suisses ; certes, ils ne sont pas les seuls à faire de la politique, en cette époque révolutionnaire ; mais ils sont les seuls à le faire avec compétence, là où par exemple, les courants millénaristes ne savent que galvaniser le peuple pour finir par se faire tuer.

Avec les Frères suisses, nous avons au contraire des objectifs politiques précis qui ne sont ni allumés ni suicidaires. Il s'agit de conserver le pouvoir politique dans certains groupes infra-étatiques et infra-écclésiaux (le clan familial, le village, l'église restreinte par opposition à l'église "de la multitude"), et, pour y parvenir, de doter de frontières le groupe à préserver. Le programme pour y parvenir est bref (les sept points de la Confesion de Schleitheim), précis, et adapté. Alors même que la Confession de Schleitheim suit de peu les débuts de la Réforme radicale, comme si elle était sortie tout armée. D'où l'impression qu'elle a peut-être des ancêtres et un historique qui nous échappe.

Les Frères Suisses

Les Frères Suisses sont à distinguer des Mennonites avec lesquels on a tendance à les confondre. La Confession de Scheiltheim, qui les définit, est antérieure d'environ dix ans aux prédications de Menno SIMMONS.

Il ne faut pas non plus les imaginer plus isolés qu'ils ne sont dans leurs montagnes ; Michaël SATTLER, rédacteur de la Confession de Scheiltheim, était allemand et non suisse, et il a un temps essayé de diffuser ses idées à Strasbourg.

Le Dictionnaire historique de la Suisse opère une distinction claire entre Frères Suisses et Mennonites lorsqu'il écrit : "En Europe, trois grands mouvements anabaptistes au moins peuvent être distingués: les frères suisses (principalement en Suisse, en Alsace et en Allemagne du Sud), les mennonites (Pays-Bas et Allemagne du Nord) qui, après l'épisode millénariste de Münster (Westphalie) de 1535, se regroupèrent autour de Menno Simons pour fonder une Eglise libre et pacifiste, et enfin les huttériens ou huttérites, installés en Moravie (République tchèque actuelle) après avoir fui le Tyrol, l'Allemagne du Sud ou la Suisse, qui se caractérisent par leur mode de vie communautaire dans des fermes où le travail et les biens sont répartis entre tous."

Les Mennonites

Ce n'est qu'en 1536, dix ans après l'apparition de l'anabaptisme suisse, que Menno SIMMONS , un hollandais, à l'origine prêtre catholique, rompt avec son Eglise et adopte l'anabaptisme tout en prônant la non-violence et en rejetant les "excès" de la Réforme radicale. Menno SIMMONS n'est donc pas à l'origine de l'anabaptisme suisse, puisque ce dernier commence en 1525 et se dote de la Confession de Schleitheim en 1527. A-t-il des disciples en Suisses ? Vers 1690, ses idées séduiront un Suisse, et non des moindres, puisqu'il s'agit de Jacob AMMAN, qui entraînera ses propres disciples. Cependant, il s'agit là d'une convergence a posteriori.

Autres courants ?

L'émigration vers les futurs Etats Unis (voir plus loin la section consacrée à ce sujet) révèlera l'existence d'autres courants plus discrets, qu'il est difficile d'essayer de quantifier.

Le 23 juin 1694, on observe la présence, sur le Sarah Maria Hopewell, parmi un groupe de disciples de KELPIUS , de Conrad MATTHAEI venant du canton de Berne ; il s'agit d'une secte millénariste appelée en Amérique "Woman in the wilderness", qui se fait la réputation de pratiquer la magie.

De plus, les leaders du voyage de la Princess Augusta en 1736, dont Benedict YUCHLI qui est de la région de Steffisburg dans le canton de Berne, se rendent au Ephrata Cloister, lui aussi très ésotérique.

Les anabaptistes au sens très large

Voir plus loin le paragraphe intitulé "Quelle sorte d'"anabaptistes" étaient nos ancêtres suisses ?"

La Guerre des Paysans de 1653

En 1653, un phénomène répressif supplémentaire se produit dans le canton de Berne : une guerre des Paysans éclate, se répand au point de faire trembler Berne, et échoue ; la répression est à la mesure de la peur que Berne avait éprouvée ; il ne s'agit pas, en principe, d'une révolte religieuse, mais l'échec est suivi d'un renouveau de l'anabaptisme ; la thématique sous-jacente est d'ailleurs toujours la même et tient à une crise de la citoyenneté, à l'époque, dans le canton de Berne ; en théorie, le régime politique est démocratique ; les bourgeois de Berne s'administrent librement ; oui mais... toute la difficulté est d'être considéré comme un bourgeois de Berne ; en Suisse, on est citoyen non de son lieu de naissance mais de celui de ses lointains ancêtres ; en cas de déménagement, on reste immigré de père en fils jusqu'à l'épuisement des générations ; à Berne, les personnes ayant le statut de "bourgeois de Berne" sont peu nombreuses et fonctionnent en fait comme une aristocratie ; les paysans des villages environnants ont l'impression de n'avoir que des devoirs sans les droits correspondants (d'où la réticence au service militaire, au serment de loyauté, et à tout ce qui constitue les devoirs du citoyen); l'opposition ville/campagne est forte, de même que le conservatisme, les paysans ayant l'impression que la modernité joue contre eux ; l'individualisme découle du mode de vie de ces paysans, en particulier ceux des régions les plus isolées ; le paysan de l'Emmental ne peut compter que sur lui pour survivre sur sa ferme, il y parvient tant bien que mal sans aide du monde extérieur et pense (probablement à juste titre) qu'il vit mieux quand Berne l'oublie ; la famille est la seule cellule sociale qui compte et la mentalité générale est patriarcale ; autant de thèmes qui sont communs à la guerre des Paysans de 1653 et aux variantes fermées de l'anabaptisme, même si les deux phénomènes n'en font pas qu'un.

Quelle sorte d'"anabaptistes" étaient nos ancêtres suisses ?

Ici comme ailleurs, c'est par leurs adversaires que le terme "anabaptiste" est utilisé, et le sens de ce mot est celui qu'ils lui donnent. L'on se reportera donc aux textes adverses. Comme nous l'avons vu, l'édit 9 août 1659 ne condamne que des attitudes purement politiques de désobéissance civile, ou de désobéissance aux autorités religieuses en tant qu'elles ont été nommées par les autorités civiles.

Nous avons affaire à de bien curieux "anabaptistes" qui, pour la plupart (c'est à dire à l'exception de la minorité Amish), font baptiser leurs enfants normalement, non seulement en Suisse où ils ne peuvent probablement pas l'éviter, mais aussi, après la migration, en Alsace, pays où aucune autorité n'imposait facilement le baptême ni l'état-civil à une famille protestante qui n'en voulait pas.

Il est bien possible que nos ancêtres suisses, certains au moins, aient redouté autant que d'autres de voir un de leurs enfants mourir sans baptême. En tous cas, lorsque nous les observons à Bellefosse ou à Neuviller la Roche, nous constatons qu'ils redoutent les mauvais esprits, en voient facilement partout, et sont alors portés à demander de l'aide, non pas au chef d'une Eglise officielle ou parallèle, mais à de fortes personnalités supposées compétentes dans la maîtrise des forces surnaturelles, comme Balthazar KOMMER ou Anne-Catherine GAGNIERE (voir à leur sujet l'article sur Bellefosse).

S'ils ne croient pas aux effets magiques du baptême ou de la Sainte Cène, nos ancêtres croient au surnaturel, et le Martyr's Mirror en particulier contient plusieurs récits de miracles ; ainsi, la mort sur le bûcher de Geeorges WAGNER en 1527 aurait été suivie dès la nuit suivante par la mort du shérif concerné ; Leonhard KEYSER, brûlé en 1527, cueille une fleur sur le chemin du bûcher et l'offre au juge en disant que, s'il est coupable et dans ce cas seulement, son corps et la fleur brûleront ; le cadavre refuse de brûler et, dans les cendres, on retrouve la fleur intacte ; Hans HASLIBACHER, décapité à Sumiswald, prédit que sa tête ira se placer d'elle-même dans son chapeau et que le ciel deviendra rouge, de même que l'eau du puits du village ; on pourrait multiplier les exemples.

Pour montrer que nos ancêtres ne refusaient pas le baptême infantile, en tous cas pas de façon massive, on citera le Dictionnaire historique de la Suisse, rubrique Baptême : "En 1850 encore, selon une enquête menée dans le canton de Berne, on enterrait secrètement, de nuit, les enfants mort-nés sous la gouttière de l'église, dans l'idée que l'eau ruisselant du toit aurait l'efficacité d'un baptême"

Parmi les anabaptistes d'Alsace, les Amish des censes contituent une contre-société aux frontières claires.

En revanche, pour les autres anabaptistes, appelés plus loin "anabaptisme ouvert", on restera prudent pour les qualifier ; ils se fondent rapidement dans la population générale, ils n'ont pas de mémoire collective organisée ; l'on se gardera donc de supposer qu'ils appartiennent à tel ou tel sous-ensemble de l'anabaptisme, Frères suisses, Mennonites, groupes ésotériques ou autres.

La migration en Alsace

Cadre général

La guerre de Trente Ans (1618-1648), en vidant l'Alsace (et le Palatinat) d'une importante partie de leur population, génère une immigration en provenance de Suisse.

De nombreuses familles anabaptistes originaires du Canton de Berne viennent se réfugier en Alsace et dans le Palatinat à partir des années 1650 environ, à la suite de persécutions en provenance des autorités bernoises. Certaines poursuivent leur migration vers l'Amérique dès le début du XVIIIe siècle.

Les villages suisses d'origine sont principalement les villages de l'Emmental, ceux des environs du lac de Thoune.et ceux du district de Schwarzenburg : Wahlern, Guggisberg

Les villages alsaciens d'arrivée sont principalement Sainte Marie aux Mines, des villages de la vallée de la Bruche (Salm, Le Ban de la Roche) et divers villages des Vosges.

L'Alsace voit la naissance du mouvement Amish fondé par Jacob AMMAN.

Dates à prendre en compte

1648 : fin de la guerre de Trente Ans ; l'Alsace est dépeuplée ; les migrants suisses anabaptistes s'installent en nombre et commencent à faire souche solidement (plus tôt, il y a probablement eu des installations individuelles) ;

1690 environ : Jacob AMMAN prêche la constitution d'une Eglise fermée ; le particularisme Amish (port de la barbe ...) donne un surcroît de visibilité au mouvement anabaptiste (ou plutôt : à une partie de ce mouvement, car l'anabaptisme ouvert, bien que moins visible, existe et mérite intérêt)

1712 : Louis XIV prend un édit d'expulsion des anabaptistes ; la grosse implantation trop visible de Sainte Marie aux Mines éclate ; les anabaptistes se dispersent dans les fermes vosgiennes discrètes dont certaines en outre appartenaient à des seigneurs indépendants de l'autorité royale,

Révolution française : par ses répercussions pan-européennes, la Révolution améliore le sort des anabaptistes suisses, qui n'ont plus besoin de migrer pour survivre ; s'ils migrent quand même, au XIXe siècle, c'est de façon libre et plutôt vers l'Amérique ; un Suisse qui arrive en Alsace après la Révolution n'a pas plus de raisons qu'un autre d'être anabaptiste.

XIXe siècle : il reste encore en Alsace des familles qui conservent le particularisme Amish tout au long du siècle ; elles sont cependant fortement attirées par la migration vers les Etats-Unis ; l'écrivain MICHIELS en fait une description en 1860 ; Hinrich Van der SMISSEN, un Mennonite hollandais, vient pratiquer une sorte d'inspection de ces frères si particuliers (son rapport est publié dans les Mennonnitische Blätter de 1893) ; il conclut  :

"Les frères des Vosges maintiennent très fortement la séparation d'avec tous ceux qui ont contracté un mariage mixte et d'avec tous ceux qui ont encouru une sanction de l'Assemblée. Cet usage, s'il n'est pas accompagné d'un élargissement des relations avec les Assemblées sœurs, amènera la décadence et la disparition de ce groupe."

Il précise toutefois :

" Mais on se tromperait en se représentant nos frères de Vosges comme des hommes sombres et fermés, en guerre à mort et sans pitié contre tout ce qui s'écarte de la tradition de leurs pères, et désireux de ne rien apprendre du tout des autres chrétiens. On ne saurait en donner de meilleure preuve qu'en rappelant la considération générale dont nos frères jouissent chez eux. Ainsi, lorsque l'Ancien AUGSBURGER, universellement connu, décéda, on en parla même dans les journaux, en soulignant particulièrement la considération qu'il s'était acquise dans la région.

L'auteur conclut à l'importance de garder des relation avec les frères d'Alsace, qu'il nomme "Heftler". Ce mot vient d'"agrafe" et se réfère au fait que cette branche s'habille comme autrefois, faisant tenir ses habits au moyen d'agrafes et non de boutons. Le mot Amish, plutôt américain, n'est pas de large usage, à l'époque, en Europe (bien qu'il s'agisse de cette branche).

XXème siècle : au cimetière anabaptiste des Quelles (commune de la Broque, 67), la dernière tombe date de 1933 ; au cimetière anabaptiste de Salm (La Broque, 67): de 1939 ; au cimetière anabaptiste du Climont (commune d' Urbeis, 67) : 1949.

Le Cimetière anabaptiste de Salm

Naissance du mouvement Amish en Alsace

Vers les années 1690, apparait en Alsace, à Sainte Marie aux Mines, le mouvement Amish, fondé par Jacob AMMAN, ("Amish" vient de "AMMAN"). AMMAN s'indigne du fait que certaines personnes soient intermédiaires entre l'anabaptisme et le protestantisme classique, il prône la fermeture et la constitution d'une église anabaptiste totalement séparée.

Voici la problématique, décrite par Jean SEGUY : "En effet, certains anabaptistes de Sainte-Marie-aux-Mines participaient à la vie civique de l'endroit en acceptant de servir de Heimburg ; d'autres ne refusaient pas de monter la garde pour protéger les récoltes et les biens contre les maraudeurs ; d'autres, ou les mêmes, fréquentaient les églises ou les prêches luthériens sans pour autant abandonner les assemblées anabaptistes ; certains enfin prétendaient qu'un individu pouvait être sauvé même dans une église de multitude. Cette dernière affirmation représentait, selon AMMAN, un mensonge grossier et devait être traité comme tel par l'Assemblée, c'est à dire par l'excommunication."

Comme nous l'avons vu, de telles idées, en tant que souhait, sont bien plus anciennes que Jacob AMMAN et remontent au moins à la confession de Schleitheim de 1527. Mais passer du désir à sa concrétisation n'est pas chose simple. Il est permis de douter que cette concrétisation ait pu être possible en Suisse, étant donné le haut niveau de contrôle qui pesait sur l'individu. En revanche, Sainte Marie aux Mines offre un boulevard, avec son foisonnement de paroisses de toutes sortes.

AMMAN rencontre une ferme opposition, en particulier du côté de l'ancien Hans REIST et des anabaptistes de l'Emmental, ce qui montre qu'il n'est pas légitime de mettre un signe "égale" entre d'une part l'anabaptisme et d'autre part la notion d'église fermée et de lignées endogames.

Les Amish réussissent toutefois partiellement : ils entraînent suffisamment de partisans pour créer le réseau des censes anabaptistes avec ses caractéristiques : particularisme vestimentaire, port de la barbe, autorité des anciens, etc ... L'apparition du mouvement Amish implique une forte visibilité. Il intrigue, il attire la visite d'intellectuels dès le XVIIIe siècle. Mais il convient de préciser que la migration anabaptiste en Alsace est antérieure à l'apparition du particularisme Amish.

S'agissant des anabaptistes non Amish, ils sont nettement moins visibles. Il semblerait d'ailleurs qu'ils se fondent très vite dans la population générale ; il suffit de voir les arbres généalogiques descendants de migrants suisses ; à l'arrivée, l'on peut, avec un faible risque d'erreur (voir plus loin), considérer qu'un migrant suisse est anabaptiste ; or, au bout d'une ou deux générations à peine, les mariages mixtes foisonnent, démentant (sauf à petite échelle, chez les Amish) l'hypothèse d'un peuple-église assurant sa continuité au moyen de l'endogamie et de la fermeture.

Les censes anabaptistes d'Alsace

une ferme anabaptiste
En Alsace, dans les Vosges, et dans la région de Montbéliard des anabaptistes, souvent Amish, occupent souvent les "censes" (fermes seigneuriales) où ils sont appréciés pour leurs compétences agricoles. La cense seigneuriale est à distinguer de la fermette cultivée pour leur propre compte par les villageois. La cense est le domaine propre du seigneur. Le censier n'est qu'un locataire, ce qui n'est pas forcément pour déplaire à des anabaptistes un peu marginaux, peu désireux d'investir dans une propriété terrienne qu'ils craignent de devoir fuir un jour, ou dont la transmission par héritage serait problématique du fait des lacunes de l'état-civil des familles (rappelons qu'à l'époque, seuls héritaient les enfants légitimes). Sa situation est plus précaire que celle du villageois ordinaire, même s'il y a des avantages : les censes seigneuriales sont vastes et situées sur de bonnes terres ; sur chacune, il y a du travail pour plus d'une famille. Le "censier" (locataire en titre de la cense) est en fait un chef d'entreprise qui traite avec le seigneur et emploie des coreligionnaires comme commis de ferme. Si le bail ne lui est pas renouvelé, il cherche une autre cense, ou bien il se place comme commis chez un coreligionnaire ailleurs. Il y a donc une certaine gestion de la précarité, gestion que les villageois ordinaires ne pourraient ou ne voudraient mener aussi bien. Ce schéma économique éprouvé crée une convergence d'intérêts entre les pouvoirs laïques et les censiers anabaptistes, d'autant plus que leurs mœurs conservatrices et patriarcales leur gagnent plus d'un avocat dans les classes dirigeantes ; en conséquence, c'est en vain que le curé s'époumone à dénoncer la présence de ces "hérétiques", et c'est aussi en vain que les villageois du cru se plaignent de voir les emplois sur les censes leur échapper. Même l'édit d'expulsion pris en 1712 par Louis XIV n'a que des conséquences qui se limitent principalement à Sainte Marie aux Mines (cette grosse communauté anabaptiste trop visible éclate et ses membres rejoignent souvent les censes vosgiennes plus discrètes ; ces dernières ne sont pas affectées par l'édit d'expulsion).

L'on voit se développer une population aux caractéristiques bien spécifiques :

  • il s'agit de souvent de Amish
  • les idées sont conservatrices et patriarcales
  • l'aspect extérieur est spécifique : port de la barbe pour les hommes, vêtements tenus par des agrafes au lieu de boutons, habits sombres, d'une seule couleur, sans décorations, fabriquées à la maison
  • il y a volonté de former un groupe séparé du reste de la société, cultivant son particularisme, endogame
  • la géographie mennonite est le réseau ; il n'y a pas de villages entièrement mennonites (même s'il y a des hameaux regroupant plusieurs fermes, comme à Salm ou au Climont) ; fermes et hameaux sont situés dans des lieux isolés, sur le territoire de villages catholiques ou luthériens, et communiquent entre eux à l'occasion de déplacements savamment structurés
  • on se déplace beaucoup et sur des distances variées ; les dimanches où il y a "assemblée" (le culte mennonite), celle-ci a lieu dans une ferme, puis dans une autre, par roulement ; il n'y a pas de bâtiments ecclésiaux spécifiques ; des voyages plus lointains peuvent avoir lieu s'il faut trouver femme ou emploi ailleurs que dans son hameau ; des voyages encore plus lointain peuvent conduire jusqu'en Amérique ; proches ou lointains, les voyages suivent des circuits bien précis : de cense en cense, ou selon des chemins plus aventureux mais si possibles défrichés au moins partiellement par d'autres mennonites
  • donc, on se connaît, entre Mennonites, sur un vaste territoire englobant la Suisse, l'Alsace, le Palatinat, puis l'Amérique ; il n'y a pas de limites tranchées entre les populations mennonites de ces diverses zones géographiques

L'état-civil de cette population est tenu de façon aléatoire. Le curé ou le pasteur peut à l'occasion enregistrer un acte, mais il arrive que la famille ne le leur demande pas. La constitution d'une société séparée n'est pas un vain mot. Certains "serviteurs" vont clairement jusqu'à s'attribuer les prérogatives des curés et des pasteurs en matière d'Etat Civil, comme le montre cette lettre du 2 septembre 1729 envoyée à son évêque par SCHOLSSER, curé de Saint Louis (conservée aux archives du Haut Rhin) :

"Monseigneur,

Je croirais manquer à mon devoir si je n'avais l'honneur de donner avis à votre Grandeur des abus qui se commettent dans ma paroisse à l'égard des anabaptistes qui y demeurent. L'ordonnance du Roy leur défend tous nouveaux établissements ; cependant, Valentin GUNGERICH, étranger, vient de se marier avec Véroine BLANCHIN, fille de Barbara STOUFFER, veuve, résidant en ce lieu, et cela à la vue de tout le monde, par le ministère d'Ulrich SOMMER, aussi étranger, qui fait fonction de ce qu'ils nomment leur patriarche."

Même les cimetières sont parfois spécifiques ; ceux des membres de la communauté qui ne sont vraiment pas baptisés n'auraient d'ailleurs pas droit à un enterrement en terre consacrée. Ils sont donc enterrés à proximité de leur ferme, dans leurs cimetières particuliers. Tel est le cas par exemple, du cimetière anabaptiste de la cense de Salm sur le territoire de l'actuelle La Broque, 67 . Ou de celui des Quelles, autre hameau de la même commune de la Broque, ou encore celui du Climont .

L'émigration vers les futurs États Unis

La Pennsylvanie des dissidents

William PENN fonde la Pennsylvanie où il fait deux séjours (1682-1684 et 1699-1701). L'intention est de fonder une terre idéale, un havre de paix et de tolérance religieuse.

Une immigration composée de représentants de différentes sectes persécutées cherchant un refuge se met en place. On observe une grande effervescence ; on voit resurgir des sectes que l'on croyait éteintes depuis la fin de la Réforme Radicale, dont le cadavre, près de 200 ans après, bouge manifestement encore ; on note une très grande porosité de ces écoles : en théorie, les opinions théologiques sont aux antipodes les unes des autres ; dans la pratique, on se connaît, on passe de d'une secte à l'autre, on s'associe pour affréter un bateau.

Les résurgences américaines sont l'occasion de voir que certains groupe, avant d'émigrer en Amérique, ont vécu en Europe dans une totale clandestinité. Sans le passage en Amérique, ils seraient restés inconnus de tous. L'ambiance des premières années de la Pennsylvanie nous montre des groupes religieux fort divers, pas forcément conservateurs, loin de là. Les Moraves [1] [2] [3] [4] mettent en commun les biens et pratiquent une sorte de communisme paroissial. Nombreuses sont également les sectes à tendances ésotériques : disciples de SCHWENKFELD VON OSSIG, de KELPIUS , Ephrata Cloister [5] [6] [7] [8]

Le conservatisme Amish éprouve de sérieuses difficultés à s'implanter (voir plus loin).

Cette effervescence nous intéressera même si, en tant que Français, nous n'avons en général pas d'ancêtres directs dans la Pennsylvanie des premiers jours. Car c'est dans cette direction qu'il faut regarder pour savoir ce que pensaient nos ancêtres anabaptistes ou dissidents d'Alsace ou d'Allemagne. La Pennsylvanie, du fait de la liberté religieuse sans limite qu'elle procure, est un révélateur qui ne vaut pas seulement pour les Américains. Ce que nos cousins font en Pennsylvanie, nos ancêtres le feraient en Europe s'ils le pouvaient.

Chaque fois que nous tentons de placer une frontière intellectuelle, nous échouons. Cette population à tendances dissidentes aime à faire son marché parmi les différentes églises en consommateur avisé  ; empiéter un peu sur le terrain de l'ésotérisme ne fait pas peur à tous, en tous cas pas à Benedict YUCHLI, qui rejoint le Ephrata Cloister à sa descente de la Princess Augusta ; fréquenter les catholiques n'est pas un problème, d'ailleurs les voyageurs de la Princess Augusta emmènent avec eux sept familles catholiques de Saulxures (67) ; rejoindre une église protestante "classique" n'a rien de tabou non plus ; en Pennsylvanie, ces églises, représentent une meilleure solution que les "sectes" pour l'individu soucieux de préserver sa liberté individuelle, contrairement à ce qui se passe en Suisse.

Même les frontières avec le piétisme sont floues ; la lettre de Durs THOMMEN relatant le voyage de la Princess Augusta est publiée dans une vieille chronique intitulée : The Power o' Piétism : c'est donc le souvenir d'un piétiste, et non d'un anabaptiste, que THOMMEN a laissé à ceux qui se sont intéressés à lui ; de même, la famille la famille CAQUELIN de Waldersbach a été initiée à la dissidence par un pasteur piétiste à Waldersbach, mais, en Pennsylvanie, elle devient en partie "Dunkard" (terme familier désignant couramment les Frères de Schwarzenau)et peut-être en partie Amish, en fonction de l'offre présente sur place.

Suisses et Amish en Pennsylvanie

1710-1720 : premières migrations en nombre sous forme de déportations forcées à l'initiative des autorités bernoises ; ces déportations cessent assez rapidement ; les autorités hollandaises (dont l'accord est indispensable puisque les navires partent de Rotterdam ou d'Amsterdam) s'y opposent (les Mennonites de Hollande sont socialement bien intégrés, contrairement à ceux de Suisse ; ils ont de l'influence) ; mais l'intention reste présente, et certains voyages sont plus que "limite", comme celui du "billander" Oliver en 1735 ; un "billander" (en français : belandre) est une péniche à deux mats nullement conçue pour traverser l'Atlantique ; par des publicités mensongères, les autorités bernoises convainquirent quelques anabaptistes d'y prendre place ; les passagers s'aperçurent très vite de la supercherie, d'autant plus que le navire accosta dans un premier temps, non en Pennsylvanie (terre de liberté religieuse) mais en Caroline du Nord (au régime beaucoup plus autoritaire) ; finalement, le capitaine de l'Oliver se trouva jeté aux requins, et le navire finit par accoster en Pennsylvanie sous la direction d'un deuxième capitaine, Samuel MERCHANT, qui sera aussi, en 1736, le capitaine de la Princess Augusta.

1740 : Fondation du Northkill Settlement ; il s'agit de la première communauté Amish organisée qui ait laissé trace aux Etats Unis, du moins en l'état actuel des recherches ; elle est petite et dure peu ; en comparant cette date à celle des premières arrivées, on note la lenteur de la constitution d'une colonie Amish organisée et quantitativement appréciable.

L'implantation de communautés Amish solides dans la Pennsylvanie du XVIII ème siècle est laborieuse ; ce point n'a pas échappé à certains historiens de cette Eglise, comme le montre cette remarque de S. Duane KAUFFMANN dans le numéro d'avril 2004 du Mennonite Historical Bulletin :

"Fixing the exact date of the first Amish arrivals in America is not possible. Names such as Brandt, Bricker, Hershberger, Hostetter, Huber, King, Kurtz, Lichty, Shirk, Zimmerman, and Zug, which were found in Lancaster County as early as the 1720s, were previously common among the Alsatian and Palatine Amish. If they had Amish origins, their failure to establish an Amish congregation after arriving and their early separation from the established Amish bodies in Europe suggest a minimal level of commitment that would have been easily relinquished in a new setting."

La Pennsylvanie du XVIII ème siècle n'est pas si propice qu'on pourrrait croire pour l'implantation des idées de Jacob AMMAN ; l'ambiance est à l'effervescence, et nombreuses sont les sectes et églises qui offrent à l'individu plus de liberté ; les idées de la Confession de Scheilteim sont d'application difficile ; le seul fait de débarquer en Pennsylvanie implique de prononcer un serment d'allégeance à l'Angleterre, première entorse. Ensuite, il va s'agir de rester en vie dans un pays en instance de conquête, parmi des Indiens qui se défendent.

Certains Amish refusent de se battre même en état de légitime défense, et ils se font tuer ; c'est ce qui se passe lors du fameux Hostettler massacre. D'autres renoncent aux idées de non-violence. On lira à titre d'exemple la généalogie descendante du couple Christian DEPPEN/Véronica RUSHTY en pages 590 et 591 du numéro 153 du bulletin du Cercle Généalogique d'Alsace (ou en ligne sur le site de Stephen LAWSON) ; la femme est la petite fille du prédicateur Isaac KAUFFMANN ; la famille KAUFFMANN est une famille emblématique, elle a sa notice particulière dans la GAMEO ;cela n'empêche que les nombreux enfants du couple participent à toutes les guerres de l'époque ; on trouve également des attitudes plus qu'ambigües dans la famille VON GUNDEN ; être non-violent ou participer à la conquête d'un pays, il faut choisir ...

Ces difficultés de démarrage tiennent aussi au fait que le mouvement est plus jeune qu'il en a l'air. Il ne faut pas imaginer que la communauté Amsih qui sert de réservoir à la migration a les dimensions du canton de Berne ; en réalité, comme nous l'avons vu, si le désir de créer une contre-société séparée est présent au moins depuis la confession de Scheiltheim en 1527, il n'en va pas de même de sa concrétisation. Il est beaucoup plus réaliste de situer en Alsace les vrais débuts d'un Mennonisme Amish capable d'organiser à sa guise sa fermeture et son endogamie. Et là encore, les dimensions sont faibles : ce sont celles du petit réseau des censes anabaptistes d'Alsace et lieux voisins. En réalité, ce n'est qu'en Amérique qu'a lieu le démarrage en grand.

XIXe siècle : le phénomène Amish, en tant que contre-société conservatrice de dimensions importantes, prend sa véritable ampleur aux Etats Unis, par immigration et par accroissement naturel, les familles étant très nombreuses.

Difficultés particulières de la recherche généalogique sur les anabaptistes d'Alsace d'origine suisse

Les anabaptistes venus de Suisse ont fourni des ancêtres à nombre de familles alsaciennes, vosgiennes, et de la région de Montbéliard.

Deux niveaux de difficulté se superposent : tout d'abord, il faudra savoir que la famille en question existe ; dans un deuxième temps, il faudra repérer son anabaptisme. Les difficultés de la recherches sont différentes selon qu'on a affaire à une famille Amish ou à une famille d'anabaptisme ouvert.

Difficultés particulières aux familles Amish

Pour les familles Amish, la difficulté est de repérer l'existence même de la famille, car l'état-civil pourra être tout simplement inexistant ; en effet :

  • il n'existe en Alsace ni villages entièrement anabaptistes ni lieux de culte fixes ni clergé professionnel ; les familles Amish tenaient sans doute la liste de leurs naissances sur leur Bible de mariage ;
  • les familles Amish évitent si elles le peuvent non seulement le baptême à la naissance, mais l'ensemble de l'état-civil ; il s'agit de vivre séparés de la société ; la confusion de la situation alsacienne leur ouvre de vastes possibilités d'éviter l'enregistrement dans de nombreux cas ; de ce fait, dans le cas des familles réticentes à l'enregistrement, la partie alsacienne et vosgienne de leur histoire peut être un véritable "trou noir"
  • en conséquence, certaines familles ne sont souvent pas repérables, ou alors elles sont repérées "a postériori". Par exemple, à Neuviller la Roche (67) existait une famille SOMMER, un clan anabaptiste important, que l'on repère à partir de la Révolution, quand les registres d'État Civil remplacent les paroissiaux ; étant donné ses multiples branches, on suppose que la famille foisonnait depuis plusieurs générations déjà, mais les paroissiaux luthériens ne comportent que de très maigres données la concernant ; autre exemple : dans la vallée de la Bruche (67), une famille ZEHNTER ne laisse que quelques traces très lacunaires et très espacées tout au long du XVIIIe siècle ; mais ensuite, au XIXe siècle, elle se met à foisonner au Hohwald et, avant cela, c'est à Ulrich ZEHNTER que le pasteur Oberlin s'est adressé pour avoir une liste des anabaptistes de la région. Cette famille très discrète pourrait donc avoir joué un rôle de responsable religieux, d'autant plus que le nom, présent dans le Martyrs' Mirror, est emblématique. On pourrait multiplier à l'infini de tels exemples. Une autre occasion de repérage a posteriori se produit en cas de migration vers l'Amérique. C'est en Pennsylvanie et en Caroline que nous repérons une famille ZIMMERMANN absolument foisonnante, alors que cette même famille ne laissait que de maigres traces écrites dans la région de Salm.

Difficultés particulières à l'anabaptisme ouvert

  • pour les familles pratiquant un anabaptisme ouvert, la difficulté est de les repérer en tant qu'anabaptistes, car elles peuvent avoir un état-civil tenu de façon tout à fait ordinaire par l'église catholique ou luthérienne du village ; et de plus, après un mariage mixte ou deux, nous ne savons plus trop jusqu'à quel point la famille doit toujours être considérée comme anabaptiste ; un exemple parlant est celui de Jean NEUVILLERS , de Bellefosse ; son nom n'est pas emblématique de l'anabaptisme, sa descendance n'est pas particulièrement endogame, son état-civil est tenu normalement aux paroissiaux luthériens, et pourtant, il est arrivé de l'Emmental une génération plus tôt que le gros des fugitifs anabaptistes, qui ont été heureux de trouver du travail sur sa cense ; celle-ci voit les réunions de préparation du voyage de la Princess Augusta, et plusieurs de ses petits-enfants sont présents à bord ; écarterons-nous du pied cette famille comme extérieure à notre sujet ?
  • l'on a tendance à ne chercher ses ancêtres anabaptistes qu'à partir du XVIIIe siècle, confondant l'apparition du mouvement Amish avec l'apparition de l'anabaptisme suisse en Alsace ; or le mouvement Amish ne fait que donner un surcroît de visibilité à une migration anabaptiste qui existait avant lui ; l'on a aussi tendance à ne considérer comme anabaptistes que des personnes appartenant à des lignées endogames à particularisme visible, ce qui revient encore à confondre l'anabaptisme avec son sous-ensemble Amish
  • l'on a tendance encore à ne chercher que des personnes solidement étiquetées anabaptiste ; or, la notion est floue ; il y avait (Jacob AMMAN s'en est assez plaint) des personnes qui, à Sainte Marie aux Mines, assistaient à la fois au culte officiel et à l'assemblée anabaptiste ; il y avait aussi en Suisse (les pasteurs officiels s'en sont assez plaints) des personnes qui, sans rompre ouvertement avec l'Eglise officielle, étaient toujours prêts à prêter l'oreille à une "prédication de taverne" ou à une "prédication de coin de rue" ; alors : à quel moment commence l'anabaptisme "invididuel" ? suffit-il pour être anabaptiste d'écouter un prédicateur dissident ? ou d'aider à fuir des personnes recherchées par les "chasseurs d'anabaptiste" ? ou de contester le baptême des enfants (dans la compréhension qui était celle de l'époque, à savoir qu' un enfant non baptisé était réputé se voir refuser le paradis) ? ; ou de ne venir qu'avec réticence à l'église écouter le sermon d'un pasteur, par ailleurs toujours prêt, au sein du Chorgericht (tribunal paroissial)à vous mettre à l'amende si vous avez joué aux cartes, juré ou bu un verre de vin ? si l'on retient ces critères, c'est la majorité de la population du canton de Berne qui est anabaptiste ; c'est probablement trop ; mais en même temps, ne retenir comme anabaptiste que les prédicateurs et leurs disciples les plus proches, ce n'est probablement pas assez ; en réalité, il n'y a pas de définition indiscutable ; c'est la répression qui fait l'anabaptiste

Difficultés tenant aux inexactitudes de certaines mentions

Lorsqu'un acte d'état civil concernant un anabaptiste figure dans un registre catholique ou luthérien, les opinions ne sont pas indiquées, ou alors de façon erronée ; par exemple, on observe que des Suisses, de toute évidence arrivés en Alsace avec le flot des réfugiés anabaptistes, sont qualifiés de "réformés" ; "réformés", passe encore : nous avons vu que la frontière n'est pas nette entre les idées du réformé ZWINGLI et celles de ses fils rebelles ; mais on s'étonne vraiment quand on lit des mentions telles que "de la religion de Calvin" ; en effet, le calvinisme n'existait pas en principe dans le canton de Berne, où l'église officielle est zwinglienne ; on s'étonne d'autant plus que les mentions de calvinisme supposé sont suffisamment nombreuses pour ne pas être expliquables par des aléas individuels ; certaines pièces utilisent le terme "calviniste" dans un contexte tel qu'on comprend bien qu'on a affaire à des anabaptistes ; il en est ainsi par exemple de la pièce 56 15 23 de l' inventaire du fond d'archives du Musée Oberlin (lien clickable plus loin) : il s'agit d'un arrêt du Conseil souverain d'Alsace qui enjoint aux "calvinistes" du Ban de la Roche de ne pas laisser leurs enfants sans baptème mais de les porter au curé catholique (1741). Voilà de bien bizarres "calvinistes" s'ils laissent leurs enfants sans baptème ; peut-être est-ce l'édit d'expulsion de 1712 qui conduit des anabaptistes à se dire calvinistes ; on ajoutera qu'un vrai calviniste qui aurait habité le Ban de la Roche pouvait parfaitement obtenir un baptème calviniste en se rendant, par exemple, à Sainte Marie aux Mines ; ce n'est pas un obstacle matériel qui empêche les prétendus calvinistes de faire baptiser leurs enfants à la naissance

Franchir les obstacles

Les obstacles peuvent parfois être franchis en s'appuyant sur l'histoire, sur les documents qui existent et sur les recherches de nos prédécesseurs.

S'appuyer sur l'Histoire

L'histoire vient au secours de la généalogie, et il n'y a pas de honte à s'appuyer sur ses données générales pour les appliquer avec prudence au cas particulier de nos ancêtres ; par exemple, en Suisse, à l'époque des persécutions contre les anabaptistes, l'émigration était interdite en général mais devenait obligatoire pour les anabaptistes, qui étaient expulsés par les autorités, ou soumis à une pression telle qu'ils n'avaient d'autre choix que de partir ; celui qui partait perdait ses biens à plus ou moins brève échéance ( édit du 9 août 1659) ; il pouvait même perdre sa famille : d'après le Martyr's Mirror, les pasteurs admettant le remariage des conjoints (hommes ou femmes) d'anabaptistes en fuite ; dans un tel contexte, l'hypothèse d'une immigration économique est exclue au moins en ce qui concerne le petit peuple ; en principe donc, le migrant est expulsé ou en fuite ; il est presque certainement anabaptiste au moins au moment où il passe la frontière de la Suisse vers l'Alsace(sauf peut-être aux alentours de 1653 : l'échec d'une guerre des Paysans et la répression qui a suivi peuvent expliquer aussi certains départs ces années là) ; on pourra donc le considérer comme tel, même sans en avoir la preuve papier ; aux générations suivantes, la question de savoir si ses descendants sont restés anabaptistes ou s'ils se sont intégrés dans la population d'accueil devient évidemment plus difficile, et l'on se gardera bien, alors, de présumer

S'appuyer sur les documents qui existent

  • en Suisse, les données d'Etat Civil sont riches, même si l'accès en est difficile et coûteux ; les familles anabaptistes font l'objet d'actes de baptême, de mariage et de décès dans les mêmes conditions que les autres ; les pasteurs ont un fort pouvoir de contrainte ; les baptêmes d'enfants ont lieu, que la famille en soit ou non contente ; outre les données d'état-civil classique figurant dans les registres paroissiaux, il y a en Suisse de nombreuses données biographiques, en particulier de source judiciaire ; en effet, il existait des tribunaux paroissiaux nommés "Chorgericht" qui condamnaient nos ancêtres à des amendes pour avoir bu, joué aux cartes,... si bien que ce genre de données est connu, de même que tout indice d'"anabaptisme" dont le Tribunal aurait connaissance (la définition de l'anabaptisme appliquée à l'ancêtre en question étant bien évidemment celle du juge).
  • en Alsace,les familles anabaptistes ne vivent pas dans la clandestinité, même si, dans le cas des familles Amish, le contexte alsacien favorise leur réticence à l'enregistrement ; celle-ci peut se donner libre cours dans une grande mesure, mais quand même pas de façon absolue, comme le montre le litige exposé plus haut entre le curé du Ban de la Roche et des familles "calvinistes" qui ne faisaient pas baptiser leurs enfants ; donc : parfois la famille réussit à éviter l'état-civil, et parfois non ; les enregistrements aux paroissiaux ne sont donc pas inexistants même s'ils sont lacunaires ; un indice d'anabaptisme peut d'ailleurs résider dans des mentions très incomplètes et espacées à ces registres ; ce serait probablement un exercice plein d'enseignements que de faire, aux paroissiaux de la région, une recherche systématique des familles à enregistrements espacés ou lacunaires ; l'exercice a d'ailleurs été commencé, sans prétention à un statut définitif [9] [10][11] [12] [13] [14] [15] [16] [17] [18] [19] ; il peut aussi arriver, comme au Ban de la Roche (voir liens utiles), que la sage-femme ait tenu la liste de toutes les naissances, qu'elles aient ou non été suivies d'un baptème ; enfin, l'on trouvera aussi des documents notariés, en particulier lorsqu'une famille loue une cense ;
  • les migrations vers l'Amérique ont fait resurgir des groupes qui auraient du rester clandestins ; les données américaines sont riches, souvent nominatives et souvent sur internet ; la base matérielle se prête mieux à la conservation des données : villages entièrement anabaptistes, lieux de culte fixes, développement du clergé ; de plus, l'individualisme américain décrit volontiers la naissance d'un village comme l'arrivée de familles pionnières qu'il désigne nommément ; le trauma de la migration incite à écrire sa biographie, et d'ailleurs certaines Eglises, comme l'Eglise Morave, y incite ses fidèles ; c'est dans les archives de cette Eglise que fut trouvée la biographie d'un migrant de la Princess Augusta (1736) nommé Peter PINCKLEY en Amérique, Pierre PINCKELE en Alsace, Peter BINGELLI en suisse ; nous apprenons ainsi qu'il est né à Guggisberg (canton de Berne) et qu'il a migré avec ses parents dans une grande ferme à Bellefosse (67) au Ban de la Roche et que, dans cette ferme, se tenaient des réunions de "personnes éveillées" ; or, de grande ferme, à Bellefosse, il n'y en a qu'une : c'est la cense du Bas Lachamp, liée à la famille NEUVILLERS ; Jean NEUVILLERS, l'un des premiers Suisses à avoir rejoint le Ban de la Roche, est d'ailleurs le grand père d'une grande partie des migrants du village ; tout se tient ; au prix d'un petit détour par l'Amérique, nous avons trouvé l'épicentre de la migration de 1736, du moins pour les Bandelarochois.

S'appuyer sur les recherches de nos prédécesseurs

  • les chercheurs qui nous ont précédés nous ont laissé une riche moisson ; grâces leur soit rendues ; je pense en particulier à Stephen LAWSON et Paul HOSTETTLER, dont les travaux sont cités plus loin ;
  • les circuits sont connus ; les villages suisses d'origine se situent dans l'Emmenthal et aux environs du lac de Thoune ; on note principalement les villages de Steffisburg, Riggisberg, Guggisberg, Wahlern, et hameaux limitrophes ; Erlenbach, Konolfingen ; Sumiswald, Hutwill ; d'autres villages peuvent se rencontrer à l'occasion, mais jamais très loin de cette région ; en Alsace, le principal point d'arrivée est Sainte Marie aux Mines ; noter aussi la vallée de la Bruche ; un ancêtre qui a travaillé sur une cense seigneuriale, même en qualité de commis, dans des lieux tels que Salm , le Ban de la Roche , le Hang (67) offre une quasi-certitude d'anabaptisme ; les censes seigneuriales de la région étaient très souvent tenues par des anabaptistes
  • de nombreux noms sont connus, soit par le Martyrs' Miror, soit par la Global Anabaptist Mennonite Encyclopedia online, soit par des recherches antérieures

Quelques noms connus

( sans recherche de l'exhaustivité ; le fait qu'un nom soit typique d'un milieu anabaptiste ne signifie pas que chaque porteur du nom était de cette religion)

Noms connus dès le Martyrs' Mirror : EICHER (en Alsache EYER ou Le EYER ? ; l'existence de la forme intermédiaire EYACHER est un argument en ce sens : décès de Anne EYACHER le 27/11/1736 à Natzwiller)) ; HASLIBACHER (ABISCHER ? ASHBACHER ? ) ; ROTH ; RUFF ; SCHLEBACH (SCHLABACH en Alsace); SCHNEIDER ; ZEHENDER ( ZEHNTER)

Prédicateurs partisans de Jacob AMMAN lors du schisme Amish (source :GAMEO, notice "Amish Division" ); ils ont contresigné sa lettre du 22 novembre 1693 : Jakob KLEINER, Jakob KAUFFMANN, Hans MOYER, Peter ZIMMERMANN, Hans BACHMAN, Hans NEUHAUSER, Felix HAGER, Nigli AUSPERGER, Heinrich GEREI, Christle STEINER, Ully OSWALT, Uli AMMAN ; (il s'agit en principe de prédicateurs alsaciens, car l'Alsace est réputée avoir suivi AMMAN presque entièrement).

Prédicateurs opposés à Jacob AMMAN ; ils ont signé ensemble une lettre du 13 mars 1694 ; de Suisse : Hans Reist, Peter Habegger, Ulrich Falb, Niklaus Baltzli, Peter Geiger, Dursch Rohrer, Jakob Schwartz, Daniel Grimmstettler, Ulrich Blatzley ; du Palatinat : Jakob Gut, Hans Gut, Peter Zolfinger, Christian Holi, Benedikt Mellinger, Hans Heinrich Bär, Hans Rudi Nägeli.

Noms associés à la ville de Thoune (canton de Berne) et sa région par la GAMEO : (outre celui de Jacob AMMAN, qui est d'Erlenbach, un village proche de Thoune) : SCHNEIDER, RUFF (Rupp), REUSZER (Risser), RICHARD, SORG, SCHLAPPACH, EICHER, KIENZI, KRAHENBUHL, RUEGSEGGER.

Quelques noms remarqués dans la notice de la Gameo sur l'Emmental : DAHLENBACH (DELLENBACH) ; GERBER ; GRIMM ; SCHEIDEGGER (SCHEIDECKER).

Familles ayant leur notice dans la Gameo : BACHMANN ; BECKER ; BRACKBILL ; BURCKART ; BYLER (BEYELER) ; DETWEILLER ; EGLI ; EICHER ; ENGEL ; ESCH (OESCH) ; EYMANN ; KAUFFMANN ; KOLB ; LANDES (LANDIS) ; NAFZIGER ; ROTH ; SCHLABACH ; SNYDER (SCHNEIDER) ; TSCHANTE ; YODER ; ZIMMERMANN.

Familles listées dans la "Mennonite Encyclopedia", version papier, édition de 1955, en tant que "Amish family names primarily from the Alsatian group". On trouvera la liste ci-après (les noms sont dans leur version américaine) : ALLBRECHT ; AUGSBURGER ; BACHMANN ; BECHLER ; BELLER ; BELSLEY ; BERCKEY-BURCKI ; CAMP-KEMP ; CONRAD ; EGLI ; EICHER ; FAHRNEY ; FLICKINGER ; GASCHO ; GERIG ; GUNDEN-GUNDY ; GUTH ; HEISER ; IMHOF ; JANTZI ; KENNEL ; FINZINGER ; KLOPFENSTEIN ; LITWILLER ; NAFSIGER ; OESCH-ESCH ; OYER-AUER ; RABER ; RAMSEYER ; REDIGER ; RINGENBERG ; ROPP - RUPP ; ROCKE-ROGGI ; ROTH ; RUVENACHT (= Rüfenacht); SCHERTZ ; SLAGEL ; SMITH ; SOMMER ; SPRINGER ; STAHLEY ; STRUBHAR ; STUCKEY ; STUDER ; SUTTER ; SWEITZER ; VECKLER ; WAGLER ; WYSE ; YORDY ; YUTZI-JUTZI ; ZEHR .

Noms de personnes enterrées au cimetière anabaptiste de Salm : BACHER NEUHAUSER DELLENBACH CHERICH SOMMER SCHLABACH GERBER AUGSBURGER KUPFERSCHMITT AYMANN POIROT HUNZINGER HUNG.

Noms de personnes enterrées au cimetière anabaptiste des Quelles : BELLER BACHER SOMMER BAL??ER SCHERIG NEUHAUSER.

Noms de personnes enterrées au cimetière anabaptiste du Climont: BAECHER SCHLABACH.

Autres noms rencontrés en Alsace  : DEPP/DEPPEN ; VON GUNDEN/FONGOND ; GINGRICH ; REIST/REEHSE (REUSZER ?); HOCHSTETTLER ; MOSIMANN ; RUSHTY

Nuvola apps bookcase.png Bibliographie

Paul HOSTETTLER Taüferwanderung 1580-1750 ; 2002 ; en allemand ; CD ROM sur l'émigration des anabaptistes-mennonites de Suisse vers l'Alsace et l'Amérique ; contient des relevés de registres paroissiaux des paroisses suisses de départ, ainsi que de nombreux éléments biographiques ; peut être consulté (référence : CD ROM n° 8) au Cercle généalogique d'Alsace, 5 rue Fischart 67000 Strasbourg ; il s'agit d'un travail proprement encyclopédique, contenant non seulement des données généalogiques mais aussi biographiques, extraites de sources suisses, alsaciennes et américaines ; c'est une véritable pépite compte tenu de la richesse des données suisses, très difficiles d'accès mais très riches.

Paul HOSTETTLER ; The trail of anabaptist emigration from the alpine foothills of Bern ; Pennsylvania mennonite heritage january 2005 ; traduit de l'allemand vers l'anglais par Ann C. SHERWIN.

Alfred MICHIELS, Les anabaptistes des Vosges. Première édition par Poulet-Malassis à Paris; réimpression 1980 aux éditions Jean-Pierre Gyss, édition augmentée d'une introduction de Jean Seguy et John H. Yoder; et de textes complémentaires d'un grand intérêt, en particulier : Les extraits consacrés aux anabaptistes par Alexandre Frédéric MASSON de PEZAY dans les Soirées helvétiennes, alsaciennes et franc-comtoises (1771) Johan Friedrich LUCE, Un mariage chez les anabaptistes de Colmar en 1779 Philippe GOUPILLEAU, Ma visite à Salm (1793) Hinrich VAN DER SMISSEN Visite chez les anabaptistes des Vosges.

Ce livre peut être lu :

  • à Strasbourg à la BNU , cote 44 848 au catalogue.
  • en région parisienne, au Centre Mennonite d'information cité plus loin

Neil Ann STUCKEY LEVINE : nombreux articles en anglais ; ceux qui traitent des anabaptistes d'Alsace sont à la bibliothèque du Cercle Généalogique d'Alsace

Monique-Marie FRANCOIS ; Le Voyage de la Princess Augusta, migration vers la Pennsylvanie, en 1736, d'une centaine d'Alsaciens de la vallée de la Bruche ; BCGA n°151 ; Suisses au bord de la crise de nerfs ... à Steffisburg, canton de Berne, vers 1700 ... BCGA n° 152 ; Les Voyageurs de la Princess Augusta, Généalogies remarquables, BCGA n° 153

Adresses utiles

  • Cercle Généalogique d'Alsace : Une visite incontournable ; sa riche bibliothèque contient de nombreux articles sur les familles anabaptistes, en particulier les études de Neil Ann STUCKEY-LEVINE.
  • Centre Mennonite d'information - 13, rue du Val d'Osne; 94410 Saint Maurice. - Bibliothèque très fournie sur l’anabaptisme. - Prendre rendez-vous auparavant.

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  • Inventaire du fond d'archives du Musée Oberlin à Waldersbach ;voir en particulier les pièces 38-4 (journal de Marguerite Sapience CAQUELIN, sage-femme au Ban de la Roche, avec un état détaillé des naissances, en particulier celles des enfants anabaptistes de la principauté de Salm et des fermes isolées) ; 56-15 22 à 27 : litiges opposant le curé de Rothau à des familles "calvinistes" et anabaptistes, le curé revendiquant le droit de baptiser leurs enfants


  • Global anabaptist mennonite encyclopedia online(GAMEO): un incontournable, les notices de cette encyclopédie traitent du phénonène mennonite sous tous les angles: historique, théologique et même parfois généalogique puisqu'on y trouve plusieurs notices de familles ; voir en particulier les notices intitulées : Alsace, Altkirch, Belfort, Bénaville, Baldenheim, Baumerthof, Birkenhof ; Bitscherland ; Blancrupt, Illkich-Graffenstaden, Meuse ; Montbéliard, Morhange, Münsterol, Muntzenheim, Neuneich Amish Mennonite congregation (Sundgau, Alsace, France) ; Neuf Brisach, Normanvillars (Alsace, France) ; Ohnenheim, Sainte Marie aux Mines, Salm ; Sarrebourg ; Schaffhouse ; Toul ; voir aussi, pour les débuts du phénomène Amish en Amérique, la notice intitulée : Berks County (Pennsylvania, USA)
  • Les Voyageurs de la Princess Augusta - Les Enfants de la Princess Augusta: Le navire Princess Augusta emmena en Pennsylvanie, en 1736, un groupe de voyageurs suisses et leurs cousins du Ban de la Roche en Alsace ces "livres virtuels" permettent de voir la complexité des migrations entre la Suisse, l'Alsace et l'Amérique, ainsi que la complexité des idées ; du fait des villages de départ, le groupe aurait en théorie du être majoritairement Amish, mais en réalité, une fois arrivés en Amérique, la plupart des voyageurs rejoignent de tout autres sectes, dont certaines en principe inconnues en Suisse et en Alsace.
  • Mennonite family history : ce site correspond à une revue américaine de référence ; s'abonner aux Etats Unis n'est sans doute pas simple, mais il est déjà instructif de lire la liste des noms étudiés et le titre des articles ceux de ces articles qui traitent de l'Alsace sont souvent présents au Cercle Généalogique d'Alsace.
  • Site de Stephen Lawson: Consacré à la généalogie personnelle de son auteur, ce site traite en particulier de familles DEPP/DEPPEN, KAUFMANN, RUSHTI/ROUCHTY, ZIMMERMANN/CHARPENTIER/CARPENTER (alliées entre elles) ces familles ont des branches tant en Suisse qu'en Amérique et dans les Vosges ; une notice biographique très précise traite de Isaac KAUFFMANN, prédicateur anabaptiste clandestin, qui officia dans la région de Steffisburg/Homberg (canton de Berne, Suisse) vers 1680, c'est à dire peu d'années avant que des familles de ces villages migrent vers l'Alsace il est donc permis de lui attribuer un rôle à l'origine de la répression qui provoqua la migration vers notre région.
  • The Martyrs Mirror: publié en 1660 en Hollande, ce livre (aujourd'hui lisible en ligne) traite des "martyrs" anabaptistes persécutés pour leur religion en Hollande et en Suisse, les personnes ayant des racines anabaptistes y reconnaîtront certains de "leurs" patronymes ou de "leurs" villages.


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