Abbaye de Montmajour

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Chevet et aperçu de la nécropole sur la gauche Photo B.ohland

Cette abbaye romane provençale est fondée à proximité d'Arles par une communauté bénédictine qui s'est installée sur un promontoire rocheux au Xe siècle.
À l'ermitage primitif font suite une chapelle de pèlerinage et une abbatiale romane sur deux niveaux. L'abbaye connaît un essor considérable et devient « un véritable chef d'ordre »[1] d'un ensemble de prieurés. Elle est également fortifiée au XIVe siècle.
Suite à une mise en commende et des conflits internes, elle décline peu à peu. Mais des Mauristes s'y installent au XVIIe siècle et, par la construction d'un immense monastère, lui redonnent vie et puissance, jusqu'à la Révolution.

Implantation et fondation

Maquette générale

À cinq kilomètres de la cité arlésienne, une colline rocheuse s'élevant à environ 40 mètres est appelée « mons Major »[2] (ou mont Majour). Elle forme une petite île encerclée de marais et devient pour les premiers Arlésiens à la fois un abri en cas de péril et un lieu pour inhumer leurs morts.
Cet îlot à l'écart, à l'époque propriété du chapitre de Saint-Trophine d'Arles, accueille à partir du Xe siècle quelques anachorètes en quête de solitude qui progressivement se regroupent en petite communauté.
En 949, une noble dame du nom de Teucinde[3] opère un échange avec l'archevêque d'Arles, obtient le domaine du mont Majour et, par son testament de 977, en fait don aux ermites. Ainsi naît l'abbaye de Montmajour, aux mains de religieux observant la Règle des Bénédictins.

Historique

Illustration représentant l'ermitge à flanc de colline
  • Très rapidement, la communauté bénéficie de dotations et de privilèges. Ainsi, les moines qui s'étaient contenté de la modeste chapelle Saint-Pierre à fleur de rocher, envisagent l'élévation d'une grande abbatiale sur le sommet rocheux. Dès le XIe siècle, l'abbaye devient un sanctuaire de notables qui y élisent sépulture, à commencer par les comtes de Provence « Guillaume IV (mort en 1063) et Geoffroy Ier (mort en 1063) »[4].
L'abbaye abritant une relique de la Vraie Croix, un pèlerinage est instauré en 1030, accordant des indulgences sous le nom de "Pardon de Montmajour" ; les pèlerins y affluent, ce qui entraîne la construction de la chapelle Sainte-Croix à l'extérieur de la clôture.
  • Durant les deux siècles suivants, des prieurés essaiment dans le secteur, très exactement 56 "succursales", placées sous l'autorité de leur maison-mère de Montmajour. Pour préserver sa puissance matérielle et son influence spirituelle, le site monastique est fortifié pendant la Guerre de Cent Ans, notamment avec la tour de Pons de l'Orme.
  • Au XIVe siècle, les papes mettent l'abbaye « en commende »[5], et au siècle suivant ont lieu des conflits entre Bénédictins et Antonins à propos des reliques. Il s'ensuit un relâchement (au niveau discipline et entretien du site) et le début d'un déclin. Malgré un regain de vigueur quand des archevêques d'Arles sont nommés entre 1430 et 1490 à la palace des abbés, le site est occupé par des militaires en 1591 et les moines chassés en 1593. Il en résulte un grand désordre.
Plans des constructions successives
  • C'est alors que réagit Monseigneur J.J. Barrault, archevêque d'Arles. Il mandate la congrégation de Saint-Maur, « l'un des grands ordres bâtisseurs »[6] du XVIIe siècle. Elle s'y installe en 1639 et entreprend de rénover les lieux : les marais sont asséchés pour accroître la superficie du domaine, le couvent médiéval est reconstruit en 1703, et à nouveau reconstruit en 1747 après avoir été victime d'un incendie.
  • Arrive la Révolution : les moines sont dispersés, le monastère est vendu à une femme qui le dépouille en peu de temps, l'abbaye est elle aussi vendue, en plusieurs lots. Deux éléments sont épargnés : la tour de Pons de l'Orme, achetée par le peintre Jacques Réattu et la chapelle sainte-Croix, achetée par le département. Quant à Prosper Mérimée, dès 1840, il fait classer les ruines de l'abbaye aux Monuments historiques[7]. Et le domaine devient propriété de l'État en 1845. Mais son délabrement nécessite nombre de réparations ou restaurations.
Le site est désormais ouvert à la visite et abrite des expositions ou manifestations culturelles.


Éléments primitifs

Nécropole rupestre

Sur le sommet de la colline s'est établi un cimetière dont il subsiste de nombreuses traces à l'arrière du chevet de l'abbatiale.
Creusées dans la roche, les plus anciennes tombes présentent une allure anthropomorphe[8]. Les autres tombes, du XIVe siècle, sont de formes rectangulaires. Orientées pour la plupart, les tombes étaient couvertes d'une pierre massive et de terre.
Cette nécropole était complétée par un cimetière laïc qui s'étendait jusqu'à la chapelle Sainte-Croix.

Ermitage Saint-Joseph

Abside de la chapelle sud

S'appuyant sur le flanc méridional de la colline, et en partie troglodyte, l'ermitage est le seul témoin de l'installation religieuse d'origine sur le Mont Majour.
Située entre 1030 et 1050, la construction est dès le départ constituée de deux chapelles côte à côte, dont celle du nord met à profit une cavité naturelle de la roche. Celle du sud correspond à une authentique église, placée sous le vocable de saint Pierre et comportant nef, travée de chœur et abside semi-circulaire. Il subsiste des vestiges de la chaire de saint Trophime et le maître-autel.
Dans le prolongement oriental de la chapelle s'alignent « des salles troglodytes, possibles traces de cellules des premiers ermites »[9].
Au XIVe siècle, une porte est percée dans le mur de clôture de l'abbaye pour communiquer avec l'ermitage et la chapelle ; une statue de saint Pierre avec ses clés en garde l'entrée. Au siècle suivant sont élevés des contreforts pour consolider l'ermitage.


Constructions médiévales

Chapelle Sainte-Croix

La chapelle est construite dès le début du XIIe siècle, dans un style roman provençal. Et comme elle est destinée à abriter les reliques de la Vraie Croix, elle est érigée à l'extérieur de la clôture monastique, afin de faciliter les allées-venues des pèlerins.
À la sobriété de l'élévation extérieure, répond un grand dépouillement à l'intérieur. Quatre absides semi-circulaires se répartissent régulièrement autour d'une travée carrée, voûtée, formant ainsi une fleur à quatre pétales.

Abbatiale Notre-Dame

L'abbatiale s'est construite sur deux niveaux au XIIe siècle également, avec quelques ajouts plus tardifs.

  • La crypte ou église basse a été bâtie au milieu du XIIe à même le rocher, en déjouant la déclivité de la pente grâce à une partie entièrement troglodyte (au sud).
La simplicité de son chevet à pans coupés dissimule un plan original, unique de ce genre en Provence, puisque l'agencement intérieur est concentrique. Le transept avec deux absidioles s'ouvre sur une rotonde constituée d'un déambulatoire voûté en berceaux, déambulatoire pourvu de cinq chapelles rayonnantes. Le cœur de la rotonde est coiffé d'une coupole dont les murs porteurs sont agrémentés de baies romanes. Cette disposition permettait de prononcer plusieurs liturgies en même temps, d'autels différents communiquant visuellement.
Dans ce sanctuaire, le visiteur est frappé par la qualité de l'appareillage des pierres et les nombreux signes lapidaires, encore très nets.
  • L'église haute, est élevée sur la solide assise de la crypte. Le projet de départ est une nef unique comportant cinq travées, mais deux seulement sont réalisées. Avec 14 mètres de large pour la nef, et la même valeur pour le diamètre de l'abside semi-circulaire, le volume obtenu et sa rigoureuse sobriété impressionnent. Une entorse originale est apportée aux règles habituelles de symétrie : les trois fenêtres du sanctuaire ne sont pas centrées mais déportées vers la droite en raison à la fois de la déclivité du terrain et des vents dominants (notamment le mistral). Enfin la voûte en cul-de-four de l'abside est rythmée par cinq nervures plates.
Le croisillon septentrional du transept comprend la chapelle Notre-Dame la Blanche, de style gothique (XIVe siècle), avec enfeu et tombeau de l'abbé Bertrand de Maussang


Cloître et autres éléments

  • Le cloître est construit en même temps que la nef et adopte une forme rectangulaire dont le grand côté mesure 27 mètres.
La façade des murs donnant sur la cour est renforcée de grands « arcs segmentaires »[10]. Les arcatures romanes et leur archivolte reposent sur des colonnettes géminées. La galerie orientale, avec ses chapiteaux sculptés du XIIe particulièrement bien conservés, débouche sur l'enfeu des comtes de Provence[11]. La galerie occidentale présente un fabuleux bestiaire au niveau des consoles ou chapiteaux, alors que la galerie méridionale semble plus tardive.
  • La salle capitulaire, également rectangulaire, est voûtée en berceau et éclairée par un oculus. Un escalier permettait d'accéder au dortoir.
  • Le réfectoire, jouxtant et maintenant la galerie sud, est en partie aménagé dans la roche. Il communique avec le dortoir par un escalier à vis dont il subsiste des vestiges. Cette salle est devenue un lieu culturel.
  • Le dortoir disposait à l'étage d'une surface égale à celle du réfectoire. En 1717, après l'installation des Mauristes, il est partagé en deux et réaménagé.


Fortification du XIVème siècle

Tour Pons de l'Orme
Couronnement de la tour

Lorsque la Guerre de Trente ans fait rage, l'abbé Pons de l'Orme décide de faire élever un donjon pour protéger l'abbaye.
La construction commence en 1369 sous la direction du maître d'œuvre Guillaume Helinc et selon un plan barlong.
Toute en pierres à bossages, la tour s'élève à 26 mètres et son couronnement est imposant : des consoles à ressauts supportent un crénelage avec mâchicoulis. À l'intérieur se trouvaient une cave à vivres et un puits-citerne, ainsi que différentes pièces réparties sur plusieurs niveaux.
Entre la tour et l'église abbatiale, existait une habitation en hauteur dont il ne reste rien : elle servait de logis à l'abbé.

Période mauriste

Monastère Saint-Maur Photo B.ohland

Sur les ruines du monastère médiéval, les Mauristes décident en 1703 de bâtir un monastère moderne et en confient la construction à Pierre II Mignard, architecte d'Avignon. Suite à un incendie quelques années plus tard, les travaux reprennent en 1726 sous la houlette de J.B. Franque. Des remaniements ont encore lieu en 1747 et 1776.
Le monastère n'est pas aussi grand que prévu au départ car seul le corps de logis oriental est terminé, avec 16 travées pour une façade longue de 70 mètres (au lieu des 25 travées projetées). C'était presque un palais s'élevant sur cinq niveaux totalisant une surface de 8 000 m2. Tout était prévu y compris cellier et boulangerie dont il reste le four à pain.
Suite à la Révolution, toiture et charpente sont démolies et le site devient une carrière de pierres.
Le monastère est cependant classé aux monuments historiques et restauré en 1994.

Quelques abbés

Prénom(s) NOM Période Observations
- -  
Foulques de CABANES 1193 - 1204 Auparavant prieur à Miramas  
Guillaume de BONNIEUX 1204 - 1234 Ancien prieur de Saint-Antoine  
-  
Bertrand de MAUSSANG 1298 - 1316 Décède en 1316  
- -  
Pons de l'ORME 1368 - 1380 Auparavant cellerier de l'abbaye Saint-Victor à Marseille - Sera ensuite abbé à Saint-Victor - Décède en 1382  
- -  
Jean HUGOLEN - Décédé en 1430  
- -  

Voir aussi : Les abbés de Montmajour

Nuvola apps bookcase.png Bibliographie

  • Odile CANNEVA, Comprendre les abbayes et les ordres monastiques, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 32 pages, ISBN 978-2-7373-7755-6
  • Frédéric BARBUT, La Route des Abbayes en Provence, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 144 pages, ISBN 978-2-7373-8066-2
  • Jean-Maurice ROUQUETTE et Aldo BASTIÉ, L'abbaye de Montmajour, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2000, 60 pages, ISBN 978-2-7577-0177-5
  • Nombreux panneaux d'information sur le site

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Référence.png Notes et références

  1. Frédéric BARBUT, La Route des Abbayes en Provence, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 144 pages, ISBN 978-2-7373-8066-2
  2. Jean-Maurice ROUQUETTE et Aldo BASTIÉ, L'abbaye de Montmajour, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2000, 60 pages, ISBN 978-2-7577-0177-5
  3. Née en Bourgogne avant 928, Teucinde est la sœur de Gontard, prévôt de la cathédrale d'Arles, et est connue pour ses largesses. Elle décède après 977.
  4. Jean-Maurice ROUQUETTE et Aldo BASTIÉ, L'abbaye de Montmajour, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2000, 60 pages, ISBN 978-2-7577-0177-5
  5. Frédéric BARBUT, La Route des Abbayes en Provence, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 144 pages, ISBN 978-2-7373-8066-2
  6. Odile CANNEVA, Comprendre les abbayes et les ordres monastiques, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 32 pages, ISBN 978-2-7373-7755-6
  7. Base Mérimée
  8. Car elles comprennent une logette pour la tête et épousent la forme du corps plus large aux épaules et resserré au niveau des pieds
  9. Frédéric BARBUT, La Route des Abbayes en Provence, Rennes, Éditions OUEST-FRANCE, 2019, 144 pages, ISBN 978-2-7373-8066-2
  10. Jean-Maurice ROUQUETTE et Aldo BASTIÉ, L'abbaye de Montmajour, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2000, 60 pages, ISBN 978-2-7577-0177-5
  11. Généreux donateurs lors de la fondation de l'abbaye

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