79128 - Cahier de doléances - François

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Extrait de Département des Deux-Sèvres: Cahier de doléances des sénéchaussées de Niort et de Saint-Maixent, et des communautés et corporations de Niort et Saint-Maixent pour les États généraux de 1789, Léonce Cathelineau , Imprimerie G.Clouzot - Niort , 1912 , 463p.


FRANÇOIS

Dép. : Deux-Sèvres. — Arr. : Niort. — Cant. : Saint-Maixent.

Gén. : Poitiers. — Elect. : Saint Maixent. — Dioc. : Poitiers.

Justice du Coteau, commune de Saint-Gelais.

Princip. cult. : blé.

Seigneur en 1750 : Marquis de Thors.

Seigneur en 1789 : Auguste Gédéon d'Auzy, seigneur de François.

Popul. en 1790 : 460 habitants.

Taille : 3.837 L 15 s; (princip. : 1.877 L 15 s ; access. : 884 L ; capitat. : 1.076 L).


PROCÈS-VERBAL

Date : 3 mars 1789.

Président : Louis Bordage, syndic.

Population : 87 feux.

Comparants : Simon Robert, Simon Faity, Antoine Morichon, Jacques Boudard, Louis Boinot, Pierre Dulac, Paul Massé, Jacques Mitard, François Champigny, Jean Menan, Jean Juin, Jacques Roquet, René Desmier, François Jauran, Louis Charnier, Louis Girard, Pierre Desmier, Jean Pérault, Auguste Mounier, Louis Delaumône, André Moreau, Jacques Dupont, Charles Boinot, Simon Texier.

Députés : Jacques-Pierre Cassin, maître en chirurgie, et Jacques Jamet, journalier.

Suivent 12 signatures.


CAHIER DE DOLÉANCES

Du trois mars 1789, à la réquisition du syndic général de la communauté et paroisse de François du ressort de l'élection de Saint-Maixent, qui nous a communiqué dimanche dernier, premier du présent mois, par lecture, obligations et affiches, et encore ce jourd'hui des ordres du Roi par lettres et réglements de Sa Majesté donnés à Versailles le 24 janvier 1789 pour la convocation et tenue des États généraux du Royaume. Ensemble l'ordonnance de M. le Grand Sénéchal du Poitou du quatorze février et celle du Sénéchal de Saint-Maixent en date du vingt-et-un du même mois, rendues en conséquence pour être convoquée au son de la cloche en la manière accoutumée et tenir assemblée d'habitants qui donneront leur cahier de doléances, plaintes et remontrances, et nommeront les députés requis par l'ordonnance de ladite communauté de François.

En conséquence après avoir été convoqués comme est dit ci-dessus, au son de la cloche, nous nous sommes assemblés aux fins de délibérer à ce qui nous est si sagement prescrit.

Premièrement. — Nous ne pouvons que nous féliciter et remercier très humblement Sa Majesté de la convocation qu'elle a bien voulu faire de ses Etats Généraux où la Nation et chaque communauté, par ses députés, va conférer avec le souverain des affaires importantes de l'État, mais puisque sa bonté veut bien permettre à chacun d'icelle en particulier de porter à son ressort son cahier de doléances, plaintes et remontrances par ses députés, nous trouverons sans peine, comme les autres peuples malheureux de la campagne, des matières suffisantes pour remplir cet objet. Il n'y a qu'à jeter nos regards sur les impôts considérables de cette paroisse, qui est très pauvre, les seigneurs de fiefs qui y sont assez nombreux, possèdent la majeure partie des terres, domaines, héritages dans une aussi petite paroisse, sont une preuve qu'elle est surchargée, et que les pauvres cultivateurs qui ne sont la plupart qu'exploitants, sont accablés de taxes que les maîtres pourraient porter au moins une bonne partie sans beaucoup être gênés. Les malheurs d'une paroisse sont encore plus grands si il s'y trouve de ces seigneurs qui exploitent par eux-mêmes, ou leurs commis, parce qu'alors les tailles [et] impositions tombent toutes à sa charge, et sont réparties à proportion sur chacun des malheureux qui la composent. Voilà des maux auxquels l'on ne saurait trop remédier, et que nous chargeons nos députés de faire représenter au pied du trône. Les pauvres cultivateurs travaillent beaucoup, ils sèment, et ils n'ont pas la joie de moissonner, où, s'ils moissonnent, c'est pour les autres et n'en retirent qu'un très mince lucre pour eux. Souvent un morceau de pain et un peu d'eau fait tout le soutien et l'aliment de celui qui porte tout le poids du jour et de la chaleur ; et des maux si grands, n'auront-ils donc jamais de termes ? Mais nous avons confiance que la clémence bienfaisante du bon Roi qui nous gouverne y aura égard. Combien d'autres sujets de doléances et de plaintes ne pourrions-nous pas faire ici ; notre pont de François absolument impraticable sous peu de temps si on n'y remédie au plus tôt, dont nous avons présenté notre requête sous l'auspice des assemblées provinciales y joint le certificat de plusieurs autres paroisses voisines pour constater la nécessité indispensable de sa réparation.

Plusieurs autres requêtes précédemment présentées au seigneur intendant [par] toutes les paroisses des environs, ne cessent encore plus que jamais de se plaindre de son mauvais état, d'en réclamer avec justice la confection [et] reconnaissance, [en raison] des différents accidents qui arrivent chaque année et les dangers qu'ils encourent eux-mêmes et leur bétail qu'ils ne peuvent passer ailleurs en le conduisant à dif- férentes foires pour le vendre ou en venant de l'acheter.

M. notre curé qui n'y peut passer pour aller administrer les sacrements dans deux villages ou hameaux écartés de ce côté, et lorsqu'il y est appelé pour porter le Saint-Viatique, préfère passer dans un petit bateau, ce qui est indécent, incommode et un inconvénient dangereux, qui n'aurait point lieu si le pont était en état ; outre ces inconvénients, ajoutons celui du transport des cadavres, non seulement catholiques, mais encore protestants, auxquels la bienfaisance du Souverain accorda dernièrement un cimetière commun. Toutes ces raisons n'ont point encore été écoutées, pas même une seule réponse à ce sujet, on nous délaisse dans notre misère, et, dans l'impossibilité de subvenir à des besoins si essentiels et si importants pour le public, et nous en particulier ; mais ne perdons pas courage, nous touchons de près à cette sage administration qui ressentira nos maux et nos misères pour les soulager.

Pour les remontrances que nous portons par nos députés à l'assemblée qui doit se tenir le cinq mars à Saint-Maixent, ressort duquel nous dépendons, sous le voeu que nous formons d'un impôt unique, la justice sera mieux observée, ce projet est à désirer ; la misère du peuple trouvera dans son exécution de grands adoucissements, cependant les riches n'en seront plus surchargés, et l'État même y trouvera de grandes ressources.

Secondement. — Pour nous conformer à l'article 25 et 31 du Règlement de Sa Majesté, nous avons procédé par la voix du scrutin à [la] nomination de deux députés nous représentant à l'assemblée préliminaire de Saint-Maixent que monsieur le Sénéchal dudit lieu a ordonnée être tenue le cinq mars de la présente année, les voix se sont réunies en faveur du sieur Jacques Cassin, chirurgien, et Jacques Jamet, journalier, auxquels nous avons donné pouvoirs de présenter et d'appuyer auprès de ladite assemblée le présent cahier de nos doléances, plaintes et remontrances, comme le double du procès-verbal de lecture, publication, affiche de la lettre du Roi et règlement y joint, et des ordonnances rendues en conséquence de Monsieur le Grand Sénéchal du Poitou et celui de Saint-Maixent, dont, du tout nous avons déposé l'original à notre greffe

Autres observations. —- Il est à remarquer que si les terres ne sont pas aussi fertiles actuellement qu'elles l'ont été autrefois, on peut en attribuer la cause au peu de faculté du cultivateur qui est écrasé par les charges des impôts et par le prix excessif que les biens sont affermés, ne peut pas se procurer autant de bras qu'il en faudrait, ni autant de bétail pour exploiter ses terres, ou pour faire du pourrin (1) pour les engraisser, d'où doit nécessairement procéder le peu de fertilité que l'on éprouve aujourd'hui et même les terres sont à la sixième partie des fruits envers les seigneurs au moins [d']une moitié desdites terres.

En foi de quoi nous nous sommes soussignés les jour et an que dessus.

(Suivent 16 signatures, celles de : Cassin, maître en chirurgie, et J. Jamet, députés ; Louis Bordage, syndic ; Mesnier, greffier, etc.)

(1) Bouses et crotins mis en tas dans un champ et qui, pourris, servent de fumier.